Qu’est-ce qui nous fait tendre l’oreille sur une chanson plus qu’une autre ? Comment se fait-il que nous ayons un coup de cœur pour tel groupe et non tel autre ? Dans la profusion de nouvelle création musicales qui débordent de nos enceintes chaque jour, qu’allons-nous retenir, et pourquoi ? La musique ne fait pas appel à l’intellect mais à l’instinct, alors inutile de chercher à rationnaliser. Certains vont s’attacher à un riff de guitare bien gras et distordu, d’autres vont préférer une ligne de basse gorgée de groove, ou bien des plans de batterie particulièrement complexes, et d’autres encore vont se pâmer devant des ambiances dark, speed ou bien planantes.
De par la nature même de mon métier, j’ai de tout temps été attirée par la voix. Les voix. Puissantes, douces, sensuelles, graves, rocailleuses ou cristallines. Chacune possède sa propre personnalité et véhicule son lot d’émotions. Chacune évoque un paysage, un tableau, un tempérament, un caractère bien à elle. Chaque voix est unique. Celle du Norvégien Terje Harøy, l’excellent chanteur de PYRAMAZE, a réussi à atteindre mon centre émotionnel en moins de temps qu’il n’en faut pour prononcer le nom du groupe. Et nous voilà partis pour une nouvelle découverte.
Danois d’origine, la particularité de PYRAMAZE est qu’il a eu deux vies. Une première à ses débuts en 2001 jusqu’ en 2011 avec deux chanteurs différents, Lance King et Matt Barlow (ICED EARTH), qui ont quitté le groupe pour différents projets. Et la seconde depuis 2015 avec l’arrivée du producteur Jacob Hansen (guitare, basse) en remplacement du créateur, guitariste et principal compositeur du groupe, Michael Kammeyer, parti en même temps que le bassiste Niels Kvist, pour raisons personnelles. Suite au recrutement de Terje Harøy, PYRAMAZE va revenir sur le devant de la scène avec « Disciples Of The Sun » (2015), « Contingent » (2017) et « Epitaph » sorti depuis peu.
Après une entrée en matière toute en douceur avec le titre éponyme, instrumental qui égrène ses notes de piano subtiles et aériennes, on rentre dans le vif du sujet avec le deuxième morceau, "A Stroke Of Magic". Epique serait le qualificatif le mieux approprié pour décrire la musique de PYRAMAZE. Naviguant entre power metal, prog et metal symphonique, le groupe propose un album très cohérent de bout en bout, porté par des refrains accrocheurs, de superbes mélodies, des nappes de claviers, des riffs syncopés et travaillés, des accélérations bien dosées à la double grosse caisse, et une touche pop particulièrement savoureuse (c’est notamment le cas sur "Your Last Call", dont le refrain fait penser au "Running Up That Hill" de Kate Bush). Bien que l’album dure près de 62 minutes, on ne les sent pas passer, tant les titres s’enchaînent merveilleusement bien, dans une belle fluidité. Rien n’est à jeter. Mentions particulières, toutefois, pour "Knights In Shining Armour", "Steal My Crown", "Particle", "Transcendence" en duo avec Brittney Slayes (UNLEASH THE ARCHERS), dont la voix s’accorde superbement à celle de Terje, et "World Foregone" avec son magnifique refrain, repris par un chœur d’enfants sur la fin de la chanson. L’album se termine sur "The Time Traveller" qui voit se rejoindre les trois chanteurs du groupe, avec les participations de Lance King et Matt Barlow. Un pont entre le passé et le présent et un titre tout en puissance, tout à la fois heavy, progressif et symphonique. Une bonne claque pour refermer l’album. La production parfaite, assurée par Jacob Hansen, est efficace, accrocheuse et moderne. Elle met en avant chaque instrument au moment voulu et permet à la voix du vocaliste de donner toute la puissance, la fragilité et l’émotion qu’elle contient.
« Epitaph » est un album superbe, qui se découvre un peu plus à chaque nouvelle écoute et nous embarque dans un voyage tout en nuances, entre brume et couleurs vives, tempêtes et accalmies. Un album que l’on se plairait à entendre en live dans une salle de concert, où tout le public chanterait les refrains en chœur. (Ah si seulement...) Mais en attendant une hypothétique réouverture des salles de spectacle, rien ne nous empêche de repasser cet album en boucle, en fermant les yeux et en imaginant voguer sur les eaux tumultueuses des sensations. PYRAMAZE est un groupe qui possède toutes les qualités pour se démarquer des autres, et c’est tout le mal qu’on lui souhaite.