3 juillet 2022, 11:49

KLONE

Interview Guillaume Bernard


A la veille de notre départ pour le premier week-end du Hellfest, nous avons eu l’occasion de planifier un entretien avec Guillaume Bernard, compositeur principal et guitariste de KLONE. La rencontre a lieu le samedi 18 juin dans l’espace VIP du festival, alors que la température à l’ombre avoisine les 40 degrés. Chacun armé, comme il se doit, d’un brumisateur ou vaporisateur, ainsi que de  bouteilles d’eau, nous voilà prêts pour une entrevue extrêmement chaleureuse avec un musicien en or, sans langue de bois, d’une amabilité et d’une gentillesse qui n’ont d’égal que sa fine intelligence et son exceptionnel talent...
 

Peux-tu nous parler du nouvel album de KLONE, les différences par rapport au précédent, « Le Grand Voyage », et surtout, une éventuelle date de sa sortie ?
C’est le truc un peu délicat. Nous avions une date de sortie qui était prévue pour septembre, mais finalement, ça va être décalé car on remixe l’album cet été. Donc, à cause des délais de fabrication pour le vinyle, on est obligés d’attendre entre 5 et 6 mois pour le livrer au label. C’est le temps de fabrication, autant pour un CD c'est rapide, alors que pour un vinyle, c'est eaucoup plus long. C’est l'enfer et ça nous met la pression ! Donc, il y a de fortes chances pour qu’il sorte plutôt fin janvier 2023. Mais nous allons quand même essayer de sortir des singles à la rentrée. Donc nous devrions avoir deux ou trois chansons qui sortiraient en tout. Ça va quand même arriver vite. Ensuite, que te dire à son sujet ? On commence à le connaître, depuis le temps qu’on est dessus. Nous l’avons enregistré en janvier dernier, et on a fait ça pas loin de chez nous, au Dark Side Studio, à Valence-en-Poitou. Il vient de se monter à une demi-heure de chez nous, il est super bien équipé. Du fait de la proximité, on était très à l’aise, et l’ingénieur du son et propriétaire, Hervé (NDJ : Besson-Moreau) est super sympa, aux petits soins. On avait une bonne équipe pour travailler avec nous. Donc, là, le mixage va se prolonger afin que l’on soit vraiment contents à cent pour cent de ce que l’on a fait, et que l’on s’y retrouve dans notre identité musicale. L’orientation est peut-être plus proche dans notre discographie d’un « Black Days ». J’ai un peu l’impression qu’il y a des couleurs qui reviennent de cet album. Ce qui veut dire qu’il y a moins d’arpèges de guitare-clean que sur les disques précédents, même s’il y en a des fois encore un peu, sur certains morceaux. La couleur dominante est un peu plus frontale, même s’il reste encore des parties atmosphériques. Il y a tout de même un retour aux riffs et au côté physique et électrique de la musique. C’était important pour nous, pour le live, histoire d’avoir du relief dans notre set-list, d’avoir un peu plus de variété, et que cela ne soit pas trop linéaire. On n’avait pas envie de rester planqués dans ce truc. Et sans se poser de question à la base, ce sont les riffs qui sont sortis comme ça. Et on était très excités de remettre le nez dans ce genre de choses que l'on aime aussi tout autant que ce qu’on a fait dernièrement. Il y a des morceaux qui sont assez longs, pas mal de saxophone par-ci, par-là et d’arrangements de piano, de la flûte, un flutiau bizarre, un peu chinois. Des trucs assez "ambiance". Ça reste du KLONE, je ne pense pas que les gens vont être perdus, mais on est moins sur quelque chose de posé, en tout cas. Je sais aussi que les paroles sont sur la notion du temps qui passe. C’est la thématique que Yann (NDJ : Ligner, le chanteur) a retenu. On commence tous à prendre de l’âge, pas de différence entre nous là-dessus, on finira tous par passer par les mêmes phases. Et donc, c’est l’addition du temps qui passe qui revient dans la thématique des paroles. 

Et combien y-a-t-il de chansons ?
On en a 10, dont certaines qui sont assez longues, qui durent 6 à 7 minutes. Je crois que nous avons 55 minutes de musique, à peu près. La moyenne, c’est environ 5-6 minutes le morceau. On a du mal à faire moins, et on n’aime pas trop faire plus, non plus. On aime bien ce format pour avoir le temps de s’exprimer comme il faut. Et comme nous avons des morceaux assez lents, forcément, ça étire un peu le temps. On ne peut pas faire des chansons lentes plus courtes, sinon, tu n’as pas le temps de t’exprimer jusqu’au bout.

