
« Black Medium Current » est le sixième album des avant-gardistes norvégiens DØDHEIMSGARD et s’il s’est passé huit années depuis leur dernier excellent album en date « A Umbra Omega », on peut dire que c’est pour la bonne cause tant les neuf nouveaux titres de black metal progressif du groupe sont d’une qualité inéluctable. Si le concept tourne autour du déterminisme et son pendant le libre-arbitre, l’ensemble oscille entre minimalisme et richesse, que ce soit artistiquement ou musicalement. DØDHEIMSGARD sait faire vivre le son qu’il dégage, il sait faire vivre à son auditoire une expérience introspective tout en se gardant bien de l’enfermer dans un monde de conformité. Ce que le groupe veut, c’est explorer de nouveaux horizons, repousser les limites, inciter au recul et sa musique presque inclassable est une véritable pépite pleine de surprises.
Les atmosphères sont très présentes, notamment sur le magnifique "Et Smelter" qui ouvre « Black Medium Current » sur des arpèges lents de guitare acoustique surmontés de claviers cosmiques et d’une voix claire et murmurée de toute beauté. Les 10 minutes du morceau font bien sûr aussi la part belle à des riffs rapides et des rythmes blastés, car l’essence de DØDHEIMSGARD, ne l’oublions pas, est tout de même le black metal. Mais l’ensemble reste mélodique, épique aussi et complètement mélancolique. Ce qui peut sembler incompatible est d’une fluidité intrigante et fédératrice ici. Une excellente entrée en matière. Un morceau comme "Interstellar Nexus" est quant à lui bien plus psychédélique, plus déstabilisant. Le côté dissonant est omniprésent ainsi que l’electro théâtral, percutant. Au contraire, "It Does Not Follow" par exemple est très rock, groovy à souhait, toujours avec une expérimentation vocale et musicale en point de mire, pour ne jamais laisser l’auditeur redescendre.
Mais pas d’inquiétude à nouveau, les blast beats et les growls reprennent vite leurs aises au sein d’une chanson aux riffs captivants. Et puis il y a également l’interlude "Voyager", au piano et chant, dont l’intitulé représente tout à fait la sensation que l’on a à son écoute. Entre black metal atmosphérique ("Halow") et true black old-school ("Det Tomme Kalde Morke"), la deuxième partie de l’album suit la même veine rouge sang que les premiers titres. La chanson "Abyss Perihelion Transit" restera un des hymnes de « Black Medium Current » avec une grande variété d’ambiances, représentative de l’avant-gardisme de DØDHEIMSGARD. Enfin, le funeste "Requiem Aeternum" au piano et complaintes dissonantes referme un album digne d’une pièce de théâtre cathartique dans laquelle on plonge avec curiosité sans jamais ressentir l’envie de s’en libérer.
« Black Medium Current » est définitivement un album à vivre, à ressentir, à contempler. Le black metal avant-gardiste de DØDHEIMSGARD peut être dérangeant mais il est toujours sincère. Pour les plus fervents défenseurs de l’exploration musicale parmi vous, n’hésitez pas à l’écouter en pleine conscience pour découvrir toutes les couches cachées sous une musique d’un premier abord originale, mais tellement plus intense et profonde au fur et à mesure des écoutes. A déguster sans modération.