23 décembre 2012, 7:31

CULT OF LUNA : Johannes Persson

 

 
"Vertikal" est le nom du nouvel album de CULT OF LUNA qui paraîtra le 25 janvier prochain en Europe, 5 ans après son prédécesseur "Eternal Kingdom", qui s'est avéré être une véritable bombe à retardement alors qu'un beau jour le groupe annonça que toute l'histoire qu'il avait raconté à son sujet dans la presse...était fausse !
 
Pour tout vous dire, je ne savais pas trop quoi attendre de cet entretien avec la tête pensante du groupe Johannes Persson, personnage connu pour ses opinions tranchées, notamment en matière de journalisme musical, beaucoup trop docile à son goût. Avec "Vertikal" le groupe suédois plante encore une fois un tout nouveau décor, et dépeint un paysage futuriste et industriel, inspiré par le mouvement Art déco, ainsi que l'ère de l’expressionnisme allemand.
Nous avons rendez-vous sur Skype avec le bonhomme, le jour de l'apocalypse (ça ne s'invente pas)... 
 
 
5 ans que les fans de CULT OF LUNA attendent un nouvel album, toutes ces années ont-elles été consacrées uniquement à "Vertikal" ?
Nous avons tourné pendant 1 an après la sortie d'"Eternal Kingdom", étendu sur une période de 18 mois, après cela nous avons réalisé qu'il s'agissait de notre cinquième album en moins de 10 ans, et c'est une cadence extrêmement rapide ! C'était quasiment impossible de continuer ainsi tout en parvenant à garder un même niveau de qualité. De plus, c'est moitié ennuyeux de s'obliger à écrire un album tous les 2 ans, c'est pourquoi nous avons décidé de nous octroyer quelques années de repos. Ça nous a fait du bien de penser un petit peu à autre chose que notre groupe, faire des choses différentes...
 
"Vertikal" a donc été le fruit de combien de temps de travail ? 
Ça nous a pris 3 ans, mais pas à temps plein. C'est le processus qui nous a pris 3 ans, si tu vois ce que je veux dire...

 

 

"I: The Weapon" premier extrait du nouvel album de CULT OF LUNA "Vertikal"
 
Les textures que l'on perçoit au travers de l'écoute de ce nouvel album sont très particulières : froides, metalliques, répétitives... Si on le compare à vos albums précédents, irais-tu jusqu'à parler d'un changement d'orientation musicale ? 
Oui. Quand nous nous sommes dit que nous avions attendu trop longtemps et qu'il fallait que nous nous remettions au travail, nous avons dressé le constat de notre chemin parcouru jusqu'ici, et ce avant d'avoir composé la moindre note de ce nouveau disque : "Où sommes nous allés ? En terme de musique et de thématique. Où sommes nous maintenant ? Et vers où souhaitons-nous aller ?". C'est ainsi que nous avons réalisé que pour nos deux derniers albums, "Somewhere Along The Highway" (2006) et "Eternal Kingdom" (2008), nous nous étions aventurés dans la forêt, la campagne... La musique avait été très inspirée par la flore du nord de la Suède, où nous avons grandi. Ce après quoi nous nous sommes dit qu'il fallait que nous retournions dans la ville, faire un pas dans le futur... AAAH FUCK ! (Vacarme) Bon, je te présente mon chat ! (Éclat de rire général) Il vient de tout démonter chez moi !
 