Un titre d’album est-il déjà retenu ?
Non, c’est encore en discussion, comme c’est autour du temps qui passe, je ne sais pas comment ça va se terminer. On a la pochette, on s’est mis d’accord assez rapidement là-dessus, et ça a aussi aidé Yann à avancer pour les paroles. On a trouvé quelque chose qui convient à tout le monde. On a aussi 4 à 6 morceaux qui pourraient être de potentiels singles, mais on ne sait pas encore lesquels nous allons choisir. Mais il y en aura au moins 2 qui vont sortir avant la fin de l’année en numérique, comme nous avions fait pour « Le Grand Voyage », avec éventuellement un clip, si on arrive à s’en sortir. Ça, on est sûrs de pouvoir le faire facilement, et ce n’est pas compliqué. Ça ne prend pas beaucoup de temps, il suffit de le mettre 15 jours à 3 semaines avant la sortie. Et ça prend bien moins de temps qu’un vinyle !

"L’orientation du nouvel album est peut-être plus proche dans notre discographie d’un « Black Days »"
 

Est-ce qu'il y aura une tournée française prévue ? Des dates déjà à annoncer ?
Oui, il nous reste trois dates à faire cet été. Le Midsummer festival aux Pays-Bas avec LEPROUS le 25 juin, une date en Pologne, à Gdańsk le 12 août et le Motocultor Open Air le 19 août...

Et le Ready For Prog en octobre près de Toulouse !
Ah oui, ça aussi ! Ça a été confirmé. Mais je ne sais plus avec qui on joue...

Avec MYRATH, SEVENTH WONDER, SCAR SYMMETRY entre autres...
Oui, ça va être un bon plan, ça ! Où est-ce que ça se passe ?

Alors, ils l’ont déplacé cette année. Ce n’est plus au centre de Toulouse, mais à Bruguières, une quinzaine de kilomètres au nord de Toulouse. La salle, le Bascala, est plus grande. L’an dernier, c’était top !
Oui, j’ai eu de bons échos à ce sujet. Et puis, il y a d’autres dates en France qui vont arriver, une dizaine à peu près. Je sais qu’il y a Nantes, une dans le nord... Je n’ai pas tout en tête. Istres, aussi... (NDJ : le groupe a annoncé officiellement la date du 28 octobre à L’Usine d'Istres, deux jours après cet entretien), j'ai ça qui me revient, mais je n’ai pas tout le planning précis. Ce sont des coins que l’on fait un peu régulièrement. On fera un premier passage, puis ça va s’intensifier quand le disque sortira. Et, il y aura forcément Paris. Parce que nous avons fait Savigny-le-Temple, et nous n’avons pas pu faire Paris à cause de la COVID. C’était prévu à la Maroquinerie et là, c’est en discussion pour le Trabendo. La Maroquinerie, on avait juste fait un concert acoustique là-bas, avec Anneke van Giersbergen, l’ex-chanteuse de THE GATHERING, et dans cette configuration, c’était cool.

Vous venez de terminer votre première tournée nord-nméricaine, en première partie de PAIN OF SALVATION. Comment cela s’est-il passé ?
Ça s’est très bien passé. C’est une tournée qui a été très intense, en terme de voyage, route, concerts... On est partis le 30 avril, ou un peu avant, le 28 je crois, et on est revenus entre le 2 et 3 juin. On a commencé la tournée par une croisière, la "Cruise To The Edge", très axée sur les anciens groupes de rock progressif, avec quand même quelques nouveautés. C’était plus des vacances, même si nous avons fait deux concerts, sur 5 jours. Nous avons passé beaucoup de temps à se baigner, à faire comme si nous étions en vacances, etc... Et ça faisait du bien, parce que, quelque part, nous en avions tous besoin en cette période. Après, nous avons tout de suite enchaîné sur la tournée à proprement parlé, avec PAIN OF SALVATION. Nous avons fait tous les Etats-Unis en tour-bus, une boucle en partant du sud, puis nous sommes montés jusqu’à Montréal et Québec. Nous sommes redescendus par Boston, New-York... Et nous avons terminé sur un autre festival à Atlanta, le ProgPower Metal Fest, et nous sommes rentrés chez nous. C’était vraiment très cool. On a eu des bons retours de tout le monde, on a vendu tout notre stock de CD et tee-shirts, on a eu des confirmations de possibilité d’y retourner, y compris sur les festivals, la Cruise et le ProgPower. On va pouvoir peut-être construire quelque chose là-bas, mais on part de rien, donc ce n’est pas évident. Il y a quand même eu quelques personnes qui sont venues spécialement pour nous voir. On a été surpris, car ils connaissaient les paroles. Ça ne représentait pas des milliers de personnes, évidemment, mais on sait qu’il y a eu un petit intérêt pour nous. Et le bouche à oreille, là-bas, marche plutôt bien, parce que toutes les personnes qui nous ont vus sur la Cruise en ont parlé à d’autres amis, qui sont venus nous voir. Et certains sont revenus sur la tournée, après nous avoir découverts sur le bateau. Nous avons accroché avec énormément de personnes et c’était très sympa. Et les gars de PAIN OF SALVATION sont vraiment super cool. Très bonne ambiance. Leur batteur, Léo Margarit, est français. Il a fait de super photos pour nous, c’est vraiment une crème ! Très bonnes rencontres humaines. Que du bon temps. Beaucoup plus qu’avec LEPROUS, tu vois, par exemple.

