28 janvier 2022, 19:00

FIT FOR AN AUTOPSY

Interview Patrick Sheridan

Blogger : Clément
par Clément


Les Américains FIT FOR AN AUTOPSY sont de retour sur les platines avec « Oh What The Future Holds », un sixième album éblouissant. Après l’excellent « The Sea Of Tragic Beasts », qui franchissait les frontières du deathcore en allant piocher au sein des scènes death et metalcore quelques additifs judicieux, le groupe a décidé de continuer sa mue vers un style redoutable. Le guitariste Patrick Sheridan, un des deux membres fondateurs, a pris le temps de se poser en notre compagnie pour faire un état des lieux quelques jours après la sortie de l’album...
 

Bonjour Patrick, cela fait aujourd’hui deux semaines que « Oh What The Future Holds » est paru chez Nuclear Blast Records, quels ont été les premiers retours que tu as eus à son sujet ?
Bonjour Clément. Les premiers retours que nous avons récoltés sont incroyables. Pour être honnête avec toi, c’est la première fois que nous sentons une attente aussi forte autour de l'un de nos disques. Nous avons fait beaucoup de teasing sur celui-ci et c’est, je pense, ce qui fait que nos fans mais aussi la presse étaient impatients de découvrir l’album dans sa globalité. Cela nous fait chaud au cœur...

Vous êtes en pleine tournée à travers les Etats-Unis pour la promotion de cet album. A quelques heures de monter sur scène à Austin, au Texas, peux-tu nous dire quels ont été les retours du public jusqu’ici ?
Là encore, c’est très prometteur pour la suite, chaque soir nous nous produisons devant des fans qui montrent un enthousiasme démesuré ! La plupart de nos dates sont complètes, les stands de merchandising sont pillés, comment oserais-je me plaindre ? (rires) C’est fantastique et cela nous conforte dans les choix artistiques que nous avons pris avec « Oh What The Future Holds ». D’ailleurs, nous jouons les trois singles que nous avions publiés avant la sortie de l’album et les fans connaissent déjà les paroles sur le bout des doigts !

En ces temps de pandémie, j’imagine que tu dois te sentir chanceux de pouvoir tourner car ici, en France, la plupart des concerts sont actuellement annulés ou reportés…
En effet, nous nous sentons vraiment privilégiés. La situation sanitaire n’est pas forcément meilleure aux Etats-Unis mais les consignes données par le gouvernement sur la tenue des concerts nous permettent d’avoir plus de souplesse que chez vous, en Europe, où la pandémie est toujours très active. Nous sommes chanceux, nous en avons bien conscience et profitons de chaque concert comme si c’était le dernier. J’ai d’ailleurs une pensée pour tous les artistes qui avaient prévu de se produire en Europe et qui doivent jongler avec les rebonds de cette foutue pandémie, il est temps que tout cela cesse pour que nous retrouvions tous un peu plus de sérénité au quotidien.


Revenons à « Oh What The Future Holds », peux-tu nous en dire un peu plus sur la signification de ce titre (« Ce que l’avenir nous réserve ») ?
Plus que jamais, nous vivons dans une société qui doit faire face chaque jour à un futur de plus en plus incertain. Une société dans laquelle il existe aussi un fort ressentiment envers les problèmes politiques et sociétaux qui se traduisent par des mouvements comme Black Lives Matter mais aussi les QAnon ou Proud Boys qui œuvrent dans l’ombre de Donald Trump. Je pourrais te citer plein d’autres exemples qui prouvent qu’il existe un sérieux malaise dans notre société et une perte de repères évidente. Nous approchons lentement du point de non-retour et nous n’avons que peu de leviers pour changer cette situation à notre niveau. La seule arme qu’il nous reste est le bulletin de vote et il faut l’utiliser chaque fois que nous en avons l’occasion.

