24 août 2022, 17:40

MACHINE HEAD

"Øf Kingdøm And Crøwn"

Album : Øf Kingdøm And Crøwn

MACHINE HEAD. Haaaa ! Ce seul nom suffit à raviver de violents souvenirs à votre serviteur, lui qui avait complètement changé d’avis sur ce que devrait toujours être un concert de metal un beau soir de 30 avril 1995 à l’Espace Culturel de Seichamps, près de Nancy, Ce soir-là, Robb Flynn et les siens faisaient la promotion de leur premier album, « Burn My Eyes », devenu le classique que l’on sait depuis. Et quelle meilleure publicité pour un groupe de thrash qu’un concert de folie dans une salle bourrée comme un œuf et chauffée à blanc par des musiciens vénères de chez vénères ? Une véritable ambiance d’insurrection ! Autant dire que le bouche à oreille avait bien fonctionné, d’ailleurs, puisqu’un peu moins de deux ans plus tard, le 19 avril 1997 plus exactement, au même endroit, le groupe avait réitéré son exploit en terrassant ses fans avec des morceaux issus de son second album, j’ai nommé « The More Things Change... ». Deux shows, deux tueries ! Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, et MACHINE HEAD a traversé pas mal de remous, aussi bien au niveau stylistique qu’à celui de son line-up. Désormais, le groupe, outre Robb Flynn au chant et à la guitare, est composé de Wacław "Vogg" Kiełtyka à la guitare, Matt Alston à la batterie et Jared MacEachern à la basse, et s’apprête à sortir son dixième album, « Øf Kingdøm And Crøwn ».

Album concept vaguement inspiré par l’anime Attack On Titan, « Øf Kingdøm And Crøwn » est l’accompagnement musical des vicissitudes de deux protagonistes dont les destins, marqués par les traumatismes psychologiques, s’entrecroisent au long d’une sanglante odyssée. Le premier, Ares, veut venger l’assassinat par une secte de l’amour de sa vie, Amethyst. Le second, Eros, est l’auteur de cet assassinat. Le décès de sa mère par overdose l’a radicalisé et l’a poussé à commettre des actes d’une rare cruauté. Ce qui réunit les deux anti-héros est leur capacité à voir le bien dans l’extrême violence qui les anime. Vous aurez compris que nous ne sommes pas dans une séquelle de Coup de Foudre à Notting Hill... Ce qui se confirme à l’écoute du premier titre, "Slaughter The Martyr", dont les lugubres notes d’introduction, accompagnées par le chant poignant de Robb, débouchent sur un riffing pêchu et des harmoniques de louftingues ! Le doute n’est pas permis : il s’agit bien d’un nouvel album de MACHINE HEAD ! Et du meilleur cru ! Affichant 10:25 au compteur, ce morceau est le plus long de l’album et varie les plaisirs avec ses nombreux changements d’ambiances. Mélancolie et brutalité s’entremêlent dans un maelström émotionnel qui trouve son apogée dans la reprise de la mélodie chantée en introduction. Magistral !

Le groupe ne faiblit pas sur le second titre, "Chøke Øn The Ashes Øf Yøur Hate" (vous n’êtes pas au bout de vos surprises avec les incongruités typographiques !), sur lequel la violence psychologique servant de trame de fond à cet album concept semble se matérialiser dans les coups de boutoir rythmiques de musiciens littéralement déchaînés. Le genre de morceau ultra heavy dont MACHINE HEAD a le secret. Cette boucherie, sortie sous forme de clip vidéo depuis quelques mois maintenant, laisse ensuite la place à "Becøme The Firestørm", déjà présente sur l’EP digital "Arrøws In Wørds Frøm The Sky" (j’y reviendrai), qui est exactement ce que son titre laisse présager : une tempête sonore ! Blast-beats, alternance de chant clair et d’hurlements, solo démentiel rappelant les grandes heures de « The Blackening », on ne ressort pas indemne de l’écoute d’une chanson qui, de surcroît, se pare de délicieux atours black metal lors de la mélodie de guitare accompagnant le refrain. É-bou-RIFF-ant !

Après un court interlude, "Øverdøse", décrivant le décès de la mère d’Eros puis le désarroi de ce dernier. C’est alors au tour du titre "My Hands Are Empty", connu depuis novembre 2020, date de sa sortie en single digital ainsi qu’en clip-vidéo, d’achever de convaincre l’auditeur par sa noire mélodie. En effet, nous ne sommes pas à la moitié de ce « Øf Kingdøm And Crøwn » qu’il se dégage déjà un caractère définitif d’un disque réservant pourtant encore pas mal de surprises. Les thèmes abordés ne prêtent pas à la gaudriole (la dépression et l’addiction aux opioïdes) mais sont superbement mis en valeur par l’entêtant motif vocal, ainsi que par le refrain, d’une tristesse à faire pleurer une pierre, chanté par Jared MacEachern. Le longiligne bassiste s’affirme de plus en plus au sein du gang d’Oakland et parvient maintenant à faire oublier Adam Duce. Précisons au passage que Logan Mader, qui a conservé de bien meilleurs rapports avec son ancien patron que le bassiste susmentionné, a écrit le riff que l’on peut entendre dans le pont.