C’est vrai ? Comment ça s’était passé avec eux, justement ?
Les concerts étaient cool, mais il n’y a pas eu de lien. Je les ai trouvés très froids. Le chanteur Einar et Tor le guitariste... Tu vois, Tor, pendant 15 jours, il passait à côté de moi, et c'éatit comme si je n’existais pas, il ne me disait même pas bonjour, ne me regardait pas. Il m’a juste dit bonjour à la fin, sur la dernière date du concert, pour me demander de l'argent... On n’a pas eu de connexion. Après, c’est peut-être leur tempérament. Mais Robin, l’autre guitariste, est adorable, le courant est très bien passé. Il est cool. Le batteur est un peu spécial, mais très sympa aussi, et le bassiste également. Globalement, voilà. On a eu des approches avec eux mais pas les autres.

Pour revenir à la tournée aux Etats-Unis, quel a été le meilleur moment pour vous, et le pire ? As-tu des souvenirs marquants ?
Alors, le meilleur moment, c’est quand nous sommes arrivés sur place, et que nous avions réussi à franchir toutes les étapes un peu pénibles de l’administration, de l’immigration, etc... Car ça nous a plutôt fait flipper, ça fait partie des mauvais moments. Je dirais aussi la croisière, parmi les bons moments, parce que nous n’avions jamais fait ça auparavant. C’était un peu sur-abusé, un excès de tout, de nourriture, etc... Ethiquement, c’est un peu étrange ce genre de monde. Mais on a quand même pris du plaisir à être là, et c’était l’un des moments marquants de la tournée. Même s’il y en a eu plein d’autres qui étaient cool en terme de concerts. Je sais que j’ai bien aimé aussi une ville que je ne pensais pas apprécier, comme New-York. Nous avons eu une journée off là-bas, et la veille, Léo nous a incités à aller voir les buildings, la statue de la Liberté, etc... Et je n’étais pas emballé. La statue, on en a une à Poitiers, qui est un peu plus petite sur notre place de la Liberté... (rires) Mais finalement, j’ai tout visité, et je me suis pris une claque dans la gueule ! Même pour l’ambiance dans la ville. Il y a un  truc qui fait que l’on s’y sent très bien. Tout est impressionnant, tout est immense... Et les rencontres que l’on a faites... Je ne pensais pas que les américains étaient aussi sympathiques, avenants. Beaucoup plus que les français, au final. Tu vois, je nous trouve beaucoup plus pudiques par rapport à eux. Peut-être que parfois, c’est un peu exagéré chez certains américains, mais on a tout de même l’impression que c’est sincère quand ils viennent te voir. On en a eu 2-3 qui sont venus sur certains concerts et qui nous ont bien fait marrer, tellement ils étaient à fond. Grosso modo, voilà pour les bons souvenirs. Pour les mauvais, c’était toute la préparation, le côté lourdingue des papiers pour l’administration, et pour la COVID. Comme je n’étais pas vacciné, et le bassiste Enzo Alfano non plus, j’avais plein de trucs à gérer au dernier moment, ça a trainé. Je me suis fait vacciner à la dernière seconde. C’était devenu valable seulement 2 jours avant que je prenne l’avion. Ce sont des avis personnels, et dans le groupe, nous étions un peu partagés à ce sujet. Mais on a fait tout ce qu’il fallait parce que je n’allais pas annuler un truc aussi gros. Nous ne pouvions pas passer à côté de ça ! Donc, tout le monde a fait un effort. On s’est engagés, et il fallait y aller. Et puis, certaines choses sont très embêtantes. Pour traverser certaines frontières comme le Canada, il y a je-ne-sais combien d’applications et de trucs à scanner. Je n’ai jamais téléchargé autant d’applications ! Pareil sur le bateau pour arriver aux Caraïbes et passer la frontière. A la fin, je devais avoir 5 ou 6 applications, plus tous les papiers à montrer ! Et pour avoir le visa de travail américain, tu as plein de papiers à remplir. Ensuite, tu as un rendez-vous avec une personne au consulat à Paris... Cela a duré des plombes, et ça ne s’arrêtait jamais ! Un autre truc nous a fait flipper c'est à notre arrivée au Canada, même si nous n’étions qu’en transition, on nous a réclamé un visa, alors que j’avais demandé à notre manager avant le départ si nous en aurions besoin. Et il m’avait assuré que non. Mais arrivés là-bas, on nous a rétorqués que si nous ne l’avions pas, nous ne pouvions pas partir ! On a été obligés de le faire une demie-heure avant de prendre l’avion, sur nos téléphones, à devoir payer un truc en plus... Bref, le site plantait à chaque fois au moment de payer. Si on ratait l’avion, tout tombait à l’eau. Sans compter les frais supplémentaires qui n’étaient pas prévus... Au final, coup de bol, tout s’est arrangé et nous avons pu partir, mais ce sont des gros coups de pression que nous avons eu, à la dernière seconde. Et le fait de devoir partir de Poitiers en train, avec toutes les valises, les guitares, le matériel... Nous étions chargés comme des mulets, y compris dans le métro parisien. Nous avons tous dormi chez un ami qui habitaient au cinquième étage, sans ascenseur. Nous étions tellement à bout, tellement énervés à cause de tout cela que nous n’avions presque plus envie d’y aller. Pareil pour le retour qui a été galère...


