
Après dévoilé il y a quelques semaines une vidéo de plus douze minutes, "Attaque le Soleil", qui augurait du meilleur pour la suite de l’aventure, FANGE passe aujourd’hui à table avec dans son panier l’intégralité du cinquième album : « Privation ». Un titre bien peu à propos tant les gourmands de ce genre, calé quelque part entre le sludge, l’indus’ et le death metal, vont une nouvelle fois faire bombance autour d’un solide menu composé de sept morceaux débités en une quarantaine de minutes savoureuses. Il faut dire que le quatuor rennais n’a pas son pareil pour faire saliver l’amateur de sensations fortes à grand renfort de noirceur et de ténèbres. Et cela fait déjà une décennie que cela dure, mine de rien.
"Hypnotique et imposant donc, ce plat du jour démarre sans passer par la case apéro avec "A la Racine", un morceau pesant aux ambiances opaques, nappé de guitares accordées à la scie sauteuse. Un peu comme si Gavin Ward et Barry Thomson de BOLT THROWER se tapaient la cloche en s’envoyant l’intégrale de DEAD WORLD à fond les ballons par un froid polaire : une entrée en matière qui laisse les joues rougies. Comme une mandale que Dolph Lundgren administrerait sans retenue. Mais cela n'est qu'un avant-goût de ce qui vous attend avant d’encaisser les rythmiques-centrifugeuse que déroulent "Les Crocs Limés" ou "Enfers Inoculés". Bienvenue en enfer, ici les dissonances sont érigées en ligne de conduite aux côtés des vocalises arrachées, c’est un euphémisme, de Matthias Jungbluth. Le patron du label Throatruiner alternent tout au long de l’album des raclements de gorge passés au papier émeri avec des vocalises plus sournoises, plaintives.Et ses petits camarades ne sont pas en reste, envoyant de gros riffs vrombissants avec doigté comme pour mieux installer une ambiance de fin du monde prémonitoire. La boîte à rythmes, désarticulée et menaçante fait elle, office de pousse-café histoire de laisser place nette avant de dérouler le final haletant qu’est "Extreme-Onction"... qui laisse comme un goût de metal derrière les amygdales. Il paraît que dans la chaleur de ses fourneaux, le chef n'a pas son pareil pour exciter les papilles...
Vous l'aurez compris, ce cinquième album des rennais enregistré et mixé par Cyrille Gachet, est de ceux qui ne prennent pas de gants pour faire défiler les plats. A l’instar d’un repas bien chargé en lipides et prompt à boucher les artères de n’importe quel goinfre en devenir, « Privation » recèle cependant de petites surprises à chaque bouchée et derrière cette épaisse couche de charbon propice à une cuisson diabolique se cachent de juteuses réjouissances. Comme ces interventions délicates de Cindy Sanchez sur "Né pour Trahir" ou Cédric Toufouti (HANGMAN’S CHAIR) sur "Portes d’Ivoire" qui démontrent tout le savoir-faire d’un collectif Top Chef qui n’a que faire des étoiles. A quoi bon… puisqu’il a une fois encore décroché la lune ?