28 juin 2021, 19:41

FEAR FACTORY

Interview Dino Cazares

Blogger : Clément
par Clément

Dino Cazares a la peau dure... et cela fait plus de trente ans que ça dure ! Celui qui a amené FEAR FACTORY au plus haut niveau avec son ex-fidèle compagnon Burton C Bell n’est jamais avare de son temps lorsqu’il s’agit de défendre un nouvel album. Il faut dire que le guitariste a traversé vents et marées depuis près de trois ans contre les anciens membres du groupe dans un combat juridique au sujet de la propriété du nom FEAR FACTORY. Le dossier enfin classé, Dino reprend depuis la main sur le futur du groupe en compagnie de Mike Heller derrière les fûts et Tony Campos à la basse. Il revient pour HARD FORCE sur ces derniers mois ainsi que sur l’actualité de FEAR FACTORY...


Comment tu as vécu cette période compliquée liée à la pandémie de COVID 19 ?
Pour tout te dire, je n’ai pas vu le temps passer puisque j’étais bien occupé à travailler sur les compositions de « Aggression Continuum ». Cela m’a demandé beaucoup d’énergie tant sur la composition que pour la coordination entre les nombreuses personnes qui ont participé à l’enregistrement. Comme tu le sais, en parallèle j’ai aussi passé beaucoup de temps dans cette guerre juridique qui m’opposait aux anciens membres du groupe, puis l’année dernière à Burton C Bell sur le rachat de sa part concernant la propriété du nom FEAR FACTORY. Cela n’a pas été de tout repos et psychologiquement, c’était une expérience éprouvante.
J’ai aussi profité de cette période pour m’atteler à un projet qui me taraudait depuis très longtemps : proposer une version vinyle digne de ce nom à « Demanufacture » pour le marché nord-américain notamment. Cette version triple-vinyle a été agrémentée d’un disque bonus qui comprend un live capté pendant le Ozzfest, en 1996. Ensuite, je me suis lancé dans un projet de ré-enregistrement des parties de batterie de l’album « The Industrialist » qui avait été effectuées en 2012 avec une boîte à rythmes. L’apport d’un vrai batteur confère un vrai plus à ce disque. Pour finir, j’ai pas mal bossé avec mon autre groupe ASESINO (NDLR : trio composé de Emilio Marquez et Tony Campos qui œuvre dans un death metal débridé). Le nouvel album est presque terminé et je peux te garantir que le résultat final va en laisser plus d’un sur les rotules (rires).

En effet, c’est ce que l’on appelle une année bien remplie. Concernant la promotion de ce nouvel album, cela ne te semble-t-il pas étrange de promouvoir un album sur lequel Burton a enregistré ses parties de chant... avant de quitter le groupe dans la foulée ?
Non, cela ne me pose aucun problème. Tu sais, j’ai déjà fait un paquet d’interviews depuis le début d’année ou j'assure la promotion de l’album alors que celui-ci était déjà en boîte avec les parties de Burton dessus. Je l’envisage plus comme un témoignage de ce que FEAR FACTORY était en tant que groupe à part entière il y a encore quelque mois. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, je cherche désormais un remplaçant à Burton et FEAR FACTORY continuera d’aller de l’avant. C’est en fait aussi simple que cela...

Cela a le mérite d’être clair. Ce nouvel album est dans la droite lignée de « Genexus », notamment dans ses aspects les plus mélodiques mais aussi pour l’utilisation plus prononcée des claviers...
Merci, c’était exactement l’effet voulu (rires). Cet album s’inscrit dans la continuité de ce que nous avons initié sur « Genexus » : aucun doute là-dessus !

Au sujet de la production de « Aggression Continuum », Damien Rainaud a une nouvelle fois abattu un sacré boulot derrière la console...
Oui, Damien connaît bien nos habitudes puisqu’il était déjà à la manœuvre avec Rhys Fulber sur l’album précédent. Il a eu un rôle important également pour « The Industrialist » puisqu’il s’est occupé des claviers mais aussi de l’enregistrement de la boîte à rythmes. Et comme tu l’indiques, sur ce nouvel album il a encore pris une place de premier ordre puisqu’il était responsable de la production. C’est ensuite Andy Sneap qui a pris le relai sur le mixage et le mastering. Le tout sonne à merveille !


​Peut-on dire que « Aggression Continuum » est l’album le plus mélodique enregistré jusque-là par FEAR FACTORY ?
Je ne sais pas si c’est le plus mélodique car certains des morceaux que nous avons enregistrés font partie des plus brutaux que nous avons composés jusqu’ici. En revanche, je suis plus à l’aise pour te dire que c’est certainement l’album sur lequel les claviers sont les plus présents. Ces derniers sont l’une de nos marques de fabrique et ils prennent de plus en plus de place dans notre musique. Plusieurs musiciens ont aussi joué des parties de claviers différentes sur l’album, cela apporte des tonalités différentes sur chaque morceau. Igor Khoroshev, ancien clavier de YES, a enregistré "Recall" par exemple où il a fait un job fabuleux ! Sur "Collapse" ou "Aggression Continuum", il apporte sa patte, très progressive. D’autres parties ont été jouées par Giuseppe Bassi et Max Kajon qui viennent eux aussi d’univers musicaux différents, cela apporte un véritable plus à « Aggression Continuum ». J’en suis ravi d’ailleurs...