Un des points forts de cet album est le chant, à ce titre Joe Badolato est l'un des meilleurs du genre, sinon le meilleur à mon sens. Peux-tu nous dire comment vous vous êtes rencontrés ?
Nous étions en Australie à ce moment-là, quelque part en 2015, et notre chanteur de l’époque, Greg Wilburn, venait de quitter le groupe. Nous étions à quelques semaines de rentrer en studio pour l’enregistrement de notre troisième album, « Absolute Hope, Absolute Hell » et Tim Howley (un des trois guitaristes) nous a mis en relation avec Joe. Ce dernier a assisté à l’une de nos répétitions et il ne nous a fallu que quelques minutes pour constater que c’était exactement le genre de chanteur qui nous manquait. Cela s’est fait très naturellement et Joe nous a ensuite rejoints pour enregistrer le disque quelques jours plus tard. Encore une fois, notre bonne étoile a brillé lors de cette rencontre !

L'album est homogène avec des morceaux tous composés dans un registre similaire. Le tout dernier, "The Man That I Was Not ",sonne cependant différemment du reste avec ses ambiances très sombres…
Ce morceau clôt l’album et c’est effectivement celui qui est le plus empreint d’émotions comme la tristesse, la nostalgie. Il relate la manière dont les choses qui nous entourent peuvent nous affecter à un moment bien précis. "The Man I Was Not" parle d’introspection, de repli sur soi, c’est un morceau très fort, très personnel comme l’est également "Two Towers".

Le guitariste Will Putney, a une nouvelle fois fait un travail incroyable à la production. Mais ne penses-tu pas malgré tout que quelqu'un d'extérieur au groupe pourrait apporter un regard neuf, différent sur votre son ?
C’est assez simple en fait, Will sait exactement comment le groupe doit sonner. Il est à mes côtés depuis les débuts de l’aventure FIT FOR AN AUTOPSY et il est en quelque sorte garant de l’évolution de notre son. Il a aussi en parallèle une très belle expérience en tant que producteur (NDR : Will est aux manettes sur les derniers albums de PIG DESTROYER, MISERY INDEX et THY ART IS MURDER, entre autres) qui lui donne toute légitimité pour continuer à produire nos disques. Il met au service du groupe ce regard extérieur qu’il a lorsqu’il enregistre pour d’autres groupes que le nôtre. Enfin, pour être sincère avec toi, je ne suis pas sûr que Will laisserait quelqu’un d’autre que lui enregistrer un album de FIT FOR AN AUTOPSY (rires).

L’artwork, signé Adam Burke connu pour son travail avec CADAVERIC FUMES, FIRST FRAGMENT ou encore MARE COGNITUM, surprend au premier abord avant de révéler de multiples détails qui confèrent un charme certain à son travail. Peux-tu nous en dire un peu plus sur cette collaboration ?
Adam s’occupe de nos pochettes depuis « The Great Collapse » (2017), c’est une collaboration fructueuse qui nous réjouit. Au-delà d’être un artiste formidable avec un coup de pinceau unique, il est vraiment à l’écoute lorsqu’il se lance sur un projet en s’appropriant les codes propres à notre univers. Nous aimons travailler avec lui car pour moi, il est tout simplement le meilleur pour traduire nos idées visuelles en véritables œuvres d'art. Sur cette pochette, la mère représente la Terre et l'enfant, les générations à venir, tous deux prennent une pose fusionnelle et le travail réalisé illustre à merveille les textes de l'album. Adam est très doué, la preuve la plus significative de son professionnalisme est d’ailleurs le nombre de pochettes qu’il a réalisées ces dernières années pour des groupes de tous horizons…

