4 février 2023, 13:57

ELECTRIC CALLBOY

Interview Kevin Ratajczak & Nico Sallach


Les dernières années ont été plutôt mouvementées pour nos joyeux lurons. En effet, il n’aura échappé à personne que le monde s’est arrêté de tourner un certain temps. Mais, comme si cela ne suffisait pas, le sort semblait s’acharner sur le sextet allemand : le groupe a ainsi dû faire face à un changement de nom, sous peine d’être blacklisté dans certains pays, et à un enregistrement des plus douloureux avec un frontman qui a fini par prendre la porte, laissant derrière lui un album à part dans la discographie si festive du groupe. Mais tout cela c’est du passé et, fort d’un nouveau chanteur foncièrement charismatique, Electric Callboy revient avec sous son bras le génial « Tekkno »​, bande-son parfaite pour vos soirées entre amis. C’est quelques heures avant de monter sur scène, dans un Bataclan plein comme un œuf, que nous avons eu la chance de discuter avec Kevin Ratajczak et Nico Sallach.
 

Malgré toutes vos mésaventures récentes, vous avez réussi à produire un disque de grande qualité et surtout bien plus fun que son prédécesseur. Comment avez-vous fait pour ne pas tomber dans quelque chose d’encore plus sombre que ne l’était « Rehab » ?
Kevin : C’est justement une réponse à « Rehab » et à tout ce que nous venions de traverser. Comme tu viens de le dire, nous avons changé de chanteur – et nous avons de la chance d’avoir Nico avec nous maintenant – ce qui nous a remis le pied à l’étrier. Nous aurions pu faire comme certains groupes et nous cacher derrière une musique plus mélancolique parce que le monde va mal, parce qu’il y a eu des tensions et des changements dans le groupe. Mais, au contraire, quand nous avons commencé a écrire pour « Tekkno », nous étions dans un vibe très positive. Malgré le fait qu’il n’y avait plus de concerts, plus de fêtes, nous étions heureux d’être ensemble et cette bonne humeur se ressent dans les compositions.
Nico : C’est tout à fait ça. Dès que nous arrivions au studio, il y avait toute cette énergie positive. C’est ainsi que des titres comme "Hypa Hypa" ont vu le jour, simplement sur une impulsion positive. A chaque fois que j’arrivais au studio, je me disais « chouette, je vais bosser », alors forcément cela te met dans de bonnes conditions pour faire de la musique fun.
Kevin : Finalement, d’être coincés à la maison n’a pas été une si mauvaise chose car lorsque nous sommes en tournée, il y a tant de choses qui peuvent t’influencer et/ou te distraire que, souvent, tu perds le fil de ton idée. En ayant du temps en studio, tu peux rester focalisé sur ta musique, sur ce que tu vas faire comme essais, laisser reposer l’idée, la reprendre etc... C’était une expérience vraiment plaisante et c’est ce qui fait que « Tekkno » est un album un peu à part dans notre discographie.

Votre changement de nom fait suite à de vives critiques que vous avez essuyées, le terme "Eskimo" étant perçu comme péjoratif pour les Inuits et les Yupiks. Comment avez-vous vécu ce moment ? il paraît évidement que vous ne cherchiez à offenser personnes mais pourtant, les problèmes semblaient commencer à s’accumuler...
Kevin : Suite a ces critiques, nous avons commencé à faire des recherches et ce qui nous est apparu le plus important était de savoir si ces peuplades voulaient qu’on les appelle ainsi. Nous avons fait des vidéos YouTube au sujet de notre changement de nom car nous ne voulions effectivement offenser personne. De plus, il est important de savoir que ce nom "Eskimo" leur a été donné et ce n’est pas leur choix, il était donc important pour nous de le changer. Quand tu penses "Eskimo", tu vois une version romantique du personnage à côté de son igloo, en train de pêcher. Un Inuit, lui peut être ton boss. Ces considérations sont bien plus fortes aux Etats-Unis et au Canada. Nous comprenons qu’en Europe les gens aient été surpris par ce changement, mais il était nécessaire. Évidemment nous avons pensé que ce changement pourrait être dramatique pour la suite, que cela perdrait nos fans, mais au final, c’est cool.

Ce changement coïncide plus ou moins avec l’arrivée de Nico ainsi qu’un retour de la bonne humeur au sein du groupe. Finalement, tout est 100% bénéfique pour vous.
Nico : Même si je n’étais pas dans le groupe au moment de l’écriture de « Rehab », il en ressortait qu’il y avait deux camps. Cinq membres d’un côté et l’ancien chanteur de l’autre. Les titres se sont faits dans la douleur et l’ambiance y est globalement négative.
Kevin : Je ne vais pas dire que « Rehab » est mauvais, mais il n’y a que quelques titres que j’apprécie vraiment et je préfère mille fois l’ambiance de travail sur « Tekkno ». Nous avons écrit l’album ensemble, nous nous sommes amusés en le faisant, nous avons donné des concerts géniaux ensemble. En un mot comme en cent, nous adorons être dans cette situation où tout n’est que du bonheur et de la joie.