Je suis vraiment désolé pour toi ! (Rires)
Donc qu'est-ce qu'une ville, de quoi est-elle composée ? De présence humaine, mais là encore, qu'est ce que c'est ? Des lignes droites, c'est non-organique, des structures métalliques, des usines, des répétitions, des sons monotones, parfois agressifs... Nous étions très inspirés par l'ère de l’expressionnisme allemand, le futurisme des années 20 qui avait de grands espoirs en matière de machinerie, le Fordisme (ndlr : modèle de production aujourd'hui connu sous le nom de travail à la chaîne), l'Art déco également... Nous nous échangions chacun nos idées et tout cela a terminé par devenir une sorte de manifeste. L'inspiration nous venait également de photographies, et il s'est avéré qu'une bonne partie des images que nous nous envoyions provenaient de la même source, le film "Metropolis" de Fritz Lang. Cette oeuvre a été une grande inspiration en ce qui concerne l'aspect visuel que nous recherchions. En revanche, l'idée que les gens se font de cet album étant une thématique du film est totalement fausse, il a seulement été inspiré par cette imagerie.
 
Ce n'est pas un album conceptuel... 
Non, pas dans ce sens, absolument pas.
 
 
 
Vous avez déclaré ne pas avoir voulu sur-compliquer le processus d'écriture de cet album, pouvons-nous dire que vous avez gagné en spontanéité ? 
Oh non. J'ai dit ça ? (Sceptique)
 
Oui, c'est extrait d'un communiqué de presse...  
Non, enfin si, euh... Sur-compliquer... Ça dépend de ce qui se cache derrière les mots vraiment. (Rires) Nous avons été extrêmement directs dans notre approche, tout ce que nous avons fait a été filtré au travers du manifeste que nous avions écrit, ça allait sonner brut, répétitif. Nous avons travaillé avec de gros effets de guitare... Par exemple nous avons aussi enregistré la batterie sans les cymbales, elles ont été incluses à part, les guitares ont été enregistrées en downpicking (ndlr : mouvement du médiator de haut en bas, sans retour) de façon a être raccord avec cette ambiance d'usine que nous voulions instaurer, le jeu devait être non-organique. Dans la limite du possible, tout a été enregistré en concordance avec ce manifeste.
 
Ça me rappelle un petit peu ce nouvel album de FEAR FACTORY "The Industrialist", je ne sais pas si tu l'as écouté... 
Non !
 
La thématique de ce groupe ressemble en plusieurs points à celle de "Vertikal", notamment sur ce dernier album qui a été enregistré avec une batterie électronique, de ce fait le trait du côté industriel et mécanique est beaucoup plus grossis... 
Sur une chanson, après l'enregistrement de la batterie, nous avons senti qu'il nous manquait quelque chose de différent. Nous l'avons donc ré-enregistré mais avec des sons que nous avions créé nous même, en entrechoquant des objets métalliques... Un exemple parmi tant d'autres... En revanche, ne fais pas de comparaison entre la musique industrielle et le terme "industriel" dont nous sommes en train de parler...
 
Je ne parlais pas de metal industriel, ce n'est pas la même chose ! 
Je dis ça parce que beaucoup de personnes essayent de lier tout cela à la musique industrielle, juste parce que l'on parle d'usines... Ce sont en effet deux choses aux antipodes les unes des autres !
 
Les raisons qui vous ont poussé à vous inspirer du film "Metropolis" peuvent-elles êtres vues au travers de son scénario sombre dans lequel les classes sociales vivent séparées les unes des autres ? 
Oui ! La plupart des paroles sont basées sur le scepticisme. Le problème avec les travailleurs du film quand ils se rebellent, c'est qu'ils mettent leur espoir dans les mains d'une seule personne. Ils croient aveuglément en le leader de cette rébellion, la femme (ndlr : Maria), et quand le dictateur de la ville Joh Fredersen la change en robot, ils continuent de la suivre sans se poser de question. Seulement que se passe-t-il ensuite ? Ils détruisent la ville entière. Je dirais que c'est également un appel à ceux qui se rebellent dans le monde, sachez vraiment qui est celui que vous écoutez. Laissez le meilleur discours gagner, non pas l'extrait que vous préférez le plus, ce sont deux choses différentes. Et je pense que c'est un problème en Suède, en Europe, dans le monde entier... Lorsque les gens aiment une personne, ils aiment son bagage d'opinion avec. Ils savent ce qu'ils pensent avant même d'entendre la conversation. Je pense que c'est quelque chose que les gens doivent se rentrer dans le crane.

