18 novembre 2022, 18:00

MAGOYOND

Interview Julien & Victor


Habitué des conventions spécialisées, MAGOYOND a déjà conquis la planète geek et autres fans de la zombie apocalypse depuis des années. Son troisième album « Necropolis » sorti au mois d’octobre est bien plus qu’un simple disque, c’est aussi un monde imaginaire qui va vous immerger dans des récits aussi riches que celui d’un jeu de rôle grandeur nature. Les deux maîtres Julien & Victor nous ont dévoilés les règles et secrets qui entourent cette œuvre qui risquerait bien de vous conquérir aussi. Alors prêt pour rentrer dans l’univers MAGOYOND ?
 

Avec « Necropolis »​ vous semblez avoir mis le paquet, est-ce que le résultat est à la hauteur de vos attentes ?
Julien :
Au-delà de nos attentes !
Victor : Cela nous dépasse même, entre les retours des gens et ceux des journalistes qui sont tous dithyrambiques, ce qu’on se prend depuis dix jours ce n’est que de l’amour ! C’est merveilleux mais il faut le digérer, dans le sens où nous avons tout bien fait...
Julien : On découvre l’effet que cela fait aux gens. Maintenant nous avons un label, donc nous devons faire les choses de manière "conventionnelle". Et nous n’avons pas l’habitude, car nous sommes de la génération Internet où l’on sortait un morceau et c’était en ligne. C’est la première fois que nous devons attendre autant de temps avant de montrer notre travail, et nous avons dévoilé tout d’un bloc, et cela a été une montée en pression. Une fois que nous avons fait notre avant-première au cinéma devant une salle de 150 personnes qui réagissaient positivement après plus d’un an et demi de travail à fond, on s’est dit qu’on pouvait commencer à souffler.

« Necropolis »​ a vu le jour grâce à une campagne de financement dont l’objectif a été atteint à plus de 600%, comment expliquez-vous cet énorme succès ?
Julien :
Honnêtement, on ne l’explique pas. Pour notre précédent album « Kryptshow » nous avions demandé 8 000€ et nous en avions récolté 20 000€, ce qui est déjà hyper honorable. Car nous sommes indépendants, nous n’avons aucune structure autour de nous, et donc nous n’avions rien fait depuis 6 ou 7 ans. Et là on sort de 2 ans de pandémie, on se remet sur un nouveau projet et résultat : un millier de pré-commande et 62 000€ qui nous permettent de décrocher un peu des rêves ! Le soir de la collecte, on voyait le nombre de contributeurs qui montait, et pour nous ce n’était pas palpable car on se considère encore comme un "petit" groupe. Nous sommes les premiers surpris, mais surtout nous avons un public incroyable.

On imagine que cette somme importante vous a permis d’aller plus loin dans ce que vous aviez prévu, comme ajouter un orchestre symphonique, un brass-band et des chœurs ?
Victor :
Nous avions des paliers pour les avoirs, mais le fait de les atteindre n’était pas sûr.
Julien : On espérait faire aussi bien que le précédent. Ce qui était mieux pour notre image, car pour un troisième album si tu fais moins bien que le précédent c’est un peu dommage. Nous avons eu aussi la chance de ne pas composer tout l’album avant, car tous les paliers que nous avons débloqués ont conditionné la composition et cela à changer beaucoup de choses.

C’est justement ce que l'on se disait, votre processus de création habituel a dû être chamboulé ?
Julien :
On a essayé de faire mieux, car il y avait une pression monstrueuse de faire jouer autant de monde. Dans ce cas on n’a pas droit à l’erreur, ce sont tous des professionnels et il n’y a ni fausse note ni mauvais arrangement. A l’écriture nous avons utilisé les codes qu’on connaissait, mais tout a été dix fois plus travaillé que d’habitude. En revanche pour la voix il y a eu une remise en question complète, comment la faire sonner sur cette base musicale qui est folle ? Il fallait que dans les compositions tout soit mieux, donc on a travaillé chaque seconde de l’album pour que tout soit exactement comme on voulait.

Comment cela s’est-il passé au niveau vie privé ?
Julien :
Je pense que nous sommes avec des personnes conciliantes. Après c’est toujours pareil, il y a des hauts et des bas. Mais avec le crowdfunding et cette somme d’argent récoltée, nous avons eu une sorte de légitimité de dire "c’est maintenant". Personnellement j’ai arrêté de travailler en mars dernier pour devenir freelance et pour me consacrer à 100% à MAGOYOND. Si on veut aller là on pense aller, il faut une implication totale. Nous n’avons pas été payé, tout l’argent a été mis dans le projet, et même un peu plus. Il fallait quelqu’un pour gèrer tout cela, que chacun alloue du temps et comme jamais. Mais nous sommes tous dédiés à cela, on voit le monument qu’il faut façonner et nous allons tous dans la même direction.

