Je le mentionnais dans la rétro-chronique de PRO-PAIN, en 1992 la révolution sonore était totale, et des albums mythiques déboulaient de partout. BIOHAZARD décidait de nous donner une leçon de « Urban Discipline ».
A l’instar de la pochette, des enfants jouant autour de la silhouette marquée à la craie, une victime d’homicide de plus dans l’ambiance délétère de Brooklyn, l’ambulance attendant en arrière-plan, le bal metal s’ouvre sur "Chamber Spins Three", un état d’urgence musical qui monte avec un riff qui se rapproche. La batterie claque et la basse est impitoyable, la voix rageuse de Evan Seinfeld donne ses instructions. Instructions de survie en milieu hostile, pas de place pour la pitié en ces lieux, alors la musique elle-même devient impitoyable. Les riffs sont thrash et s’accélèrent, la voix âpre résonne telle une sirène d’alerte. Bienvenue dans le monde rude de BIOHAZARD.
Morceau culte, "Punishment" débute avec la voix de Franck Castle, l’homme brisé devenu le Punisher, le croque-mitaine des voyous de la Grosse Pomme. Tout s’accélère, Evan et Billy Graziadei se livrent à une battle de voix rapcore, Danny Schuler martèle ses fûts et Bobby Hambel enflamme ses riffs. La démonstration est martiale et se poursuit avec l’ultime "Shades Of Grey", morceau qui fit la joie des moshpits dans les nineties. Les soli sont aiguisés et hennissent dans le ciel rougeoyant. "Business" s’attaque au star-system en lui tournant sauvagement autour tel un boxeur infatiguable, l’assaillant sans relâche de sons thrash au visage, de cris de révolte et d’un rap sans concession dans le bide. Je m’en souviens comme si c’était hier, cette galette hargneuse qui déboulait dans nos soirées et faisait décoller nos larges chemises à carreaux. La Fusion, la Révolution. La rage musicale instantanée, la découverte du goût de la différence, d’une créativité élargie à de multiples styles. "Black And White And Red All Over", fraternité des masses hystériques sur une martialité imposée, le "Motherfucking metal".
Les morceaux alternent les rythmes. C’est rapide et enlevé pour "Man With A Promise", c'est "atmosphè-riff" pour "Disease" et "Loss", c’est enfin brutal pour la chanson-titre de l’album. "Urban Discipline", les sirènes résonnent dans la nuit, des riffs lourds peignent les façades d'un son grassement saturé, la rythmique est un fauve déchaîné, Evan et Billy nous exhortent et nous donnent les règles pour survivre à l’enfer des rues du old-New York, et du monde en général. Dans ce seul titre se résume le style du Brooklyn hardcore. Longtemps après notre âme restera imprégnée par ce genre inimitable. La BIOHAZARD touch. Un hardcore metal coup de poing... américain. Le "Wrong Side Of The Tracks" est la meilleure voie pour la liberté musicale débridée.
Côté pépites citons le slamé "Mistaken Identity" qui offre un magnifique mélange des genres thrash, punk et rap. Un hommage punk le suit justement avec la eeprise "We’re Only Gonna Die" de BAD RELIGION. East coast/west coast, cause commune. Fraternité de la jeunesse comme je disais.
Avec « Urban Discipline » BIOHAZARD offre une des œuvres majeures de la décennie 90. A l’heure où le groupe réunit le line-up originel pour une grande tournée en 2023 on ne peut que se réjouir de pouvoir une nouvelle fois entendre résonner ces brûlots hardcore dans les fosses du monde entier. Après toutes ces années éprouvantes ce sera mieux que n’importe quel vaccin. Avec ces sirènes d’alerte, la guerre à nos portes, BIOHAZARD est plus que jamais un lanceur d’alerte qui nous tire des "Tears Of Blood". A époque de fou, musique de fou.
Quand 30 ans après tu es toujours dans l’urgence, c’est que tu as quelque chose à dire. 30 ans après, BIOHAZARD est toujours dans la place, motherfuckers !