13 avril 2023, 22:58

METALLICA

"72 Seasons"

Album : 72 Seasons

Chaque nouvelle sortie de METALLICA est le sujet de très (trop ?) nombreuses discussions.
Alors soyons clair d'emblée au moins sur ce point : "72 Seasons" n’est pas le meilleur album du groupe.
En revanche, il est impossible de prendre à défaut son authenticité. Peut-être trop authentique, même.
Revenons plus de 20 ans en arrière pour une mise en situation. 
Début des années 2000, le groupe est proche de l’implosion. James Hetfield, plus alcoolique que jamais, ne sait plus où il en est. Ses compères ne sont guère en meilleure forme, ce qui conduira à l’éviction de Jason Newsted.
Pour en juger, plongez ou replongez dans l’excellent documentaire "Some Kind Of Monster", mais analysons malgré tout certains faits : le groupe, alors en plein doute, commence au Presidio l’écriture et l’enregistrement de ce qui deviendra "St Anger".
Les compos sont alors expérimentales, répétitives, le cœur a vif. Trop aux yeux du père de Lars Ulrich qui, donnant son avis, implore "d’effacer tout ça". A n’en pas douter, le producteur de l’époque Bob Rock le pense tout autant, mais son avis ne comptera qu’après. Quelques années - et une thérapie en chemin - donneront raison à Torben Ulrich ; "St Anger" est un disque, certes mal aimé, mais il est l’instantané authentique et rempli de colère d’un groupe qui y aura finalement trouvé son second souffle. 

Deux décennies plus tard, nous voici confrontés à une situation assez similaire.
Notre almighty James Hetfield, colosse aux pieds d’argile, s’effondre de nouveau. Pour des raisons qui lui sont personnelles, les affres du passé sont de retour.
Il suffit de le voir sur le concert du "S&M2" : son corps est là, mais son esprit est ailleurs. Il n’est alors guère surprenant de le voir entrer en cure de désintoxication peu de temps après. S’ensuit un divorce, et donc une totale remise en question.
Avant d’être le surhomme de la scène, James Hetfield est juste un homme, comme vous et moi.

Tout cela pour dire quoi ?
Le simple fait que sans être un "St Anger 2", "72 Seasons" est la bande son de ces dernières années, avec toutes ses forces et ses faiblesses.
Qui dit forces et faiblesses, dit aussi objectivité et subjectivité. Premier constat : l’album est trop long, répétitif. Il aurait été facile d'en couper 15 à 20 minutes sans difficulté.
Les mélodies ne sont pas les plus incroyables de leur discographie et encore moins mémorables en un claquement de doigts. La production est même légèrement inférieure à celle de "Hardwired...".
Autant de temps pour un résultat mi-figue mi-raisin. Nous l’avons bien constaté dans les premières réactions à la sortie des singles : l’accueil est assez mitigé.
Mais - et c’est là que la subjectivé rentre en compte - qu’importe la technique, si la musique ou les paroles trouvent un écho en soi.
Ce fut le cas de "St Anger", une fois "Some Kind Of Monster" dévoilé : les fans ont compris ce que voulait exprimer ce disque. Eh bien, nous en sommes au même point aujourd'hui. 
"72 Seasons" est un disque honnête et plein de qualités, ou du moins de bonnes intentions, son problème majeur étant le manque de producteur.
Certes, Greg Fidelman bosse avec le groupe depuis presque 15 ans, mais il ne sait pas dire "non" à METALLICA (n’oublions pas que dans ces 15 années se glisse... "Lulu"). Là où un Bob Rock savait s'imposer et argumenter, Fidelman semble céder à toutes les exigences avec, au final, un album de 77 minutes perdant clairement en efficacité. D’ailleurs, dès que les titres dépassent les 5 minutes, les répétitions inutiles surgissent, à l'exception d'une chanson sur laquelle je vais revenir.