Est-ce que « Necropolis »​ est un peu la nouvelle identité pour MAGOYOND ?
Julien :
C’est une continuité de notre identité.
Victor : Même si les gens estime qu’il y a un réel step-up par rapport au précédent, pour moi « Kryptshow » c’est une base de style du groupe, musicalement parlant et en termes d’intensité. Et en découle un album plus aboutit.
Julien : Notre premier album « Pandemia » qui est sorti en 2012 pose les bases de l’univers, musicalement il est ce qu’il est. Avec « Kryptshow » on pose les bases musicales telles qu’on a envie de les représenter, « Necropolis » est un peu la quintessence.

Au tout début quand vous avez commencé, est-ce que vous auriez imaginez tout cela ?
Julien :
Non, mais on blaguait du genre « il faudrait un jour qu’on enregistre avec un orchestre symphonique ». C’était un peu un rêve, on se disait que personne ne nous ferait confiance. Et quand nous sommes allés à la Seine Musicale pour enregistrer, on s’est filmé avec Aspic (le bassiste, NDLR) on se disant « tu te souviens en 2010 quand on imaginait cela ? », et les gars, quand on a débarqué, ont vu deux "nerds" et ils ont dû se dire « qu’est-ce qu’ils vont nous faire jouer ? ». Et plus ils découvraient la partition et plus ils s’apercevaient que c’était quelque chose de vrai, et là il s’est passé quelque chose. Pour nous c’est invraisemblable, mais c’est une belle histoire.

Vos paroles sont très travaillées et les histoires que vous racontez sont dignes d’un film, est-ce qu’elles demandent autant de travail que la composition musicale ?
Julien :
Quasiment toutes les chansons partent d’un pitch, « Necropolis » a été écrit avec une trame narrative et on savait où on voulait aller. Avant le travail de la voix il y a le travail d’écriture, et celui-ci a été très difficile car on voulait le mot juste, on voulait sonner grand et ne pas être ringard. Sur la musique il y a eu certes beaucoup de travail, mais sur les textes il y a eu beaucoup de remise en question.

Tu peux nous donner quelques thèmes abordés dans ce nouvel album ?
Julien :
Il y a celui des sociétés secrètes avec le morceau "L'Ordre de l'Ombre", elles ont régné pendant des années mais sont maintenant en déclin. Il y a le thème des survivants sur "Goliath Paradise", un endroit où ils peuvent vraiment se retrouver et vivre, et non pas survivre. Celui de la destruction et la construction sur plusieurs chansons, nous avons aussi des hommages avec par exemple "Le Village" qui est un clin d’œil au jeu du loup garou de Thiercelieux, ce titre est fait de la même manière qu’une partie. Chaque composition à son petit univers avec son synopsis qui fait qu’on peut la prendre soit seul, soit dans la continuité de l’album.


​Vous êtes très attachés au live, est-ce un paramètre que vous prenez en compte lors de l’écriture de nouvelles chansons ?
Victor :
On devrait le faire (rires). Car pour prêcher pour ma paroisse, si l’on prend par exemple "Le Charnier des Épouvantails" on a mis de la Whammy, et lors de l’enregistrement pendant que je jouais, c’est Arnaud qui avait la pédale sur les genoux et qui faisait les articulations. A reproduire sur scène avec la coordination, cela va être compliqué. Sur le moment, on s’est dit que pour le live on verrait...
Julien : Idem pour la voix, on s’est tellement dépassé qu’à la fin je me suis dit qu’il faudra tout de même les chanter (rires). On nous a fait la réflexion aussi sur l’orchestre symphonique sur scène, on s’est fait plaisir en créant une musique de film qui nous plaît et qui est très grande. Mais sur scène nous sommes quatre petits gars et nous devons nous démener pour apporter quelque chose d’autre, nous n’avons pas les moyens énormes d’un RAMMSTEIN ou d’un METALLICA, il faut que cela se passe différemment avec un angle un peu plus comique en lien avec le public, plus "chaud cabaret" on va dire. Il a donc fallu que je travaille énormément pour restituer la voix ou la guitare qu’on avait fait sur l’album. On s’est rendu compte que les morceaux étaient plus compliqués, « Necropolis » n'est pas un album de studio et il doit avoir son existence sur scène. Si l’on veut plus jouer et faire des festivals, alors il faut qu’on se défende.

Vous avez dû mettre cet album à l’épreuve du feu il y a quelques jours lors de vos deux concerts au Zèbre de Belleville, quel a été l’accueil des fans ?
Julien :
Très bien ! Les gens chantaient, trois jours après la sortie de l’album ils connaissaient déjà les paroles.
Victor : Et même sur des titres sur lesquels on s’était dit qu’il n’y aurait pas tout de suite le refrain.

A ce sujet, quelles sont vos prochaines dates ?
Julien :
Le 13 novembre nous étions à Rennes, le samedi 19 on sera à Paris dans le 19e à la Brasserie de l'Être pour une rencontre et dédicaces, et après on va se balader à Bordeaux, Toulouse, Lyon, Lille, et plein d’autres dates sont en préparation.

