10 octobre 2020, 18:30

NIGHTMARE

• Interview Madie et Yves Campion

Un changement au poste de chant n’est pas quelque chose d’anodin dans la vie d’un groupe. Madie, qui est présente dans NIGTHMARE depuis un peu plus d’un an, a visiblement trouvé sa place rapidement. La preuve en est avec ce nouvel album « Aeternam » qui est une vraie perle musicale, et devrait marquer pour toujours l’histoire du groupe le plus illustre du heavy made in France.


Madie, Tu as déjà été interviewée par HARD FORCE en juillet dernier, toutefois, un point restait en suspens, Yves doit nous raconter votre rencontre.
Yves : On s’est rencontré au 69... pas dans un club échangiste mais un café-concert de la région de Grenoble. Ce soir-là j’étais présent pour un anniversaire bien arrosé avec des potes. Madie jouait dans un groupe qui s’appelait SMOKY EYE, moi j’étais au comptoir lorsqu’elle a attaqué le premier morceau. Dans ce petit club bien rempli elle a mis le feu ! Elle se roulait même par terre. J’ai alors dit à mes potes que j'allais les rejoindre plus tard, et j’ai écouté tout le concert. A cette époque on était encore avec Jo, mais j’avais aimé sa façon de chanter et d’être sur scène. Quelques années plus tard, en faisant de la prod pour METALLIAN, nous avions eu une fenêtre de tir pour choisir la première partie d’ULTRA VOMIT. Elle était dans un autre groupe, qui est plus alternative dans le genre ALICE IN CHAINS, et nous l’avons invitée. Je l’ai donc vue sur une grande scène, nous étions dans une salle de 600 personnes. Et j’ai été impressionné, par rapport à la fois d'avant, elle avait vraiment grimpé en niveau, j’ai donc mis un coup de Stabilo sur son nom (rires). A cette période nous étions avec Magali, et quand elle est partie on s’est posé la question sur le chant. Reprendre un mec ? c’était risqué, nous voulions garder cette continuité dans notre nouvelle identité. Alors on a pensé à elle, être une chanteuse au-dessus du niveau de Magali Luyten il faut le faire. Nous avions aussi le contact d’une super chanteuse au Texas, mais cela devenait compliqué. A ce moment-là nous avions un concert de prévu et nous ne voulions pas l’annuler, on ne voulait pas planter l’organisateur qui est quelqu’un de cool. Dans un premier temps on a proposé à Magali de jouer pour une dernière fois. Même si on s’entendait bien, elle a mal réagi. Le concert était trop petit pour elle, si on lui avait proposé un Hellfest elle aurait peut-être accepté, mais là c’était un petit festival, donc elle a refusé. Alors on fait relever le chalenge à Madie. Déjà, elle a appris tous les morceaux en un temps record. Puis on s’est dit que si elle passait l’épreuve du concert, alors ça le ferait. En plus, on l'a fait dans des conditions dantesques, on a joué sous un orage avec la pluie qui tombait sur la scène, on avait peur de prendre un court-jus (rires).

Et toi Madie, est-ce que tu te rappelles l’instant où NIGHTMARE t’a proposé de devenir leur chanteuse ?
Madie :
Oui comme si c’était hier, d’ailleurs c’était il n’y a pas si longtemps. Je rentrais du boulot vers 20h00, j'étais devant mon garage et je vois un coup de fil de Niels le batteur. Je le connaissais un peu car je travaillais à l’Ampérage de Grenoble, et puis il nous avait vu jouer plusieurs fois. Il m’a dit « je ne vais pas y aller par quatre chemins, Magali nous a planté et on a besoin d’une chanteuse, on a pensé à toi ? ». J’ai alors calé avec ma voiture et j’ai dû même enfoncer un bout de ma porte de garage (rires). Je lui ai demandé quel était le délai, et il m’a dit le plus tôt possible. J’ai alors contacté tous mes proches qui m’ont demandé « pourquoi tu es encore au téléphone, dis oui ! ». Pour moi c’était un gros challenge, à la suite d’une opération j’avais un mois de convalescence et je ne pouvais ni chanter, ni bouger... j’ai appris « Dead Sun » en deux mois à peine. Sans oublier tous les tests audios, on a fait des démos que nous avons fait écouter à tout le groupe et à la maison de disques. Le baptême du feu sur scène a été pour le Panic Fest, c’était top ! J’ai aussi été bien accueillie par le public, c’était quelque chose que je craignais car, que ce soit Maggy ou Jo, ce sont de sacrées pointures en terme vocal et scénique.

