22 septembre 2022, 18:05

Harun Demiraslan

"In Motion"

Album : In Motion

Que se passe-t-il lorsqu’un musicien et créateur hyperactif se retrouve bloqué à la maison par la faute d’un maudit virus, et que tous ses projets en cours en sont au point mort ? Réponse : il créé un autre projet à défendre et s’entoure, pour ce faire, de musiciens aussi hyperactifs et talentueux que lui, pour l’aider à construire ce qui deviendra son premier album solo, « In Motion ». Harun Demiraslan, puisque c’est de lui dont il s’agit, compositeur et guitariste de TREPALIUM et STEP IN FLUID, ne sait pas, et ne veut pas s’arrêter. Il a mis à profit ce temps soudainement disponible pour se concentrer sur lui, comme il nous l’explique dans l’interview qu’il nous a accordé (en cliquant sur ce lien). Et il a bien fait ! Car cela nous donne l’opportunité d’élargir nos horizons pour découvrir dans quelle nouvelle direction il s’est orienté avec cet album.

« In Motion » est un album instrumental, introspectif et chronologique. Il raconte une histoire. Celle d’Harun, de ses débuts avec TREPALIUM jusqu’à maintenant. Il retrace ses étapes de vie, ses moments forts, avec une fluidité naturelle et une cohérence jamais prises en défaut. Pour obtenir le résultat qu’il souhaitait, Harun s’est acoquiné avec un duo rythmique au touché unique, gorgé de feeling et de groove: Morgan Berthet (MYRATH, KADINJA, KLONE) à la batterie et Geoffrey "Shob" Neau (SHOB & FRIENDS, ex-ETHS, et de multiples collaborations) à la basse, qui se connaissent depuis des années et travaillent instinctivement en communion. Ainsi qu’avec quelques invités de marque, le genre de musiciens qui transforment en or tout ce qu’ils touchent : les guitaristes Richard Daudé et Christophe Godin (MÖRGLBL, GNÔ), le claviériste Gérald Villain (STEP IN FLUID) et le saxophoniste Matthieu Metzger (KLONE, STEP IN FLUID). Album composé en vingt jours seulement, tant l’esprit d’Harun Demiraslan est en constante ébullition. Ses origines, son parcours et son éclectisme font qu’il a toujours su mêler des ingrédients improbables pour créer un mélange riche et savoureux. Après le swing et le jazz  dans TREPALIUM et STEP IN FLUID, ce sont les rythmes et les sonorités africaines qui viennent nous titiller sur « In Motion ».

Loin d’être une mixture indigeste comme on pourrait le craindre, la recette s’avère une parfaite réussite, extrêmement inventive et lumineuse. En effet, la joie de vivre résonne dans chaque note. Les rythmiques, tantôt chaloupées, tantôt syncopées et prises de folie, sont des invitations à laisser son corps parler, comme envouté par une musique chaleureuse, sensuelle et profondément instinctive. L’album commence très fort d’entrée de jeu avec "Brothers", un morceau brut et heavy, toutes guitares en avant, un clin d’œil à TREPALIUM et aux racines metal d’Harun. "Born Again" est une renaissance, plus jazzy, une envie d’ailleurs sur lequel souffle comme un vent de liberté, porté par la soif d’ouvrir les perspectives sur d’autres univers. Un morceau qui n’est pas sans rappeler les thèmes de STEP IN FLUID. "Her", c’est elle. La femme de sa vie. Ce morceau est un tourbillon où les guitares répondent aux claviers, un dialogue fait de séduction et d’excitation, sur lequel intervient Richard Daudé, doté d’une rythmique folle, comme sur les deux morceaux précédents, et un final d’orgue conviant les futurs époux devant l’autel. Avec son intro aux sonorités africaines, le superbe "I Bisimilah Lily" est le seul morceau sur lequel Harun donne de la voix  (« I bisimilah né Ka sanoubéréni » qui signifie « Bienvenue mon trésor » en Bambara), en compagnie de son épouse, pour célébrer la naissance d’un petit être qui viendra chambouler leurs vies. On se retrouve projeté sous un soleil brûlant, dans un paysage fait de sable et d’étoiles, et l’on croit apercevoir au loin, dans une vague de chaleur, une fillette vêtue d’une longue robe blanche vaporeuse, dansant dans la brise chaude qui lui caresse les joues. Etait-ce un mirage ?