D’après ce que nous avons vu, effectivement, il semblerait que le retour ait été très long. 35 heures pour revenir, c’est bien ça ?
Oui, on attendu deux fois 10 heures dans des aéroports pour prendre nos avions, à dormir à l’arrache par terre comme des chiens... A Paris, on a aussi raté le train pour rentrer à Poitiers. Tu sais, cela a été plein de trucs cumulés. Trois jours sans sommeil, sans douche, transpirants car trop chargés de bagages... Et quand tu rentres enfin à la maison, tu es super heureux. J’ai retrouvé ma copine, mon chien... et puis je suis tombé très vite (rires). J’étais à bout, je n’en pouvais plus.  

Mais alors, question importante, qui s’occupe de gérer ce genre de trajet, lorsque vous devez rentrer d’une tournée lointaine, comme celle-ci ?
C’est notre tour-manager, qui n’avait pas fait les choses comme il aurait dû les faire. On était un peu énervés contre lui, parce que nous sommes partis à peine une heure après avoir fini de jouer au ProgPower à Atlanta. C’était la course totale. En même temps, on était contents de se dire qu’on allait rentrer vite... Sauf qu’en fait, on a passé tellement de temps à attendre dans les aéroports... Deux fois de suite, on se faisait chier. En plus, on était coincés dans un endroit où tu ne peux même pas sortir dehors pour aller fumer une cigarette, car il fallait refaire un test COVID, alors qu’on en avait déjà fait, au moins 10 fois. C’était vraiment la mort ! (rires) Mais avec tout le reste, ça te permet d’oublier tout ça. On était franchement heureux des conditions dans lesquelles la tournée s’est déroulée. Pas un n’a bronché en prétendant qu’on n’aurait jamais dû la faire. On était tous excités, contents à l’idée de se dire que ce serait possible de le refaire, et qu’on a senti qu’il y avait quelque chose à faire là-bas. C’est très encourageant, et un peu excitant aussi. On a réalisé notre début de carrière en France, et c’est cool qu’il y ait des gens qui nous suivent, on se débrouille plutôt bien par rapport à d’autres groupes. Mais quand tu arrives dans un endroit où tu es nouveau, tu retrouves la niaque d’avoir à convaincre des gens qui ne te connaissent pas. Tu repars de zéro.