 

Image extraite du film "Metropolis" de Fritz Lang

 

Et nous voilà, à faire une interview le jour de la présumée fin du monde... 
Apparemment ouais !

Connaissant ton avis sur ces personnes influençables, ça doit te rendre dingue tout ça ! 
C'était encore plus fou il y a quelques années. Mais maintenant au fur et à mesure que la date s'approchait, les gens ont perdu toute crédibilité, ils savaient au fond d'eux que c'était des conneries. (Rires) Je vais te raconter une histoire : j'ai eu cette conversation avec une fille durant l'été 2011, il y a pratiquement 1 an et demi de ça, et elle m'a raconté qu'elle ne croyait pas, mais qu'elle était persuadée à 100% qu'en 2012 une grosse partie de l'humanité allait se transformer en aliens. Je lui ai répondu que... Ah oui parce que nous sommes également devenus amis sur Facebook pour des raisons étranges (Rires)... Donc je lui ai dit que le jour du 1er janvier 2013, j'allais lui envoyer un message pour lui dire qu'elle avait tort, et que j'avais raison, qu'elle allait avoir une explication parfaitement logique sur la raison pour laquelle pourquoi rien ne s'est passé. Je te laisse imaginer la grande impatience qui m'habite à l'idée d'arriver à ce jour ! Elle aura l'explication la plus simple et sensée du pourquoi du comment ça n'est pas arrivé, mais que ça va se passer dans le futur !
 
Hum... (Rires)
Non je déconne. (Un bébé crie au loin) Ouais, voilà ça c'était ma fille qui disait que cette fille raconte de la merde. (Éclat de rire général) C'est évident que c'est n'importe quoi. Beaucoup de gens croient en ces conneries de conspiration ou je ne sais quoi, le film "Zeitgeist: The Movie" a empoisonné l'esprit d'un grand nombre de personnes, les putains d'illuminati, histoire qui est en réalité née sur fond d'antisémitisme... Je pense que les gens doivent avoir l'esprit ouvert, mais pas au point d'en perdre la raison, et c'est le cas pour beaucoup de personnes. Foutez le film "Zeitgeist" à la poubelle, où il demeure, et commencez à penser par vous même. Lisez Carl Sagan, Richard Dawkins, Daniel Dennett... (Il réfléchit) Aaah il y en a tellement que je voudrais que les gens lisent ! (Rires) Il y a une différence entre causalité et conséquence, et elle est considérable. Les gens ne comprennent pas ça, et sont des victimes très faciles pour des films comme "Zeigest".
 
Au fond c'est marrant que tu racontes ça parce que tu joues tout de même dans un groupe qui comporte le mot "Secte" dans son nom (ndlr : "Cult" en anglais)... 
Notre nom renferme tellement d'histoires différentes... Mais il a débuté par cette idée d'un collectif qui ne meurt jamais, c'est plus un "groupe", qu'un groupe de personnes. Nous avons eu beaucoup de membres, aussi bien gagnés que perdus au fil des années. Par exemple sur cet album, et c'est assez important pour le noter, Klas (ndlr : Rydberg) ne fait plus partie du groupe, ce qui fut un assez gros changement pour nous. Il était l'unique vocaliste de nos premiers disques, avant que je ne prenne sa place petit à petit, et maintenant je suis seul à chanter les parties criées. CULT OF LUNA est plus grand que ses membres, c'est une idée. C'est ça que nous voulions instiguer avec ce nom.
 
C'est assez éloigné de votre style, mais c'est un concept que le groupe KISS défend également...
Oui, et je crois que c'est une bonne idée ! Pour moi CULT OF LUNA ne mourra jamais...
 