Votre nouvel album « Aeternam »​ est sorti le 2 octobre et vous avez entre temps sorti deux singles, est-ce que les premiers retours ont été à la hauteur de vos attentes ?
Yves : Sur ces deux singles quand on regarde les commentaires YouTube, on a de supers retours de tous les pays, et aussi de supers retours médias. Tous les voyants sont au vert.
Madie : Chaque nouveau chanteur ou guitariste va apporter une nouvelle identité. On a le droit de ne pas aimer, cela ne signifie pas qu’on veut forcement rester dans ses codes et je le respecte totalement. D’ailleurs Jo Amore a répondu à beaucoup de ces commentaires négatifs, ceux affirmant que ce n’était plus le NIGHTMARE d’avant, en disant justement que c’était une nouvelle identité. Je l’ai bien évidement remercié pour sa bienveillance.

Madie, par rapport à tes précédents projets est-ce que cet album t’a demandé un travail particulier sur ta technique de chant ?
Madie :
Particulier non, mais une nouveauté oui. Je suis autodidacte, donc cela sort comme cela vient. Ça ne sera plus le cas prochainement, car je vais devoir faire un entrainement intensif pour que je puisse garder ma voix sur des grosses tournées. Globalement, le heavy ne m’a pas donné beaucoup de travail. J’ai été guidé admirablement par Yves, qui maîtrise les mélodies et ce qui est attendu dans le style. Au départ, j’étais un peu récalcitrante. Car j’ai toujours eu une grande liberté dans tous les groupes que j’ai pu avoir, et là c’était moins le cas.



​Est-ce qu’il y a une chanson qui t’a donné plus de mal que les autres ?
Madie : Oui, "Black September", car justement elle est power-metal à 100%. Et je fonctionne à l’affecte, dès que j’aime un morceau je peux le reproduire à l’identique. Mais ce titre est celui que j’apprécie le moins de tout l’album... même si je sais que les fans de NEVERMORE l’apprécieront.

Je te pose la même question Yves ?
Yves : C’est compliqué à dire. En ce qui concerne le peaufinage de texte et sur lequel j’ai passé des nuits blanches, je dirais "The Passenger". On a fait un travail très riche, on y ajoutant des choeurs et en couplant des voix. Pour moi, c’est l’un des morceaux les plus aboutis dans l’histoire de NIGHTMARE en termes de construction. Le refrain est différent des autres, c’est super mélodique et ultra catchy. Si j’avais eu à choisir c'est cette chanson que j'aurais prise tout de suite pour un clip ! Mais cela aurait été compliqué à cause du thème qui traite d’Alien, il aurait fallu trouver un vaisseau spatial (rires).

Une double question. Y a -t-il un fil conducteur tout au long de l’album ? Et en quoi cette pochette va mettre en valeur ces dix morceaux ?
Madie : Non il n’y en a pas, en revanche il y a un thème général qui est la possession. Par rapport à la pochette, j’avais réfléchi au concept de l’album sans que celui-ci soit justement un concept. Globalement, je voulais faire honneur à toute la carrière de NIGHTMARE, ainsi qu’à la culture des années 80 et 90. On a mixé toutes les facettes de l’horreur de ces périodes, donc tous les slashers comme Jason ou Freddy, sans oublier The Thing, Alien, l’Exorciste, etc... Chaque morceau va représenter un de ces "héros". On a voulu garder le sujet féminin, qui était déjà présent sur « Dead Sun », pour maintenir l’idée de la féminité dans le groupe. On a beaucoup travaillé avec Mickey de Mythrid Art, qui a était absolument fabuleux en termes de créativité et de réactivité. On voulait quelque chose d’un peu ésotérique, avec cette femme qui est en croix mais pas crucifiée, qui est repliée sur elle-même, et les serpents qui apportent ce côté "emprisonnement". Cela reflète pour moi cette folie et cette décompensation que l’on veut faire passer dans tous les titres.