Place maintenant à "Unhalløwed", LA surprise de l’album. Démarrant comme une ballade, la chanson, qui explore la dérive mentale d’Eros, se transforme en morceau bien groovy, typique du son de MACHINE HEAD, avant de s’emballer puis d’emprunter des sentiers habituellement fréquentés par... HELLOWEEN !! Non, vous ne rêvez pas ! Ce refrain guilleret, ce solo de guitares en twin lead façon Hansen/Weikath... Comme aurait dit un célèbre pédagogue : "Étonnant, non ?". Bien sûr, ce n’est pas demain la veille que les thrashers californiens écriront des "Dr. Stein" ou des "Future World" mais franchement, cette composition se serait appelée "Unhelløweened" que nous n’aurions rien trouvé à redire ! Toujours est-il que le groupe (du moins Robb et Jared) semble en être légitimement fier puisqu’il l’a publiée sur YouTube dans le cadre de ses sessions "Live From Electric Happy Hour" le 21 juin dernier. Un nouvel intermède, "Assimilate", s’ensuit, puis "Kill Thy Enemies", aussi légère qu’une soupe au béton armé, continue de dérouler la violente épopée des deux protagonistes et plus particulièrement celle d’Eros, qui s’enferme dans une paranoïa aussi délirante que meurtrière. Encore une fois, la joute que se livrent Robb et Vogg est superbe et le duel de guitares harmonisées qui la clôt de toute beauté. "Nø Gøds, Nø Masters" repose entièrement sur son refrain, aux airs d’hymne, qui risque de faire un carton en concert. "Bløødshøt" renferme une série de breaks ahurissants, puis "Røtten" nous ramène aux grandes heures de « Burn My Eyes », mais un « Burn My Eyes » actualisé, plus réfléchi, plus grandiloquent aussi.

Après un dernier et inquiétant interlude, nommé "Terminus", "Arrøws In Wørds Frøm The Sky", également connue depuis de nombreux mois puisque sortie sous forme d’EP digital, conclut l’album de manière épique, lui conférant même un caractère cinématographique. Du grand, du très grand même, MACHINE HEAD ! À ce propos, les titans de la Bay Area ont-ils déjà pondu des bouses inécoutables ? Je vais certainement choquer les puristes (ou les snobs, selon le point de vue) mais à mon humble avis, non ! Si je suis le premier à admettre que « Supercharger » (2001) est un peu trop influencé par les tendances du début des années 2000 ou que « Catharsis » (2018) pêche par sa longueur, je ne perds pas non plus de vue que ces albums renferment leur lot d’intemporelles pépites thrash comme le bien nommé "Bulldozer", "Crashing Around You" ou "Trephination" pour le premier, ou "Volatile", "Catharsis" et "Heavy Lies The Crown" (ce solo!) pour le second. N’oublions pas que le crossover (au sens premier du terme) est dans l’ADN du groupe, et que ce que beaucoup ont taxé d’opportunisme s’expliquait pourtant aisément par le passé de dealer de Robb, lui qui a longtemps fréquenté des gangs qu’on imagine peu concernés par la mythologie scandinave chère à AMON AMARTH. Mais je m’égare...

Avec « Øf Kingdøm And Crøwn », MACHINE HEAD réussit l’audacieux pari de proposer un mix de « Burn My Eyes » et « The Blackening », soit le parfait mariage de la brutalité et de la mélodie, avec le groove dans le rôle de l’amant planqué dans la penderie. MACHINE HEAD is back ! Pardon. MACHINE F**KING HEAD IS BACK !!

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KillMunster est né avec le metal dans le sang. La légende raconte que quand Deep Purple s'est mis à rechercher un remplaçant à Ian Gillan, le groupe, impressionné par son premier cri, faillit l'embaucher. Avant finalement de se reporter sur David Coverdale, un poil plus expérimenté. Par la suite, il peaufina son éducation grâce à ses Brothers of Metal et, entre deux visionnages d'épisodes de la série "Goldorak", un héros très "métal" lui aussi, il s’époumona sur Motörhead, Lynyrd Skynyrd, Black Sabbath et de nombreux autres ténors des magiques années 70. Pour lui, les années 80 passèrent à la vitesse de l'éclair, et plus précisément de celui ornant la pochette d'un célèbre album de Metallica (une pierre angulaire du rock dur à ses yeux) avant d'arriver dans les années 90 et d'offrir ses esgourdes à de drôles de chevelus arrivant tout droit de Seattle. Nous voilà maintenant en 2016 (oui, le temps passe vite !), KillMunster, désormais heureux membre de Hard Force, livre ses impressions sur le plus grand portail metal de l'Hexagone. Aboutissement logique d'une passion longuement cultivée...
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