Bien que le fun soit prédominant, certains titres, à l’instar de "Mindreader" ou "Parasite", sont quand même plus sérieux...
Nico : Pour chacun des titres de l’album, nous avons composé la musique avant d’écrire les paroles, ce qui peut avoir une influence sur la façon d’aborder le sujet de la chanson. Daniel (Haniß, guitare) a composé ces deux titres par exemple. Nous y avons vu des thématiques plus sérieuses. Le fait d’y retrouver de la hard-tech nous a poussés dans cette direction et nous aimons ces ambiances plus sombres. C’est d’ailleurs ce que j’écoute le plus souvent chez moi.
Kevin : Je rajouterais que nous sommes humains et que nos humeurs peuvent varier d’un jour à l’autre, ce qui implique d’écrire sur des thématiques plus variées que simplement la fête entre amis. Après tu as des groupes qui ne vont jamais changer leur formule et qui ne tenteront jamais la moindre expérimentation. Dans notre cas, nous faisons comme bon nous semble en fonction de nos envies du moment, que ce soit du rap, du metal, du schlag ou de la hard-tech.
Nico : Nous voulons surprendre les gens mais également nous-mêmes. Il y a des groupes comme AC/DC qui ont leur formule, et regarde où ils en sont, c’est l’un des plus gros groupes de tous les temps. Nous voyons notre groupe différent et sans prétention aucune, nous essayons juste de faire ce qui nous semble le plus fun.
Kevin : Nous essayons de rester vigilants et si jamais un riff ou une idée nous semble trop similaire a ce que nous avons déjà fait, nous passons à autre chose. C’est une manière de garder le côté "frais" de notre musique.

Vous avez grandi dans les années 90, époque où nous étions inondés par la dance-music. Pensez-vous qu’inconsciemment cela a joué sur vos goûts actuels ?
Nico : Je le pense, oui, mais pas simplement la musique des années 90. Que ce soit dans les années 80 et même au début des années 2000, il y avait tellement trucs cools sur lesquels danser. Même des influences plus lointaines comme Grease sont importantes. Le plus important c’est de s’amuser.


L’Allemagne, à l’image de Berlin, semble être plus ouverte au mélange des styles musicaux que certains autres pays comme le nôtre...
Kevin : Pas tant que cela mais les mentalités évoluent. Quand nous avons commencé en 2010 et que nous avons intégré des éléments électroniques dans notre musique, on nous a reproché de ne pas faire du metal, que nous détruisions le metal (rire). Alors qu’au contraire, nous ne voulions que mélanger tout ce que nous aimions. Si tu regardes bien, le metal est une évolution de quelque chose qui existait déjà avant, ce genre n’existait pas à la création de la musique. Si tes influences ne te servent qu’à répéter la même chose sans évoluer, cela va vite devenir ennuyeux.
Nico : Les exemples d’évolution sont nombreux, à commencer par BRING ME THE HORIZON ou encore ARCHITECTS. Ils ont complètement changé leur façon de faire du metal afin de proposer quelque chose de nouveau.
Kevin : Le problème, c’est que les gens brandissent le metal ou la techno comme étant leur identité sans chercher a s’exprimer a travers la musique qu’ils aiment. Je te rassure, je l’ai fait aussi étant adolescent. Je prenais le catalogue de vente par correspondance et je commandais les T-shirts les plus badass pour le style alors que je ne connaissais pas le groupe (rire). J’ai eu quelques mauvaises surprises quand par la suite j’ai écouté les groupes en question. Maintenant j’écoute ce qui me procure une émotion, ce qui sonne bien a mes oreilles. Et il n’y a aucune limite du moment que le plaisir est là.
Nico : C’est d’ailleurs amusant car ELECTRIC CALLBOY mélange ce que certains aiment le plus avec ce qu’ils détestent le plus. Par principe ils vont détester sans même nous avoir écouté ou vu en live. Je trouve cela dommage de rester dans sa "bulle" mais cette mentalité est encore bien présente malheureusement.

On peut voir que ce n’est pas le cas de tout le monde car, en entrant, j’ai pu voir autant de true metalheads que de teufeurs à bandeaux rose fluo...
Nico : C’est vrai que nos fans sont pour le moins éclectiques. Il est amusant de voir que nos fans issus de la scène techno n’écoutent pas de metal en dehors mais adorent notre groupe alors que certains passages sont franchement énervés.
Kevin : De même, il n’y a pas de limite d’âge, hier les gens sont même venus en famille nous voir. Le plus important reste le plaisir procuré et que nous prenons chaque soir sur scène.

Cette cohabitation pourrait avoir "Hurrikan" comme bande son.
Kevin : Ce titre est un mélange improbable entre du schlag et du deathcore. Pour le coup, il s’agit vraiment d’une parodie car pour écouter du schlag il faut vraiment être bourré (rire) !
Nico : Elle est très cool a faire en live car les gens commencent à danser avant de se rentrer dedans (rire). En Allemagne, nous avons une danse du nom de disco-fox et c’est ce que le gens font sur les quarante premières secondes du titre avant que cela ne parte en wall-of-death. C’est une vraie expérience (rire).

Un dernier mot sur cette tournée qui est quasiment sold-out partout où vous passez...
Kevin : Avec l’arrivée de Nico et ce nouvel album ultra festif, nous avons gagné de nombreux fans qui sont prêts a faire la fête avec nous. Nous sommes donc très motivés pour la suite. Nous avons déjà commencé à travailler sur le prochain album qui réservera son lot de surprises. Un grand merci à toutes les personnes qui nous suivent et qui nous donnent autant d’amour.
Nico : Merci Kevin et surtout merci à vous tous de répondre présent chaque soir, on vous aime !
 

Blogger : Julien Meurot
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