19 septembre 2021, 19:00

LABELS & LES BÊTES

"Le coté obscur de la force métallique" - épisode 50

Blogger : Crapulax
par Crapulax


Ah les joies de la cinquantaine ! On commence retirer ses lunettes de loin pour voir de près et on ne capte plus que la moitié des conversations dont on ne va du reste retenir que le quart. On constate avec surprise l'apparition d'intrus noirâtres parmi ses cheveux blancs, on rit toujours autant mais plus forcément avec ses dents d'origine et la libido commence sérieusement à rimer avec zéro... C'est la fête !
Pour les cinquante numéros de votre rubrique préférée, le constat n'est évidemment pas le même ! Car il y a (et il y aura) toujours de l'intérêt à découvrir des petites pépites disséminées dans les méandres du net, des fruits de l'underground encore verts mais qui ne demandent qu'à mûrir pour un jour prendre leur place parmi les plus grands et atteindre peut-être eux-aussi la cinquantaine d'années de carrière. Et ce jour-là, vous pourrez clamer fièrement à qui veut l'entendre : « z'ai affifté à leurs débuts ! » (oui parce que si ces groupes ont dépassé les 50 ans d'existence, il est probable que vous et votre dentition ne serez plus d'une très grande fraîcheur).
Joyeux anniversaire Labels & Les Bêtes !

 

DEFACEMENT : « Defacement » ( I, Voidhanger Records)

Ne vous laissez pas impressionner par cette pochette sponsorisée par les boucheries Bernard, DEFACEMENT ne joue pas de goregrind mais un black/death ravageur qui évoque les tourments d’un DEATHSPELL OMEGA dernière mouture. 
Après un premier album riche en goût, « Deviant » sorti chez Throat Productions il y a un peu plus de deux ans, les néerlandais se fendent à nouveau d’un grand format qui ne laisse pas de doute quant à leurs viles intentions. Affichant quatre morceaux dont la durée moyenne tourne autour des huit minutes, entrecoupés d’interludes atmosphériques du meilleur effet, le bestiau donne du fil à retordre. Parsemé de riffs dissonants en diable, il s’acoquine d’un maelström de trémolos du meilleur effet soutenu par des parties de batteries possédées.
Une générosité rythmique qui s'accompagne de nombreux breaks qui ne relâchent jamais vraiment la pression sur l’auditeur. C'est d'ailleurs lorsque l'on imagine échapper à la bête, avec ces deux minutes plus calmes placés entre chaque morceau-fleuve, que l’on se fait prendre au piège. Monstrueux au sens propre comme au figuré, « Defacement » est une expérience troublante et addictive qui, à coup sûr, ne laissera personne indemne.
(Clément)


QUEEN (ARES) : « From This Ground / From This Area » (Atypeek Music)

Après le déluge black/death orchestré par DEFACEMENT, place à une petite douceur (enfin, c’est relatif) en droite provenance des Hauts de France. Formé par des membres de la fine fleur locale (JUNON, THE LUMBERJACK FEEDBACK, UNSWABBED), QUEEN (ARES) signe ici un premier album ancré dans un post-metal de toute beauté qui filera son lot de frissons aux fans d’ISIS et CULT OF LUNA. Parce qu’entre nous les sept titres présentés ici ont tout pour plaire, naviguant avec malice entre ambiances de fin du monde et embardées sauvages où les guitares hurlent leur spleen à qui veut bien l'entendre.
Truffé d’habiles montées en puissance où la tension s’inscrit toujours en fil rouge, « From This Ground / From This Area » se révèle être une descente en eaux troubles qui dégage en toile de fond une véritable mélancolie, une sensibilité à fleur de peau.
Voilà donc un album que l’on peut qualifier de réussite, qui se voit de plus affublé d’un superbe artwork signé Morganne Borowczyk et d’une production, soignée et puissante, qui rend justice à l’ensemble.
Cette reine a de beaux jours devant elle...
(Clément)


BLACK MASS : « Feast At The Forbidden Tree » (Redefining Darkness Records)

Certaines pochettes prêtent à sourire pour peu que l'on s'y attarde. Regardez plutôt ces fiers barbares fêtant leur victoire, femmes lascives prosternées à leurs pieds ! Le premier à gauche semble ravi de tenir la tête décapitée d'une créature connue pour sa grande férocité (un mouton...) tandis que l'autre à gauche lève égoïstement son verre (il n'en a pas ramené pour les copains, apparemment...). Enfin le personnage central, qui a sans doute vu l'affiche de Conan le barbare au cinéma ou à minima acheté un album de MANOWAR, tient la tête d'un ennemi d'une main et son épée (propre) de l'autre. Pour un cimmérien sanguinaire, quel soin apporté à son arme !
Tout cela est bien risible mais... notez ce décor composé d'un grand arbre avec un serpent qui ramène au mythe d'Adam & Eve dont on peut penser que les 2 crânes au sol leur appartiennent.
Du coup l'agneau prend une toute autre signification, non ? Et cet homme à l'étrange coiffe qui ressemble à des cornes que porte aussi sans ambiguïté la femme centrale. Ne seraient-ce pas des démons veillant à ce que les humains conservent leur état primitif ? Pas si naïve finalement cette pochette, non ?
Sinon BLACK MASS c'est super bien, clique !
(Crapulax)