Yves, nous t’avons vu récemment dans un nouveau groupe qui se nomme ARCHON ANGEL avec notamment le chanteur Zak Stevens (ex-SAVATAGE), c’est assez inédit que tu aies un groupe en parallèle de NIGTHMARE ?
Yves : La musique c’est qu’une histoire de rencontres qui fonctionnent. Je suis très pote depuis des années avec Aldo Lonobile, le guitariste et principal compositeur de SECRET SPHERE. Il est aussi producteur chez Frontiers S.R.L. et bookeur, tous les deux ont fait plutôt du business. Mais on partage aussi les mêmes goûts. Nous avons les mêmes albums de chevet, et notamment nous sommes de gros fans de SAVATAGE. Quand tu vois tous les groupes qu’il produit et tout ce qu’il a fait, c’est quelqu’un qui pourrait avoir la grosse tête, mais il reste modeste et simple, un gars adorable. Et un jour il m’appelle, un vendredi après-midi, et il me fait « j’ai un truc pour toi, tu vas halluciner ». Il m’avait déjà dit auparavant qu’il était sur un projet qui pouvait m’intéresser. Lui il habite à Alexandrie au sud-est de Turin, c’est à 300Km de Grenoble. C’est véridique, il me dit « demain soir tu te débrouilles, il faut que tu sois à Alexandrie à 18h00, sinon tu vas le regretter toute ta vie » et rien de plus (rires). Connaissant le bonhomme je sais qu’il côtoie beaucoup de musiciens, car Frontiers ce sont des spécialistes pour monter des groupes de toutes pièces, je me suis dit qu’il fallait y aller. Sur place je me suis retrouvé dans un resto super sympa avec le big boss de la maison de disques, Serafino Perugino. Et Aldo me dit qu’il a un super truc à m’annoncer à propos de SAVATAGE, à savoir qu’il sort le nouveau groupe du chanteur. Moi je lui dis « génial, on va pouvoir les booker en France, on peut les signer chez METALLIAN Productions ». Il rigole et il me dit « non, tu joues comme musicien officiel dans ce groupe, tu as quatre jours pour envoyer le contrat ! ». On a fait un premier concert au 70 000 Tons Of Metal. La veille on a fait une répétition, ce sont des gars ultra carrés, tu n’as pas intérêt à faire des pains (rires). Alors oui, forcement, c’est un truc génial car je joue avec une de mes idoles et j’adore ce qu’il fait. Mais NIGHTMARE c’est une vie et une histoire de cœur, donc ce n’est pas la même implication. Cela reste un projet compliqué à faire jouer, car Zak demande beaucoup d’argent et il vit aux Etats-Unis, Aldo est lui aussi très occupé. NIGHTMARE a plus de concerts à l’avenir et cela reste ma priorité. Même si j’aimerais bien refaire un ou deux concerts avec ARCHON ANGEL.

NIGHTMARE a fêté ses 40 ans d’existence l’année dernière, avez-vous songé à célébrer cet anniversaire ?
Yves : C’était compliqué. J’aurais aimé faire quelque chose comme SABATON, à un autre degré bien sûr. Lorsqu’ils ont joué au Wacken Open Air 2019, ils étaient sur les deux mainstages avec l’ancien et le nouveau line-up pour ensuite les croiser, c’est un truc de fou ! Cela aurait été cool de faire un événement dans le même style, un show de NIGHTMARE avec les nouveaux et les anciens membres. Après, nous sommes partis sur une autre identité avec de nouvelles personnes et on adore ça. Même si c’est toujours un recommencement et un combat pour aller chercher le "Graal", l’important est que cela fonctionne.
 


Sans transition, comment avez-vous vécu le confinement artistiquement parlant, a-t-il été fructueux ou bloquant ?
Madie : A titre personnel cela a été un tremplin vers plein de créations. On en a profité pour acheter un home-studio, du matériel vidéo et photo, on a été présent sur les réseaux aussi. Sans oublier que nous avons enregistré l’album ; on se baladait avec masques et attestations pour aller au studio. Avec malgré tout cette appréhension du virus et toutes les interdictions.

Cette période de confinement n’a pas été bénéfique pour le monde du spectacle en général, et c’est toujours le cas aujourd’hui. Etes-vous néanmoins optimistes pour l’avenir ?
Yves : On espère que ça reprendra d’ici avril ou mai 2021. Sinon il n’y aura pas de Hellfest ou d'autres festivals. Cela risque d’être dramatique, il va y avoir des sociétés qui ne tiendront pas, comment ça va se passer pour les intermittents ? J’ai peur mais ce n’est pas en étant pessimiste qu’on avance. On va croire que tous les concerts prévus seront maintenus, et pourquoi pas qu’il y aura un vaccin en janvier.
Madie : Il faut y croire et avancer, et ne pas rester statique afin d’être prêt le moment venu.

Je vous laisse conclure ce moment pour vos fans et les lecteurs de HARD FORCE ?
Madie : A tous les artistes, on va s’en sortir ! Soyez patients. On est tous dans la même galère, et il faut plutôt se serrer les coudes. Il faut que cela reparte dans une franche camaraderie, sans aucune confrontation ou rivalité.
Yves : Pour les lecteurs de HARD FORCE, continuez à soutenir la presse et surtout les vieux noms qui sont présents depuis des années. C’est vital, et HARD FORCE en fait partie.
 

Blogger : Jérôme Graëffly
Au sujet de l'auteur
Jérôme Graëffly
Nourri dès son plus jeune âge de presse musicale, dont l’incontournable HARD FORCE, le fabuleux destin de Jérôme a voulu qu’un jour son chemin croise celui de l'équipe du célèbre magazine. Après une expérience dans un précédent webzine, et toujours plus avide de nouveautés, lorsqu’on lui propose d’intégrer l’équipe en 2011, sa réponse ne se fait pas attendre. Depuis, le monde impitoyable des bloggers n’a plus aucun secret pour lui, ni les 50 nuances de metal.
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