Nos trois justiciers masqués de l'extrême sont partis en vacances au royaume de l'underground et sont revenus avec quelques petits souvenirs bien dégoulinants. Aude, Clément et Crapulax savent vous gâter et ne lésinent pas sur les moyens. Pour assaisonner votre été, voici donc une bonne dose de death metal, un peu de thrash, un soupçon de hardcore, une mesure de black et quelques gouttes d'ambiances funestes. A consommer bien glacé, sans modération.
HEBOIDOPHRENIE : « Cannibalism For Dummies » (Great Dane Records)
J’en connais qui vont trembler à la vue de ce deuxième album de HEBOIDOPHRENIE… et ils auront raison les bougres parce que ce nouvel assaut du rouleau-compresseur de Bordeaux va faire claquer les escalopes dans les chaumières ! Aucun doute : le groupe a vraiment le chic pour ravir les instincts les plus sauvages avec ce fort bien nommé « Cannibalism For Dummies » saignant et sans chichis !
Il suffit de jeter une esgourde sur les premiers titres bourrés de blasts frénétiques et de riffs scie sauteuse pour s’en convaincre : la boucherie promise par cette couverture alléchante, signée Bastien Jez, est bel et bien au rendez-vous. Ce qui tombe presque ici comme une évidence puisque HEBOIDOPHRENIE a dans son ADN l’amour du death metal direct, puissant, moderne, qui ne rechigne pas à respecter la tradition avec quelques soli ciselés de main de maître. Je passe rapidement sur la section rythmique qui avoine comme jamais et ces parties de batterie qui feront tourner de l’œil le bûcheron le plus endurci.
Faut-il aussi préciser que la dérouillée est administrée sans détours par une production aux petits oignons ? Une évidence, je vous dis, une évidence…
(Clément)
ANAXAGOR : « Anaxagor » (Great Dane Records)
Fraîchement signé sur le label nordiste Great Dane, le clan bordelais ANAXAGOR lâche sur son premier album un death/thrash implacable, nourri au son des premiers méfaits de SEPULTURA, MASTER ou DECEASED, avec juste ce qu'il faut de modernité dans l’exécution pour donner un bon coup de punch à l’ensemble.
Le doute n'est ici pas permis : soli bien troussés, riffs percutants et éprouvés, section rythmique pépère qui envoie le bois sans faillir, la recette est ici connue, elle a fait ses preuves… et le quintet l'applique avec énergie et conviction. Voilà donc une démarche louable doublée d'un constat qui ne surprendra personne puisque ce premier album passe comme une lettre à la poste, rien ne dépasse, c’est propre et ça fait le job de la première à la dernière minute.
Dopé d'une production carrée et entraînante signée Sylvain d'EXOCRINE ainsi que d’un superbe artwork troussé par Jeff Grimal, « Anaxagor » régalera pour sûr les esgourdes des amateurs d’un death metal fortement empreint de thrash, à contre-courant des styles plus actuels…
(Clément)
MORA PROKAZA : « By Chance » (Season Of Mist)
Vous cherchez quelque chose d'intrigant et d'inclassable ? Un truc dément qu'il vous sera impossible de décrire à vos potes ? Alors ruez-vous sur ce troisième album des Biélorusses MORA PROKAZA. « By Chance » est un recueil d'ambiances malsaines et flippantes sur fond sonore lourd, agressif, parfois black metal ("I'm A Human"), parfois electro ("Check It"), toujours oppressant.
On y trouve des chansons extatiques comme "Madonna" où les cris caverneux incantatoires de Farmakon sur rythmes chamaniques et guitares black metal risquent rapidement de vous faire entrer en transe. Mais on trouve aussi des titres tels "Be There" à la limite du post-black de bonne facture. "Blacker Than Black" est le titre le plus metal de l'album qu'il clôt grâce à des rythmes militaires, des cris désespérés et des guitares acérées. Un rouleau compresseur !
Côté contenu, il est clair qu'on est plutôt dans l'occultisme et la misanthropie que dans le bucolique.