OPHIDIAN I : « Desolate » (Season Of Mist)

Il y a des groupes comme OPHIDIAN I, si tu as le malheur de t'emparer de ta guitare et de grattouiller quelques notes juste après l'écoute de leur album, tu as l'impression que l'instrument se fout de ta tronche. Ah ! Le death metal technique : quel pied à entendre mais quel enfer à reproduire !
Constitué de membres de BENEATH et HELFRÓ, OPHIDIAN I n'a pas à rougir auprès des cadors de la discipline. Descentes vertigineuses de gammes en locrien, phrygien, mixolydien (et sonnepabien pour toi quand tu essaies), remarquables duels de solistes, rythmiques de folie et vitesse d'exécution à se coincer les doigts entre les cordes, ce deuxième album offre une palanquée d'exploits techniques (et on ne parle pas du batteur sinon on frôlerait l'indécence !).
« Solvet Saeclum » leur premier album (2012) souffrait d'une production loin d'être à la hauteur, « Desolate » a lui l'avantage de remettre les islandais dans le bon sens de la marche, que ce soit dans la pureté d'enregistrement des introductions acoustiques ("Captive Infinity") que pour les passages plus saturés.
Donc un conseil : si vous débutez à la guitare, ne comptez pas imiter les guitaristes de OPHIDIAN I tout de suite.
(Crapulax)


PA VESH EN : « Maniac Manifest » (Iron Bonehead Productions)

Les Biélorusses PA VESH EN existent depuis 2017 mais ils n'ont pas manqué d'être productifs puisqu'ils en sont déjà à leur troisième LP, en plus de trois EP. Le groupe est pour le moins énigmatique car l'identité de son / ses membres demeure à ce jour inconnue. Il en reste que ce nouvel album de black metal est une pure folie, comme son nom, « Maniac Manifest », l'indique.
Evoluant entre cris transcendants, basse intense, rythmes plus ou moins rapides et sons industriels angoissants, PA VESH EN est plus qu'un groupe de black. Il cultive un côté malsain, funeste et démoniaque sans une lueur de sérénité.
Tout est torturé chez PA VESH EN, du logo à la pochette de l'album, on ne peut pas dire qu'on n'est pas prévenu. Dès l'intro, il nous semble être plongé au cœur d'un film d'horreur qui se poursuit pendant neuf titres plus suffocants les uns que les autres. Des morceaux comme "Chamber Of The Rotten Flesh" ou le dissonant "In The Wood Of HangedMen" sont d'une rare violence, aussi bien dans l'atmosphère que dans la structure. Même si les blast beats interviennent à quelques moments, l'agressivité repose sur une démence intrinsèque largement revendiquée.
C'est cru, c'est brut, c'est tout ce qu'on aime.
(Aude)


RUNESPELL : « Verses In Regicide » (Iron Bonehead Productions)

Quatrième album en quatre ans pour le one-man band australien RUNESPELL qui revient cette année plus fort et plus épique que jamais avec sept morceaux d'un black metal guerrier et imposant. « Verses in Regicide » est un hymne à la bravoure des chevaliers médiévaux, fiers et inébranlables.
Les rythmes sont musclés, les chants sont virils, les guitares sont heavy et les claviers atmosphériques : Nightwolf, multi-instrumentiste de la formation, sait appuyer sur la corde sensible. "Realm Of Fire" est féroce et bourru là où l'instrumental "Into Dust" apporte un côté folk acoustique de belle facture.
Le très long "Tides Of Slidhr" quant à lui, fait la part belle à des rythmes lourds et mid-tempo sur guitares épiques et chant caverneux. Jusqu'à "Windswept Burial" à nouveau acoustique, RUNESPELL nous emmène sur les traces sanglantes d'un passé plus ou moins glorieux mais toujours relaté sans amertume.
Il est intéressant de voir que des thèmes comme le médiéval que l'on associe souvent à l'Europe de l'Ouest se décline de façon très honnête en Australie.
« Verses In Regicide » fera sans doute des adeptes tout autour du globe en tous cas.
(Aude)

Blogger : Crapulax
Au sujet de l'auteur
Crapulax
Véritable touche-à-tout venant du metal underground : ancien animateur radio de l'émission TRANSAM ROAD (1989/1995), rédacteur de fanzines (CREME D'ANDOUILLE), ex-chanteur et guitariste rythmique au sein du groupe de Post-Hardcore SCREAMING SHORES (2006/2011). Également artiste graphique : affiches de concerts, jaquettes de démos, logos, caricatures de stars du Metal et divers comics (SEXUAL TENDENCIES, PAPY METAL, NEOBLASPHEMATEURS).
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK