21 janvier 2023, 13:30

ATROCITY

Interview Alexander Krull

Dix ans après la sortie de « Okkult », Le groupe de death metal allemand ATROCITY termine sa trilogie avec cette année dix nouveaux titres sur un « Okkult III » bien plus brut et plus sombre encore que ses deux prédécesseurs. Son leader charismatique et chaleureux, Alexander Krull, a bien voulu répondre à quelques-unes de nos questions à propos d'un album qui va hanter plus d'un d'entre vous...


Alors ça y est, c'est le dernier round pour la trilogie « Okkult » avec l'arrivée du troisième volet donc, « Okkult III » ? Comment te sens-tu juste après sa sortie ?
Eh bien je suis toujours stupéfait de me dire qu'on vient de passer une décennie complète sur « Okkult » ! Je dois dire que pour nous, ce dernier volet se devait d'être un temps fort de la trilogie. Donc, je me sens encore ambitieux et j'espère vraiment que l'on a fait du bon travail.

Oui, il n'y a aucun doute sur la qualité de cet album. Il est super lourd et même bien plus sombre que les précédents, non ?
Oui, le précédent était peut-être plus heavy, plus orienté sur les guitares. Cette fois, nous voulions une atmosphère très sombre mais aussi quelque chose de très brutal. Le but de cette trilogie était d'avoir une musique brutale, épique et maléfique.

C'est un bon résumé de ce qu'elle est en effet. Est-ce qu'il a été difficile de garder un lien avec ce que vous aviez produit sur « Okkult I » il y a dix ans et en même temps sortir un « Okkult III » moderne et différent ?
En fait, toute la trilogie tourne autour du même concept qui est le côté sombre de l'humanité. Il nous fallait donc écrire des chansons sur ce thème. C'était un but très ambitieux. Et en ce qui concerne l'évolution musicale, on s'est dit que chaque album devrait pouvoir exister pour lui-même, avoir son propre charisme, sa propre identité. Sur le premier album, nous avions peut-être plus d'éléments électroniques, des parties plus mélodiques ; sur le deuxième, on avait plus de chœurs. Le dernier, lui, comporte moins de tous ces éléments, il a le côté brut du metal même si un titre comme "Malicious Sukkubus", qui est central sur l'album, a des passages très symphoniques aussi, tout comme "Teufelsmarsch". En fait, ces trois albums représentent vraiment toute la diversité du groupe avec un côté épique, atmosphérique mais aussi horrifique. Tout cela apparaît sur les trois albums, mais de façon différente, afin que chacun soit unique. Et heureusement car on n'aurait pas pu faire trois fois la même chose ! Il faut qu'à chaque fois, ce soit une fête pour les oreilles de nos fans.
 

« L'être humain est la pire espèce sur Terre : on fait des choses qu'aucun animal ne ferait à ses congénères »



​C'est important pour vous de véhiculer ce message lugubre, cette atmosphère un peu effrayante qui donne des frissons ?
Oui, absolument. Nous vivons dans une période vraiment folle, le monde est fou, donc on a fait de la musique folle. Ce qui nous entoure est terrifiant et il est intéressant de voir comment le metal traite de tous ces thèmes quotidiens : la guerre, la menace nucléaire, la pandémie, les catastrophes naturelles, les ouragans... La seule chose qui manque, c'est l'apocalypse ! Si on regarde bien, tout ce que nous avons écrit est devenu bien réel. J'aime beaucoup l'Histoire et je fais énormément de recherches avant d'écrire un album. J'aime savoir pourquoi les choses arrivent et comment car tout a un impact sur nos vies en tant qu'humains. L'être humain est la pire espèce sur Terre : on fait des choses qu'aucun animal ne ferait à ses congénères. Quel que soit le régime politique dans lequel tu te trouves ou quelle que soit ta religion, la seule chose qui régit le monde est le contrôle et la manipulation des populations par la peur. Si tu réussis à instaurer la peur, tu peux contrôler les gens : « Si vous vous comportez bien, vous irez au paradis, sinon, vous irez en enfer ». C'est assez simple, non ? C'est pareil avec les lois. Et ceux qui nous dirigent abusent très souvent de ça, ils usent de leur pouvoir. Quand tu regardes le parlement européen et toute la corruption qu'il y a, les mensonges... Ce n'est pas sur une autre planète ! C'est bien ici que ça se passe. Pourtant, je ne suis pas conspirationniste ou quoi que ce soit, mais j'aime réfléchir un peu plus loin que les informations qu'on nous présente et ne pas forcément croire tout ce qu'on me raconte.