MAGOYOND est particulièrement apprécié par les fans de la pop-culture et vous êtes des habitués des shows dans les conventions, quels sont les films, séries ou autres qui ont contribués à créer votre univers 
Julien :
Il y en a tellement !
Victor : Je ne suis pas la genèse de MAGOYOND mais pour donner un exemple concret, récemment lors du clip de "Goliath Paradise" avec le brass-band, nous avions le réalisateur Baz Luhrmann en tête. Il a fait les films Gatsby le Magnifique, Moulin Rouge et dernièrement Elvis. Après nous sommes tous des fans de Star Wars et du Le Seigneur des Anneaux.
Julien : J’aime bien les films de genre et d’horreur. Sans oublier Tarantino et Robert Rodriguez, car ils prennent des partis pris autant musicaux que visuels, qui sont la base même des stéréotypes que nous utilisons dans nos chansons. Tout comme les vieux films de monstres de la Hammer, ce sont des monuments du cinéma qui sont hyper connus et fédérateurs.
Victor : Nous avons aussi le coté Tim Burton auquel nous sommes souvent associés, mais en vrai c’est un souhait. On ne fait pas de l’horreur, on est plus du côté Disney et Tim Burton est vraiment à la charnière entre ces deux styles, on fait plus de l’horreur joyeux.
Julien : J’aime bien l’idée de la mort colorée et joyeuse, Les Noces Funèbres est un film incroyable et j’adore cette image qui nous correspond bien. Et d’ailleurs nous avons écrit plusieurs morceaux en se disant « voilà l’image, et maintenant on va essayer de créer la musique ».


Est-ce que par hasard votre musique a déjà été utilisée pour la bande son d’un film ?
Julien :
Nous avons beaucoup de demande pour des courts métrages, nous avons la chance de fournir les versions instrumentales de nos morceaux. Sauf si cela concerne un projet commercial de dingue, nous sommes plutôt ouverts à ce genre de proposition, car c’est une forme de reconnaissance. Nous avons écrit certains titres, dont l’éponyme "Kryptshow", en se disant « si on avait un film d’horreur à faire, il faudrait que ce soit le générique ». Les premières notes au piano de "Kryptshow" c’est notre film d’horreur à nous.

J’ai envie de poser la même question concernant cette fois-ci vos influences musicales ?
Julien :
On s’entend pas mal sur des groupes de metal, sur nous quatre il y en a peut-être une dizaine sur lesquels on s’accorde. Mais après cela part dans tous les sens, nous avons énormément de références musicales !
Victor : Je suis plutôt plus mainstream, pop et djent dans le metal. En tout cas plus actuel et moderne que les autres, ils sont plus Devin Townsend et LEPROUS.
Julien : Par exemple pour "Goliath Paradise", il n’y a que moi qui avait une connaissance jazz, et dans ce cas on doit apprendre à s’approprier le style. Pareil pour "Le Manoir de Zack Trash" où l’on voulait un énorme orgue façon vampire très typé. Et Aspic n’avait jamais vu de film de ce genre, je lui ai donc donner des références pour qu’il en regarde. On aborde chaque morceau comme une nouvelle pièce de l’échiquier, et on s’amuse avec.

Avez-vous déjà du matériel pour la suite ? Ou du moins une direction en tête ?
Victor :
J’aimerais bien m’y pencher pour trouver des nouveaux thèmes et des nouveaux riffs. Mais pour le moment l’album est très frais et nous sommes encore dans la digestion.
Julien : En revanche on sait où l’on va. Nous avons passé dix ans au même endroit, de "Pandemia" à "Necropolis" factuellement c’est la même ville qui évolue. Si l’on fait un quatrième album on va prendre du recul, et aller voir ce qui se passe ailleurs. C’est bien beau de parler de Magoyond ville et Necropolis, mais peut-être qu’à un moment donné on va être brider. Il y a plein de thématiques issues de la pop-culture liées à des endroits spécifiques du globe ; l’Afrique, l’Asie, cette idée de voyage, qui au passage m’est venue pendant le confinement, me parait être une bonne base pour le prochain album. Sinon pour information il y a un zeppelin qui est caché ici (Julien nous montre sur la pochette de « Necropolis » et effectivement une ombre discrète ressemblant à un zeppelin est visible, NDLR) qui peut donner éventuellement une bribe d’élément pour la suite...
 

Blogger : Jérôme Graëffly
Au sujet de l'auteur
Jérôme Graëffly
Nourri dès son plus jeune âge de presse musicale, dont l’incontournable HARD FORCE, le fabuleux destin de Jérôme a voulu qu’un jour son chemin croise celui de l'équipe du célèbre magazine. Après une expérience dans un précédent webzine, et toujours plus avide de nouveautés, lorsqu’on lui propose d’intégrer l’équipe en 2011, sa réponse ne se fait pas attendre. Depuis, le monde impitoyable des bloggers n’a plus aucun secret pour lui, ni les 50 nuances de metal.
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