Et voilà, dix ans de carrière discographique pour ce qui est devenu un groupe incontournable de la scène black metal norvégienne. Une décennie que le MORK du multi-instrumentiste Thomas Eriksen a passé à nous proposer une musique toujours plus prenante, toujours plus brute, du true black hypnotique, personnel et transcendant. Avec un sixième album intitulé « Dypet », on plonge cette fois dans les tréfonds d'une pensée morose, d'émotions intenses. Avec huit titres sur lesquels souffle un blizzard glacial, ce nouvel album arrive à point nommé dans un monde au bord de l'apocalypse, où règnent haine et colère, sources de confrontation mais aussi d'inspiration.
« Dypet » commence par l'évocation de démons intérieurs avec "Indre Demoner", un morceau à l'intro angoissante et au riff sinistre qui se poursuit en frénésie dissonante avec les vocaux caverneux bien connus de Sieur Eriksen. Suit ensuite le lent et lourd "Forført Av Kulden", au rythme pesant, aux guitares cathartiques et aux vocaux incantatoires. Un titre complètement envoûtant, on pourrait presque dire fédérateur, même si on, ne vous y méprenez pas, on reste dans du true black sérieux. "Svik" est plus rythmé, plus mélodique aussi, plus lumineux ? Non n'allons pas jusque là, mais en tous cas, l'ensemble est bien plus heavy que les morceaux précédents, avec toujours cette qualité artistique que MORK met un point d'honneur à conserver.
"Et Kall Fra Dypet" porte bien son nom car il semble être un réel appel provenant des abysses avec un tempo plus rapide cette fois et des guitares acérées pour mieux nous entraîner dans le tourbillon trouble des profondeurs insondables. Un break extrêmement pesant aux vocaux growlés vient ensuite entamer une deuxième partie de morceau glaçante. Cthulhu ne semble pas loin... "Høye Murer" profite de la présence de Hjelvik, ancien chanteur de KVELERTAK et on peut dire que le duo vocal fonctionne à la perfection pour créer une atmosphère toujours plus hostile et pétrifiante. Un riff répétitif et un charisme sans faille sont les clés de voûte d'une chanson que l'on peut qualifier de diamant brut.
"Bortgang" est quant à lui très true-black, classique, efficace, à la fois old-school et typé, avec un solo percutant. Le brutal "Avskum" se veut agressif, belliqueux, sans concession. A nouveau un black incisif aux riffs cinglants, impressionnant de puissance et d'une noirceur intense. Enfin "Tilbake Til Opprinnelsen" termine sur une note plus inhabituelle grâce à des claviers finement introduits sur des blasts omniprésents et une basse mise en avant. Pas vraiment un retour aux sources mais plutôt une ouverture sur un univers différent mais tout aussi lugubre.
Avec ce sixième disque, MORK nous confronte à nos pires démons, à nos sentiments les plus hostiles, les plus sincères peut-être aussi. « Dypet » présente un true black authentique mais raffiné, une musique qui sort des tripes et qui emporte l'âme. Thomas Eriksen a toujours fait preuve de sincérité et de dévotion dans ses compositions pour nous présenter le meilleur de lui-même. Et il fait mouche à chaque fois. Il semble que rien ne puisse ébranler la machine tant la qualité de ses albums touche au summum de l'art norvégien. Encore un indispensable de toute discographie extrême.