Quand tu as commencé à écrire la première partie de « Okkult », est-ce que tu avais un cadre, une trame que tu allais suivre pour les trois albums ? Savais-tu déjà de quoi serait fait « Okkult III » par exemple ou est-ce que les idées sont venues au fur et à mesure ?
Eh bien, disons que j'avais un plan. Quand « Atlantis » est paru en 2004, j'étais déjà en train de réfléchir à une trilogie et quelles chansons je voudrais y voir figurer, quels thèmes aborder, quel type de musique y serait. J'avais déjà cette ambition. Mais rien de vraiment défini non plus car ce serait vraiment ennuyeux d'avoir toutes les chansons prêtes et ensuite, simplement de les sortir de manière régulière pendant dix ans. Notre musique a bien sûr évolué. Nous avions pour trame d'explorer tous les domaines, et ils sont nombreux, où l'on peut trouver des histoires obscures. On voulait plonger nos auditeurs dans un monde occulte, avec des histoires qu'ils n'auraient probablement jamais entendues auparavant. On voulait qu'ils expérimentent des émotions à travers la musique. J'ai donc fait beaucoup de recherches car j'aime beaucoup ça.

Et ta façon d'écrire aujourd'hui est-elle différente ce ce qu'elle était au moment de «Okkult I »? Ton état d'esprit est-il différent ?
Pas forcément mais ce qui est différent c'est qu'aujourd'hui, j'écris et je partage mes idées avec Micki (Richter, le guitariste) alors qu'auparavant, je travaillais avec mon grand ami Thorsten (Bauer, l'ancien guitariste). C'est nouveau, il a fallu que je m'adapte et lui aussi. Je sais que Thorsten est parti pour des raisons personnelles et pas à cause du groupe mais cela a été un moment de transformation. Par contre, j'ai toujours la même énergie, toujours la même envie.
 

« En fait, « Okkult III » est la bande-son de notre société de fous ! »



C'est plus difficile d'écrire trois albums liés ensemble qu'un album seul à la suite de précédents ?
Oui, car il faut garder un fil rouge, un concept qui unifie le tout. Donc, c'est un sentiment très plaisant mais aussi un gros défi. Si le concept fonctionne, ça peut aller même mieux que ce à quoi tu t'attendais, par contre, si le fond ne marche pas, c'est très difficile. Quand tu écris un nouvel album, tu recommences à la première page d'un livre vierge. Cette fois, on commençait sur un livre déjà en partie écrit. Ce n'était pas un nouveau livre mais plutôt un nouveau chapitre. J'ai été très content de relever ce challenge même si je suis ravi de revenir à un rythme un peu plus ordinaire.

Ce n'est pas triste de te dire que ça y est, c'est terminé ?
Oui, alors ce n'est pas encore fini car l'album sort seulement et on a tous les concerts à donner, les tournées à faire. Et puis il y a toujours la fameuse chasse au trésor. Chaque album a une version en or 24 carats caché quelque part et tout le monde peut partir à sa recherche. Cet album contient une chanson bonus, unique. Le premier est en Europe et il est toujours recherché. C'est très excitant car aucun autre groupe n'a fait ça avant. On a même un groupe Facebook avec la chasse au trésor où les gens peuvent échanger leurs idées. Ce n'est pas quelque chose que tu peux télécharger sur Internet ou autre. Tu dois vraiment faire l'effort physique de trouver l'objet et la chanson bonus.