Il faut reconquérir en fait. Alors qu’ici, vous avez déjà un public établi. Et donc ça te rebooste...
C’est ça, exactement. C'est une très bonne expérience !


Concernant le line-up de KLONE, peut-on considérer maintenant que Morgan Berthet à la batterie et Enzo à la basse sont des membres permanents du groupe ?
C’est très compliqué. Mais idéalement, comme nous sommes là tous les cinq, je trouve que c’est nickel ! Enzo à la basse, c’est mortel ! Même si c’est initialement un guitariste, il joue super bien de la basse, il a un pur toucher, un pur feeling. Il est bien plus jeune que nous mais on s’entend très bien. Pour Morgan, pareil. En fait, à la base, s’il avait pu rester tout le temps avec nous, cela aurait été cool. Mais s’il n’a pas pu par le passé, c’est parce qu’il n’était pas disponible, et qu’il y a eu aussi des problèmes de frais à gérer qui étaient compliqués. Mais en soi, je pense que ça pourrait continuer longtemps avec lui. Je pense qu’il se sent bien avec nous et on se sent bien avec lui. Et c’est très marrant parce qu’il est à l’opposé de ce qu’il peut dégager au faciès. Par exemple, tu vois, pendant la tournée, les gars de PAIN OF SALVATION ne le connaissaient pas au début et se demandaient qui était ce mec qui faisait un peu la gueule. Mais au final, c’est Morgan qui est allé acheter un gâteau pour l’anniversaire de l’un des membres du groupe, je ne sais plus qui...

Oui, Vikram Shankar, également pianiste et compositeur de SILENT SKIES, un projet piano/voix avec Tom S. Englund d’EVERGREY...
Oui, c’est ça. Et donc, grosso modo, il y avait Morgan qui était là, à acheter des gâteaux, et qui voulait nettoyer le bus, aller vider les poubelles, alors qu’il n’a pas du tout la gueule à faire ce genre de trucs, et qui était aux petits soins sur les petits détails. J’avais déjà remarqué ça la toute première fois où nous avions tourné avec lui. Même pour l’organisation de plein de petits détails, il pourrait être un très bon tour-manager. Il est au taquet sur plein de trucs, il est super organisé. C’est lui qui nous a fait nos petites listes d’affaires à prendre et à ne pas oublier pour la tournée. Plein de détails à la con, comme ça. Et quand tu le vois, tu ne te dirais pas que c’est lui qui va penser à faire ce genre de choses !  Et puis en plus, c’est un excellent batteur ! Ça fait plaisir de jouer avec lui. On a une bonne équipe là.

Donc, à priori, il y aurait bon espoir pour que le line-up reste stable ? Ça dépend des projets de chacun, je suppose ?
Effectivement, Morgan a plusieurs projets. Enzo, c’est pareil. Il joue avec UNCUT, et si un jour il doit partir parce qu’il a une grosse tournée, il fera ce qu’il a envie de faire. De même pour Morgan qui joue aussi avec MYRATH et KADINJA. Pour s’organiser derrière, nous avons plusieurs personnes que nous connaissons qui peuvent faire le boulot. Et de nos jours, ça reste assez fréquent. J’ai vu des concerts hier, notamment, SUICIDAL TENDENCIES que je connais depuis très longtemps. Je ne sais pas combien de fois ils ont changé de batteur, de guitariste, etc... A un moment, tu es un  peu obligé. Ça arrive par défaut. Ce n’est pas une volonté de changer de poste tout le temps. Au contraire, c’est lourd à organiser. A chaque fois, on se retape des nouvelles sessions avec de nouveaux gars. Le temps de rôder les choses... Avec certains, cela se passe facilement, mais avec d’autres, c’est plus compliqué. En ce moment, il se trouve qu’au niveau planning, on est bien. Tout s’est bien goupillé, donc j’espère que ça va perdurer.