Alors si vous n'avez pas peur de vous fourvoyer hors des sentiers battus, que vous ne cherchez pas la mélodie et la structure carrée mais surtout si vous n'êtes pas déjà en proie à des hallucinations, écoutez MORA PROKAZA et appréciez la différence musicale.
(Aude)
GAEREA : « Limbo » (Season Of Mist)
Ce deuxième album des Portugais GAEREA fait preuve d'une grande puissance malgré qu'il ne bénéficie pas d'une production exceptionnelle. Le quintet nous emmène au fin fond d'un chaos nihiliste au son d'un black metal furieux.
Les six titres de « Limbo » ne tiennent chacun qu'à un mot comme on pourrait qualifier la musique de GAEREA : dévastatrice. La batterie est martelée sans faille, les guitares sont rapides, parfois dissonantes et le chant growlé est rempli de haine et de colère. Un véritable tourbillon de riffs déferle dans nos esgourdes et nous entraîne dans un monde à l'agonie.
Pour autant, « Limbo » n'est pas dénué de mélodies et une certaine misanthropie mélancolique est à l’œuvre sur tout l'album. Des morceaux comme "Glare" ou "Urge" sont de véritables balles lancées à toute allure là où "Mare" est plus atmosphérique, lent et lourd.
Dans tous les cas, les fans de BEHEMOTH de la première heure se régaleront et les amateurs de bon black metal se trouveront comblés par ce paysage dévasté décrit avec ferveur par un groupe qui devrait sans nul doute se faire connaître, surtout grâce à Season Of Mist.
(Aude)
GRAVEOLUTION : « Graveolution » - EP (Indépendant)
Loué soit l'internet au plus haut des cieux ! Cet univers de données informatiques en libre circulation nous permet, nous autres amateurs de musique extrême, de pouvoir faire presque quotidiennement des découvertes partout sur le globe. Encore faut-il savoir où chercher, à quel label ou à quel site internet en particulier s'adresser.
C'est toute la raison d'être de cette rubrique, celle de vous amener sur un plateau de metal (ah ah ah...) le meilleur du moment comme ce GRAVEOLUTION, produit fabriqué en Hongrie 100% pur thrash.
Nerveux comme une puce sous stéroïdes, puissant comme le pet d'un éléphant qui se serait retenu pendant 15 jours, rapide comme l'éclair car un peu hardcore sur les bords, le quatuor dispense une énergie peu commune qui a l'immense mérite d'être communicative autant qu'originale.
Notamment avec ce chanteur assez atypique pour le style (entre Perry Farrell de JANE'S ADDICTION et Tony Portaro de WHIPLASH période « Insult To Injury ») mais aussi parce que cet EP 5 titres agit comme une vaste tambouille qui laisse transparaître les différentes influences de ses musiciens.
Il n'y a pas eu de schéma directeur, de volonté commune d'aller vers un style défini : il y a juste une énorme envie de se lâcher.
(Crapulax)
MNEMOCIDE : « Feeding The Vultures » (Indépendant)
Dans la série « approche tes oreilles deux secondes, j'ai comme une envie soudaine de growler ma race », voici les Suisses MNEMOCIDE qui manient le death thrash avec l'agilité d'un pachyderme (celui de tout à l'heure) les yeux bandés, abandonné au milieu d'un magasin de porcelaine de Limoges.
Leurs rythmiques hybrides, qui faisaient déjà le bonheur de leur premier EP « Debris » sorti en 2018 (écoutez-donc un peu "Soul Collector " s'il ne fleure pas bon le CORONER par hasard...), bousillent une nouvelle fois tout sur leur passage.
Alliant puissance et lourdeur, faisant preuve d'une bonne dose de créativité dans les intros ("Again", "In Pain") comme dans les outros ("To The Nameless", "Like Ghosts"), MNEMOCIDE a le mérite de montrer qu'il cherche avant tout à se forger sa propre voie sans se calquer sur personne à l'image de ses soli, pas vraiment bouleversants mais toujours propres et inscrits dans une démarche très personnelle.
Pas de quoi envoyer mémé passer la tondeuse à gazon avec un moteur V8 branché à la place mais une sacrée affaire à suivre, ça oui !
(Crapulax)