C'est vraiment un concept intéressant et cela doit aider à garder les fans fédérés autour du groupe, non ?
Oui, même si c'est vraiment quelque chose à part. Cette chasse au trésor vit par elle-même. Beaucoup me demandent des indices même s'ils ne sont pas fans d'ATROCITY, ils participent quand même à l'aventure.

Et puis il y a aussi la deuxième partie de l'album, qui est composée des morceaux en version instrumentale. Pourquoi ce choix ?
Je trouve que pour les auditeurs, ça a vraiment un intérêt car par exemple, tu peux y entendre des parties de guitare que tu entends moins lorsqu'il y a le chant. Et puis si les fans veulent faire du karaoké, ils peuvent s'en donner à cœur joie !

Peux-tu nous parler un peu de l'avant-dernier morceau de l'album, "Cypka", qui est différent des autres en ce sens où c'est un titre très narratif, comme une histoire contée ?
Oui, le narrateur est un grand ami à moi et il évolue aussi dans la reconstitution historique viking, dans le même groupe que moi. Mais c'est aussi un fan de metal, un acteur, et il a été dans de nombreuses vidéos metal : AMON AMARTH, KREATOR, SABATON... L'histoire qui est racontée est assez atroce. C'est celle d'un tueur en série qui vendait des morceaux des corps qu'il avait en sa possession au boucher du coin. Il en faisait des saucisses ! Du coup, quand toute l'histoire a été découverte, les gens de la ville étaient terriblement choqués car ils se sont rendu compte qu'ils avaient peut-être mangé de la chair humaine ! Et en plus ça a pris des années avant qu'ils attrapent le coupable ! Le pire, c'est qu'il était tranquillement en train de regarder un film au cinéma, comme si de rien n'était alors que des corps décapités jonchaient le seuil de son salon. C'est fou ! C'est ce dont on parlait avant. L'espèce humaine est vraiment horrible. Qui peut faire ça ? Aucun animal n'aurait cette idée. C'est une histoire bien sûr vraiment extrême à propos du côté sombre de l'homme, mais sur l'album, je traite d'autres sujets aussi, plus occultes, de la recherche de nouveaux territoires, de nouveaux pouvoirs, de nouvel argent... En fait, « Okkult III » est la bande-son de notre société de fous.


Heureusement, la musique nous sauvera tous ! C'est le côté lumineux de l'homme.
Oui, tout à fait. Le metal est une grande communauté et elle est très utile, elle l'a été notamment pendant la période de confinement où beaucoup de gens se sont réfugiés dans la musique. Les gens se sont soutenus à travers le metal et la musique en général.

Il semble qu'ATROCITY a déjà des concerts et des festivals de prévus mais peut-on imaginer un show extrême où vous joueriez les trois albums « Okkult » entièrement ?
Oui, ce serait génial mais je ne sais pas si ce serait possible d'avoir vraiment les trois albums joués dans leur intégralité. Mais un show uniquement basé sur la trilogie « Okkult », oui, je pense que ce serait une bonne idée. Un best of des trois albums, pourquoi pas !

Et y'aura-t-il des invités sur les dates que vous allez donner comme il y en a de nombreux sur l'album « Okkult III » ?
Pas sur une tournée, mais en festival, c'est sûr !

Que peut-on te souhaiter pour cette nouvelle année ?
Qu'elle soit bien meilleure que l'année écoulée car elle a été terrible à de nombreux points de vue. Mais je suis quelqu'un d'optimiste et j'essaye toujours de voir le bon côté des choses. On a la musique, on a le heavy metal, on a des fans fantastiques. Donc je suis confiant, 2023 sera une bien meilleure année que les trois précédentes.

Atrocity.de

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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