Il paraît que du côté de Chambéry, les bouchers possèdent un sacré tour de main lorsqu’il s’agit de désosser, découper, scier, dénerver et conseiller le client sur l'origine d’un morceau de choix. Je confirme qu'à l'écoute de ce premier album de VIANDE, il est clair que le groupe maîtrise le sujet avec doigté tant son death teigneux teinté de doom fleure bon les étals bien achalandés des grossistes qui négocient une fois la nuit tombée. Et les trois larrons se posent ici en expert de leur sujet, n’hésitant pas à convier à la table d’autres artisans renommés tels DISMA, INCANTATION ou DEAD CONGREGATION pour ripailler avec gourmandise tout du long de quarante-deux minutes sanglantes. Appétissantes même.
A contre-sens des modes, le trio auverhonalpin balaie d'un coup de revers de perfecto les standards en vigueur pour régaler l'amateur de son metal à l’ancienne et sans additif. Une preuve ? Il n’y a qu’à écouter "Dents du Gouffre" ou "La Tombe Avide" qui envoient une vraie débauche de riffs gluants suitant la bière éventée et le formol âcre. Un refus de la modernité érigé en ligne de conduite sur chaque descente de tom servant à merveille des guitares aux abois et une batterie qui se tord de douleur. Où les vocalises se muent en gargouilles lovecraftiennes et flèchent un parcours en forme de descente au fond d'un trou obscur, (in)confortablement calé aux commandes d’un bestiau dont la seule joie est de saigner les oreilles de l’auditeur. « L’Abîme Dévore les Âmes » est bel et bien un monstre, à la noirceur imprimée dans son ADN, qui s’aventure avec brio dans des terrains marécageux avec une aisance qui en laissera plus d’un sur son flanc.
Les groupes cités en début de chronique ne sont qu’une tentative pour guider l’auditeur dans un monde étrange où ces références résonnent comme des appels à l'amour du cuir, de la descente de pils par hectolitre et au snif de soufre. Une vile liste de coups de boules métalliques auxquels VIANDE vient apporter sa contribution aujourd'hui tout pectoraux mis en avant, majeur fièrement dressé et roteuse bien calée dans la veste à patches. Burps !