A titre personnel, comment as-tu vécu ces deux ans et demi de pandémie, de concerts annulés et de blocages en tout genre ?
Eh bien, il y a deux côtés : j’ai bien aimé avoir l’impression que le temps ralentisse, et d’avoir le temps de faire des choses que je ne fais pas d’habitude. Et aussi, grâce au fait d’être coincé géographiquement, nous nous sommes retrouvés avec ma copine, et des amis, à découvrir des coins de Poitiers où nous n’allions jamais. Du genre à essayer de se planquer dans des endroits un peu paumés pour que personne ne nous cassent pas les bonbons (rires). On a tous fait ça à un moment donné. On s’est créé nos petites habitudes. J’ai eu des concerts chez des potes, qui se sont faits dans les caves, à l’arrache, en mode catimini (rires). Ma copine aussi, qui joue du violon ancien, faisait des concerts de violon/clavecin dans sa maison, dans des petits jardins. Et puis, j’ai eu le temps aussi de faire du son. Je ne suis pas fan des trajets en voiture, mais quand il le faut, je le fais. Donc, c’était plutôt bien de ne pas avoir à se déplacer. Mais ensuite, dans les côtés ennuyant, je n’ai pas aimé me sentir comme un clébard ! A cause du fait que je n’étais pas vacciné et que je n’avais pas mon pass sanitaire. J’ai emprunté le pass de mes potes, au bout d’un moment, pour pouvoir faire ce que j’avais à faire. Il y a des endroits à Poitiers où les mecs étaient vraiment stricts, et d’autres où l’on pouvait faire ce que l’on voulait, et où il n’y avait pas tant que ça de contrôles. Mais je n’ai pas aimé ça, surtout le soir, quand tu sortais pour aller chez des potes pendant le couvre-feu, tu flippais de te faire contrôler, ou même pire, quand tu allais chercher du pain, avec ta feuille d’autorisation de sortie à la main, tu te sentais quand même mal, à devoir te justifier. Je sais bien que ce n’est pas la faute des flics, mais ça m’a énervé intérieurement. Pour moi, c’était un peu démagogique. Surtout quand on voit aujourd’hui, avec du recul, l’efficacité réelle du vaccin, qui est somme toute, assez limitée. Je ne suis pas anti-vaccin, comme certains ont pu le penser. J’ai déjà été vacciné plusieurs fois, et il y en a qui fonctionnent. Mais là... Cela n’empêche pas de l’attraper. J’ai eu des potes qui étaient vaccinés et qui ont été malades, de la même manière que ceux qui n’avaient pas eu de vaccin. Moi, j’ai été en contact avec des gens malades et je n’ai jamais rien eu du tout. Cela m’a fait peur dans le sens où ils (NDJ : le gouvernement) sont capables de nous amener à faire des choses, et tu sens que ta liberté est de plus en plus limitée. En fait, j’ai vécu cela comme s’ils faisaient un test pour voir à quel point nous étions capables d’être obéissants sur certaines choses, si nous étions capables de tolérer ça aussi facilement... Dans mon entourage, j’ai été surpris de constater à quel point certaines personnes pouvaient être obéissantes, alors que je ne le pensais pas. Et d’autres ont été super flippés. C’est assez amusant de voir comment les gens ont réagi en fonction de leur caractère. La peur de mourir fait vriller le cerveau d’une façon assez dingue. Je trouve ça fou ! Cette prison mentale qui s’est créée a été violente ! Et puis, les partis pris, les pour et les contre... J’ai eu l’impression qu’il y avait les "nouveaux prêtres de la santé". Mais on peut aussi faire le compte de toutes les personnes qui meurent d’un cancer par jour, et tu en seras aussi flippé. Il y a toujours des morts, toujours des malades, mais on en parle moins. Et le fait de matraquer ça tous les jours, forcément, ça fait peur. On ne savait pas ce qu’il se passait. Nous, on revenait d’un mois de tournée avec LEPROUS, et dix jours plus tard, tout ça nous est tombé dessus. Et avec les confinements successifs, on ne savait plus où on en était. Il y avait quand même de quoi se poser des questions... Je me renseigne sur plein de choses avant d’avoir une position, et j’ai aussi mon ressenti personnel et intuitif sur plein de choses. Chacun pense ce qu’il veut, et j’estime avoir le droit de ne pas penser comme d’autres. J’ai eu un rapport vraiment pas bon avec toute cette période. Ça m’énervait vraiment.

Content que ce soit terminé, alors ?
Mais la question est de savoir si c’est vraiment terminé ou si ça va revenir cycliquement... Je n’ai pas envie non plus de me faire vacciner sept fois. J’ai fait mes deux doses et je sais pourquoi je les ai faites. Pour la première, je n’ai rien senti, mais pour la deuxième, il s’est passé des trucs bizarres que je n’avais jamais eus de ma vie... Des vertiges, des pertes d’équilibre, des sensations de circulation ralentie sur les mains et les pieds... Je n’invente rien. Je ne vais jamais chez le médecin, je ne suis jamais malade, depuis très longtemps d’ailleurs. Bien sûr, si je tombe malade, je fais ce qu’il faut. Mais j’ai confiance en mon corps. On a des anticorps qui sont là pour nous défendre. Je respecte ce que la nature nous a donnés. On pourrait en parler pendant des heures (rires)...