Lorsque je reviens quelques années en arrière, j’ai l'impression qu'il y a une vraie rupture sur « The Great Collapse » où le groupe est sorti du carcan deathcore en y incorporant d’autres influences, comme celles de GOJIRA par exemple…
Nous marions dans notre musique toutes sortes d’éléments, et ce, depuis nos débuts : du death metal, du deathcore, du post-rock et des choses plus atmosphériques. Je pense vraiment qu’aucun autre groupe étiqueté "deathcore", parce qu’il faut bien nous ranger quelque part, ne fait ce que nous faisons aujourd’hui. Nous sommes tous fans de metal, mais entre 2008 et 2022, nos goûts et nos envies ont évolué, heureusement. Nous voulions sortir à tout prix hors des sentiers battus et je considère à ce titre que nous y sommes parvenus depuis quelques années, a minima depuis « The Sea Of Tragic Beasts ». Je sais que la presse et notre maison de disques ont besoin de nous faire rentrer dans une catégorie pour simplifier le choix des lecteurs et d'éventuels acheteurs, mais c’est impossible pour nous de nous en tenir à un simple genre. D’ailleurs, si demain nous souhaitions injecter des éléments pop dans notre musique, et bien nous le ferions ! D’ailleurs j’adore Mickael Jackson et Prince, alors tout est possible tu sais (rires).

En parlant de l’album « The Great Collapse », vous aviez tourné un clip vidéo engagé pour le morceau "Black Mammoth". Celui-ci mettait en scène une communauté amérindienne qui subissait la déforestation et l’exploitation de ses terres par des multinationales peu soucieuses de leur sort. Te souviens-tu des raisons pour lesquelles tu as choisi d'en parler à cette époque ?
"Black Mammoth" aborde en effet le sujet des luttes menées par les Amérindiens contre les projets d’implantation d’un gigantesque oléoduc dans le Dakota. La façon dont ce projet a été imposé aux populations locales s’apparentait à un tour de force de la société Energy Transfer Partners, pour qui la vie de ces communautés était le cadet de ces soucis. Ce clip a beaucoup fait parler de lui et il a amené certaines personnes à prendre conscience de ce qui se passait dans ces territoires à ce moment-là. Personne dans ce pays ne devrait se voir refuser ses droits ou se faire vandaliser son lieu de vie, c’est aussi simple que cela.


En tant que membre fondateur de FIT FOR AN AUTOPSY, quels sont les moments marquants de la vie du groupe lorsque tu regardes dans le rétroviseur ?
Chacun de nos albums compte beaucoup parce qu’ils symbolisent tous une étape que nous avons franchie ensemble, la signature avec Nuclear Blast a tenu elle aussi un rôle-clé dans notre ascension mais le plus important n’est pas là. Je dirais que cela concernerait notre line-up actuel qui n’a jamais aussi été soudé, il y a au sein de FIT FOR AN AUTOPSY un véritable esprit de famille, une solidarité, une envie d’aller de l’avant qui nous porte tous les six au quotidien. C’est cela qui compte le plus pour nous.

FIT FOR AN AUTOPSY jouera à Paris le 12 mai au Ginus Live avec ENTERPRISE EARTH, UNE MISERE, GREAT AMERICAN GHOST et SENTINELS pour une date unique en France...
Oui ! Nous avons hâte de venir vous rendre visite et de « botter quelques culs » (rires). La France représente pour nous la joie de vivre, la bonne bouffe, la fête et le rock’n’roll ! Je te garantis que cela va être un grand moment pour ceux et celles d’entre vous qui seront présents ce soir-là. Cette tournée s’annonce énorme avec une vingtaine de dates. Nous passerons par le Royaume-Uni, la Belgique, l’Allemagne, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie, l’Italie, la Suisse et les Pays-Bas. Nous avons intérêt à être en forme pour donner le maximum chaque soir... mais je ne me fais pas de souci à ce sujet-là !

Merci Patrick...
... Un grand merci à toi Clément ! Et pour vos lecteurs : n’hésitez pas à donner sa chance à notre album, nous y avons mis toutes nos tripes ! En attendant de croiser un maximum d’entre vous lors de notre date parisienne, je vous dis à bientôt...




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Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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