Tu vois quelqu'un prendre ta place, après ta retraite ? 
Je ne me vois pas partir en retraite, donc... (Rires)
 
 
 
CULT OF LUNA c'est un vrai package, il y a la musique, les concerts, et je dois te dire avoir été très intrigué par les visuels que nous avons reçu avec ce disque. Avez-vous décidé de travailler avec un artiste particulier ? 
Oui nous avons travaillé avec le frère d'Erik (ndlr : Olofsson, guitariste). Nous savions exactement ce que nous voulions faire, d'où est-ce que nous voulions puiser notre inspiration comme je l'ai déjà dit. Il nous a proposé quelques idées, qui nous ont toutes plu, je crois qu'il a tapé dans le mille.
 
La pochette également ? 
Non ça pour le coup c'est Erik !
 
Artwork de "Vertikal"


 

Pouvons-nous envisager retrouver l'imagerie de "Vertikal" en tournée, au travers de structures érigées sur scène peut-être ? Bon peut-être pas un bâtiment complet mais bon ! (Rires) 

On verra ! (Sourire téléphonique)
 
C'est un secret ? 
Non en toute honnêteté je ne suis pas sûr ! (Rires)
 
Il y a cette chanson sur l'album, "Vicarious Redemption", qui dure près de 20 minutes. Vous arrive-t-il de vous limiter sur scène à cause de certains titres qui sont trop longs ? 
Nous n'élaborons pas nos concerts en terme de chansons, mais de minutes. Mais pourquoi le ferions-nous ? C'est une de nos chansons après tout...
 
Vous tournerez avec le groupe ABRAHAM en début d'année, en France notamment, est-ce comme par habitude un groupe que vous avez choisi ? 
Il me semble que ce sont des amis de Magnus (ndlr : Lindberg, batteur), il a travaillé sur leur album, si mes souvenirs sont bons il l'a même mixé. Je ne les connais pas personnellement, mais j'ai écouté leur album et j'aime beaucoup. J'ai vraiment hâte de jouer avec eux, et spécialement en France, je pense que leur genre va plaire au public français, c'est une concordance parfaite.
 
Pourquoi spécialement en France ?
Je ne sais pas ! (Rires) Honnêtement, je n'ai aucune idée de la raison pour laquelle notre musique fonctionne autant chez les personnes francophones. Nos concerts dans la partie française de la Suisse sont toujours meilleurs que dans la partie allemande ! (Rires) Et en France l'accueil est toujours très bon.
 
Sur ce je te laisse Johannes, merci beaucoup pour cet entretien, à bientôt ! 
Merci à vous !
 
Et bonne chance pour nettoyer le carnage qu'a fait ton chat ! 
Oh oui je vais en avoir besoin ! (Rires) Merci ! Salut !

 

L'album de CULT OF LUNA "Vertikal" paraîtra le 25 janvier prochain chez Indie Recordings.

01 - The One
02 - I: The Weapon
03 - Vicarious Redemption
04 - The Sweep
05 - Synchronicity
06 - Mute Departure
07 - Disharmonia
08 - In Awe Of
09 - Passing Through






CULT OF LUNA se produira également en concert en France les dates suivantes :
- 24/01 - Le Divan du Monde (Paris)
- 25/01 - L'Echonova (Vannes)
- 26/01 - Le Krakatoa (Bordeaux)
- 01/02 - Le Tremplin (Beaumont)
- 21/04 - La Poudrière (Belfort)

 

 
Blogger : Hugo Tessier
Au sujet de l'auteur
Hugo Tessier
Décidemment né trop tard, Hugo Tessier cultive sa passion pour le rock depuis son plus jeune âge. Avec U2 et THE POLICE dans le biberon, son cœur penchera finalement pour le hard rock des eighties qui à son tour lui fera découvrir de nouveaux horizons musicaux. Tantôt étudiant, musicien puis vendeur dans les festivals rockabilly, en septembre 2011 HARD FORCE le convainc de commencer à explorer les concerts de la région nantaise à peine avait-il déballé son unique carton dans sa chambre universitaire.
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