Au sujet de Klonosphere, tu travailles toujours autant ? Est-ce que c’est toujours toi qui gère le label ?
Non, pas du tout. J’ai Pat avec moi et qui m’aide beaucoup. J’ai eu Julie aussi pendant deux ans qui bossait super bien. Et moi, cela m’a permis d’arrêter de faire la communication, de démarcher certains services, même si je le faisais encore un peu ou si je vérifiais des choses derrière. J’aimais bien l’idée d’avoir beaucoup plus de temps libre, pour faire plus de musique. Et aussi pour pouvoir me concentrer uniquement sur les groupes que je choisis. Et quelques trucs administratifs. Mais en fait, ça, je n’y arrive pas. A chaque fois, je me dis que j’ai envie d’arrêter parce que ça me saoule de faire ça. Cela me prend beaucoup de temps, beaucoup de messages et d’appels. Et parfois, c’est pesant, même pour ma vie personnelle. Ma copine ne cesse de me dire d’arrêter, mais en fait, je ne peux pas. J’essaie de me détacher un peu, mais je fais tellement ça depuis toujours que je reviens dedans. Je reprends la niaque. Mais des fois, j’ai besoin de m’éloigner un peu de tout ça.

Tu as quand même réussi à déléguer un peu...
Oui, et ça, c’est cool. Tu vois, avec Pat, cela fait dix ans que l’on bosse ensemble, on ne s’est jamais engueulés une seule fois sur quoi que ce soit. Tout est très simple, le ton ne monte jamais. J’aime bien quand ça se passe comme ça. Avec Julie, c’était pareil. Depuis 2015, on fait aussi de la musique ensemble à côté avec POLAR MOON et on bossait en parallèle pour Klonosphere... Il y a ses gens avec qui ça passe direct, je le sens instinctivement. D’ailleurs, je suis très méfiant lors d’un premier contact, et en général, mon instinct ne se trompe pas là-dessus.

Concernant les groupes qui font partie de Klonosphere, as-tu des coups de cœur ?
Oh oui, plusieurs ! Parmi les derniers sortis en début d’année, il y a eu TRANZAT, qui a été une très bonne surprise. BLACK OUT ARISES aussi avec de très bons morceaux de rock, dont certains qui m’ont très vite accroché, car ils me faisaient penser à des groupes que j’écoutais plus jeune. Prochainement, on a CANCEL THE APOCALYPSE, qui est un projet de Matthieu Miegeville, un ancien de PSYKUP, qui fait un truc avec un guitariste classique, alors que le chant est plus hardcore, et aussi du violoncelle. Donc, c’est un mélange un peu particulier. Et puis, à la rentrée, on a le premier album solo de Harun Demiraslan (TREPALIUM, STEP IN FLUID) qui est à fond. J’ai aussi découvert un groupe qui s’appelle HYPNAGONE. Il se trouve qu’ils m’ont contacté pour que l’on travaille ensemble. C’est un projet qui est très bien foutu. Et puis HOMECOMING, qui est plus un délire à la MASTODON, produit par Francis Caste. Il y en a tellement... De toute façon, tous les groupes avec lesquels on bosse, ou on a bossé, me parlent musicalement. Je m’y retrouve autant sur le plan musical que sur le plan humain avec les gars, et en terme d’imagerie, ce sont des produits qui tiennent bien la route. On sait qu’on pourra les défendre facilement. Et cela me fait toujours plaisir lorsqu’un groupe est content. TRANZAT, par exemple, avait travaillé sa communication avant avec d’autres personnes, et il n’avait eu quasiment aucune retombée médiatique. Alors que là, on a eu tout ce qu’on pouvait avoir, des chroniques de partout. Je dois d’ailleurs les rencontrer car nous nous sommes fait des visioconférences, mais nous ne nous sommes encore jamais vus en vrai, et là, nous allons nous croiser bientôt. On va faire un petit point avec eux, mais je sens qu’ils sont plutôt satisfaits du travail que nous avons fait ensemble •
 

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Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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