Les textes démontrent toujours ton obsession pour les machines, l’intelligence artificielle... Qu’est-ce qui te fascines encore dans ces sujets-là ?
En fait, la technologie joue un rôle tellement important dans nos vies de tous les jours qu’il m’est impossible de ne pas y puiser de l’inspiration pour FEAR FACTORY. Aujourd’hui nous sommes en train de discuter sur une application de chat vidéo, avec un smartphone ou un PC et cela nous paraît normal parce que cela fait partie intégrante de notre quotidien. C’était impensable que cela soit si démocratisé il y a encore dix ans ! Les choses changent vite, elles deviennent rapidement obsolètes sans que nous ayons le temps de nous en rendre compte. La pandémie a bouleversé nos comportements et conduit de nombreuses entreprises à proposer du télétravail, à équiper leurs salariés avec des ordinateurs portables, à renforcer leur sécurité informatique au quotidien. S’adapter est la clé de la réussite et il ne faut pas attendre que la technologie soit dépassée pour s’en emparer. S’il est trop tard, le retard devient encore plus dur à rattraper...

En ce qui concerne l'artwork, vous travaillez avec Francesco Artusato. Je trouve encore une fois ses travaux très proches de ceux qu'Anthony Clarkson a proposé sur vos précédents albums. Ne pensez-vous pas que changer d'illustrateur aurait pu apporter un regard différent sur l'œuvre au lieu de continuer dans la même lignée ?
A mon sens, Francesco s’est réapproprié les codes des artworks précédents pour en proposer une relecture très personnelle. Si tu as encore la pochette de « The Industrialist » en tête, c’était la tête qui apparaissait, puis sur « Genexus » c’est le torse et ici, c’est le corps dans son intégralité. Chacune de ces pochettes fait partie intégrante d’une trilogie qui est complétée avec « Aggression Continuum ». J’aimerais aussi attirer l’attention sur plusieurs détails qui prennent sens lorsque tu regardes cela de plus près. Sur le côté droit, il y a un numéro de série, c’est le jour où FEAR FACTORY a pris forme, le 31 octobre 1990 : un chiffre qui symbolise le passé. Le présent est lui mis à l’honneur avec le "X" qui se forme sur cette pochette puisqu’il s’agit de notre dixième album. Enfin, le futur est décrit dans le "Continuum" du titre qui indique qu’il ne s’agit ici que d’une étape et que le groupe n’est pas prêt de se mettre en pause !

FEAR FACTORY est considéré comme le créateur du courant "cyber metal" avec « Demanufacture ». Vous avez également été l'un des premiers groupes à inclure des voix claires dans le death metal avec « Soul Of a New Machine »...
Oui et je suis fier du parcours de FEAR FACTORY. Pas de fierté mal placée, juste heureux de constater que FEAR FACTORY soit toujours considéré comme le créateur d’un genre à part entière dans lequel un paquet de jeunes loups se sont engouffrés depuis la sortie de cet album. Nous avons proposé dès les débuts du groupe un son qui était immédiatement reconnaissable, une signature que tu ne retrouves nulle part ailleurs !
 

"Nous ne lâcherons rien et nous continuerons à faire de la musique avec FEAR FACTORY !"


Vous avez décidé de donner vie à FEAR FACTORY avec Raymond Herrera il y a plus de trente ans. Quel était votre état d'esprit à ce moment-là ?
Oui et je m’en souviens comme si c’était hier ! Je jouais alors du grindcore dans un groupe qui s’appelait EXCRUCIATING TERROR. En 1990, j’ai décidé de partir sur autre chose avec Raymond qui m’a fait découvrir les joies de la double pédale (rires) : quel son ! Je ne me suis même pas posé de question, j’ai décidé de foncer et au vu de ce qui s’est passé depuis, je pense avoir pris la bonne décision !

Je suis retombé sur un ancien exemplaire de HARD FORCE dans lequel Max Cavalera déclarait au sujet de « Soul Of A New Machine » qu'il avait vu « l'avenir du death metal et que son nom était FEAR FACTORY ». Que dirait-il aujourd'hui, trente ans plus tard, au sujet de « Aggression Continuum » ?
Et bien je pense que Max dirait tout simplement : « Vous voyez, hein, j’avais bien raison » ! Il est vrai que nous nous sommes éloignés du death metal pur et dur depuis mais cela ne remet en rien cette phrase qui à l’époque prenait tout son sens...

Revenons à l’actualité, avez-vous prévu de tourner prochainement ?
Non, malheureusement nous n’avons rien d’organisé avant le mois de mars de l’année prochaine. Si tu savais pourtant comme je meurs d'envie de revenir sur les planches défendre ce nouvel album... mais le contexte actuel reste encore tendu avec beaucoup d’incertitudes.

En parlant de tournées, le groupe est passé à de nombreuses reprises ici en France, gardes-tu un souvenir particulier de l’un de ces concerts ?
Oui, nous avons toujours conservé une place à part pour la France mais la tournée qui m’a le plus marqué chez vous est celle que nous avons faite pour « Demanufacture » en 1996. Celle-ci était incroyable, elle comportait notamment plusieurs dates dans de plus petites villes avec un public déchaîné. Nice est à ce sujet ma ville française préférée : les paysages, la mer, le soleil et surtout... les baguettes ! Vous faites du pain comme personne d’autre au monde (rires).

Merci Dino, à bientôt et je te laisse conclure cet échange...
Merci Clément et merci à tous nos fans qui nous suivent depuis trente ans et continuent à nous suivre encore aujourd’hui. Nous ne lâcherons rien et nous continuerons à faire de la musique avec FEAR FACTORY tant que nous le pourrons. Au revoir !
 

Blogger : Clément
Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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