Une fois le contexte posé, que vaut réellement ce onzième album de METALLICA ? Pour simplifier sans verser dans une réponse de Normand, il n’est pas si mal, sans être excellent parce que, là encore, l’objectivité et la subjectivité se télescopent.
Certaines longueurs plombent des titres comme "Sleepwalk My Life Away" ou le single "If Darkness Had A Son”, mais au contraire exacerbent le sentiment d’étouffement que peut provoquer une chanson comme "Crown Of Barbed Wired". Ce dernier donne littéralement l’impression que cette satanée couronne pèse également sur notre propre tête.  On y retrouve énormément de références à cette bonne vieille NWOBHM que Lars Ulrich et James Hetfield affectionnent tant. Mais cela reste cohérent avec le propos du groupe : après tout, nous sommes dans les 18 premières années de nos vies (72 saisons), celles qui nous construisent, et c’est précisément cette musique qui a majoritairement façonné METALLICA. Que ce soit sur l’ultra efficace "Lux Aeterna" ou "Too Far Gone?", cette influence est revendiquée et totalement assumée.
Le disque est aussi plus collaboratif. Trop souvent vu comme le "petit nouveau", Robert Trujillo fait partie intégrante du groupe depuis 20 ans maintenant et sur ce disque, il trouve enfin l’espace nécessaire pour s’exprimer.
Intro heavy ("Sleepwalk My Life Away"), backing vocals appuyés et virils ("Chasing Light”) ou encore pont de folie (“Inamorata”), il est enfin à sa place et utilisé à bon escient. 
Le reste de la troupe n’est d’ailleurs pas en reste avec certaines fulgurances, à commencer par son leader dont la solidité du poignet droit n’aura jamais failli au cours du temps.
Ses lignes vocales sont également assez surprenantes par moment, puisant autant dans un passé pas si lointain ("You Must Burn !" et ses arrangements "Load"/"Reload"), que dans des contrées plus récentes ("72 Seasons" et son refrain bien pensé façon "Hardwired…".) ou encore dans une efficacité aussi simple que percutante ("Sleepwalk My Life Away" et son "wake me" à faire soulever un stade). Kirk Hammett, quant à lui, arrive par moments à lâcher sa wha-wha, pour nous offrir des soli plutôt agréables et délivre même une séquence de bravoure sur ce même "Sleepwalk My Life Away", qui risque d’être retors à passer en live.
Last but not least, le dernier des cavaliers, le gardien du temple, Lars Ulrich. Sa prestation reste toujours aussi "personnelle" et bien qu’il soit en permanence montré du doigt, son jeu (tout le monde le sait, tout est retaillé en studio) et sa créativité restent au service du collectif. Sans lui, pas de METALLICA.
…Mais terminons avec la dernière et plus longue chanson jamais écrite par les Californiens : "Inamorata". CE titre est LE titre de "72 Seasons". Alors que vous serez rincés par les 66 premières minutes, l’intro menaçante de ce dernier, couplée à l’un des meilleurs riffs de l’album, vous fera relever la tête. Le chant mélodique - mais pas que - de James Hetfield vous fera tendre l’oreille, le coté KILLING JOKE vous fera ouvrir les yeux, son pont que l’on qualifiera de jazzy vous interloquera, sa montée en puissance vous galvanisera et au final, il ne nous reste plus qu'à espérer une seule chose : que ce titre fasse partie de la setlist, tant il est imparable. 
En conclusion ?

"72 Seasons" est un disque authentique et sincère. Il y aura toujours deux niveaux de lecture. Objectivement : il est loin derrière les meilleures productions du groupe. La faute à un manque de recul, à l’absence d’un producteur suffisamment autoritaire et à une souffrance intérieure trop étouffante chez l'un des membres essentiels du groupe. Subjectivement : chacun se fera son avis, car ce disque ne se juge pas en une écoute. Ni même en dix.
Pour beaucoup James Hetfield a été - et est encore - un héros que rien ne peut mettre à terre, mais il incarne autant les forces que les faiblesses de METALLICA. "72 Seasons" est, en cela, un livre ouvert, un instantané de vie comme le fut "St Anger" par le passé.
A prendre ou à laisser.

Blogger : Julien Meurot
Au sujet de l'auteur
Julien Meurot
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1 commentaire

User
Mat
le 14 avr. 2023 à 14:21
toujours autant de complaisances avec ce groupe qui n'a rien sorti de correct depuis 91 !!!
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