"Vertigo", vertige des sens, vertige d’une vie nouvelle faite de joies, mais aussi vertige de l’inconnu qui se profile et semble annoncer que le meilleur est à venir. C’est la découverte de la paternité. L’homme devient père, laissant derrière lui l’inconscience des débuts pour aborder un nouveau chapitre de son histoire. La musique, avec ses joutes de guitares et son solo lumineux, reflète merveilleusement bien cet état d’esprit, entre plaisir immédiat et fébrilité de découvrir un autre monde. On retourne en Afrique avec cet énorme coup de cœur qu’est "Under The Sun", sur lequel la basse ronde et claquante de Shob apporte un groove irrésistible, soutenu par la batterie de Morgan Berthet, qui donne une furieuse envie de se trémousser. Et lorsqu’interviennent le saxophone soprano langoureux et sexy de Matthieu Metzer et les claviers jazzy et délicats de Gérald Villain, on plonge dans une joyeuse sarabande où se mêlent sensualité torride et tourbillon d’énergie. Ce morceau est exceptionnel, tant les instruments apportent chacun une couleur différente sur la palette du peintre, mais offrent également un tableau à l’harmonie parfaite où toutes les nuances se répondent, s’interpellent et se complètent.

"Surtension" est un morceau teinté electro, au rythme syncopé, aux notes jazzy, avec lequel Harun Demiraslan exprime son ressenti concernant la pandémie. On y perçoit une angoisse, une inquiétude qui transpire à travers une rythmique pesante et des sons de claviers crissants. Questions restées en suspens, avenir incertain... Mais également créativité débridée qui fuse en tous sens, à l’image du solo de Christophe Godin. Le dernier et excellent morceau, "Nomad", reprend les codes du premier, "Brothers" : les guitares se déchainent, la basse est puissante, la batterie part dans un rythme furieux qui débouche sur un final époustouflant nous laissant bouche bée. Tandis que le saxophone et le "bidule" (instrument au son bizarroïde créé par Matthieu Metzger) apportent le grain de folie supplémentaire, faisant de ce morceau ébouriffant l’une des réussites indéniables de cet album. Avec une seule envie, à l’issue de cette écoute : réenclencher la touche "play" ! Et plusieurs fois de suite, qui plus est. Mixé et masterisé par Fabien Devaux (Outsider Studio), le son est puissant et les instruments sont parfaitement distincts les uns des autres.  L’album est aussi doté d’une superbe pochette travaillée par Gilles Estines, sur la base d’une photo d’Harun, et représente on ne peut mieux l’âme multiculturelle du compositeur.

Avec « In Motion », Harun Demiraslan a créé un joyau brut, que l’on prend un infini plaisir à réécouter, découvrant à chaque fois des subtilités qui nous avaient échappées, dévoilant un peu plus les richesses contenues dans ces huit morceaux. C’est un album dense, mais fluide. Les musiciens impliqués dans ce projet ont mis leurs talents respectifs au service de la musique, imprimant ces compositions de leur touche unique et personnelle dans un mariage équilibré, harmonieux et cohérent. On les savait déjà très doués, on ne peut que confirmer que ces gars-là ont été extraordinairement inspirés, sous la houlette d’Harun Demiraslan, en chef d’orchestre, certes un peu fêlé, mais tellement attachant, avec sa créativité en effervescence permanente et sa bonne humeur contagieuse. Si la curiosité de la découverte fait partie intégrante de votre mode de vie, nous ne pouvons que vous inviter chaleureusement à vous plonger dans le monde foisonnant de cet incroyable artiste. « In Motion » est, sans l’ombre d’un doute, l’une des plus belles surprises de l’année.

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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