14 avril 2023, 23:59

BETIZFEST (Jour 1)

@ Cambrai (Palais des Grottes)

Pour son vingtième anniversaire, le BETIZFEST proposait les 14 et 15 avril une affiche alléchante, fidèle à ses deux racines, punk et metal.

Le vendredi était le jour des crêtes... même si elles ont quasi disparu du paysage. BARE TEETH, dès 18h30, lançait les débats devant une foule clairsemée et avec un poulet en plastique accroché à un pied de micro. Difficile d’écrire que les absents ont eu tort car les Lillois ont proposé un set certes sympathique mais loin d’être mémorable tant leur punk-rock aux légers reflets hardcore est assez banal. Les compositions, chantées en anglais, évoquent parfois NOFX. Le chanteur tente de réveiller le public avec un « faites du bruit pour les SATANIC SURFERS ! »... qui ne trouve guère d’écho. Quand il précise que le bassiste, « dont c’est la dernière avec nous ce soir, va être saoul », celui-ci s’offusque et précise : « comme après chaque concert » en une touche d’humour bienvenue.


Comme le Palais des Grottes n’abrite qu’une scène, une demi-heure sépare les concerts. Ce laps de temps est parfait pour flâner au stand de merchandising, faire le plein de jetons nécessaires à l’achat de boissons ou admirer les œuvres des graphistes présents, voire se faire photographier en mode rock au guidon d’une antique moto...

Vient ensuite la bonne surprise de cette première journée. GRADE 2, jeune trio de l’île de Wight, a livré un set old-school riche de toutes les variations punk. A l’aise face au public, à qui il communique les paroles de "Murder Town" pour lui permettre de l’accompagner, le chanteur-bassiste Jack Chaltfield est un mélange de colère et d’élégance toute britannique. Les morceaux, principalement issus de leur dernier album, sont courts, dynamiques et portés par une basse très présente, comme sur l’inaugural et efficace "Judgement Day". Tantôt oï, tantôt plus mélodiques ("Fast Pace"), souvent groovy ("Feel The Rythm", exhorte le leader, tout sourire) ces compostions sont de petites pépites, comme le très beau "Celine". Les premiers pogos du festival et les premières envolées de crowdsurfers confirment la qualité de la prestation, la dernière de la tournée des Anglais.


Après la joie intense d’avoir découvert une formation talentueuse, arrive le plaisir simple de retrouver un groupe bien connu, fréquenté depuis de longues années. LES WAMPAS sont comme un ami que l’on voit à intervalles réguliers, avec qui on est sûr de passer une excellente soirée. Et, en ce 14 avril, l’icône Didier Wampas est dans une forme olympique, même s’il s’emmêle parfois dans les paroles... mais qu’importe : un concert punk n’est pas une représentation de la Comédie Française ! Il livre une performance haut de gamme, même pour lui, habitué d’un engagement total lors de ses sorties scéniques. Il traverse de part en part la salle, porté sur sa chaise par les fans comme le veut la tradition sur "Les Bottes Rouges", joue au milieu de la foule debout sur un baril, invite, comme toujours, des enfants pour "Ce Soir C’est Noël", se transformant en un Jacques Martin décalé pour faire dire à un gentil p’tit bonhomme que son père est alcoolique ! Autocollant CGT bien visible sur sa guitare, il est la locomotive d’un train aux wagons disparates mais complémentaires à l’image des deux guitaristes, le jeune Effelo Wampas et le vénérable Tony Truant, vêtu d'une veste bordeaux orné d’un dragon chinois, assorti à ses chaussures.


L’étrange équipage délivre trois titres de son dernier album – "Tempête, Tempête", "Frontignan Blues" et "L’avocat" – qui prouvent que la qualité d’écriture est toujours là. Dans une ambiance de folie bon enfant, familiale, devant une fosse aux anges, LES WAMPAS s’appuient sur une set-list variée en béton armé. Du mégatube "Manu Chao" aux bouleversants "Punk en Hiver" et "Rimini" qui enchante deux gaillards vêtus l’un d’un maillot jaune, l’autre d’une tunique à pois, l’heure de concert défile à la vitesse d’un TGV un jour sans grève. La magie toujours intacte qui émane de ces chauve-souris légendaires tient dans les frissons qui nous gagnent, dans l’émotion qui nous envahit tant l’honnêteté, la pureté presque, brille dans chacun des mots, dans chacun des gestes de ce Didier... qui indéniablement a du chien. Bien après la fin de "C’est Juste une Petite Voix", la foule ne cesse de scander l’immortel « Didier Wampas est le roi ». Magique.


Difficile pour LES SHERIFF de passer après une telle tornade. Assez statiques, les Montpelliérains (comme le rappelle le morceau "A Montpellier") concentrent leur show sur leur dernier album « Grand Bombardement Tardif », sans négliger leurs classiques, titres emblématiques de la fin des années 80, épisodes glorieux de la grande histoire du punk/rock alternatif français. Les chansons récentes, comme "Du Rock'n'Roll dans ma Bagnole », tiennent la route, énergiques, basiques, directes, comme le veut la tradition des pistoleros, héritiers des Dickies. Surgit toutefois une légère inclinaison metal ("Soleil de Plomb" ou "Loin du Chaos") qui se marie à merveille aux tempos rapides imposés par la batterie. Avec les années pointe une certaine nostalgie, comme sur "Le Temps est Elastique" ou le presque pop "Ma Lumière"... Les fans s’en donnent à c(h)oeur joie sur les incontournables, tels "A Coup de Batte de Baseball", "Pendez-les Haut et Court", "3,2,1... Zéro" ou "Bon à Rien", qu’Olivier, sans cesse accroché à son micro, et sa voix chantante introduisent par un « J’ai allégrement passé la cinquantaine et je suis toujours un bon à rien ! ». Le chanteur a cette manie, un peu agaçante car répétitive, de lancer la plupart des chansons en récitant les vers du refrain, ce qui n’empêche pas les Sudistes de livrer un set plaisant... mais manquant sans doute de folie et d’urgence.


Alors que certains festivaliers ont déjà quitté les lieux, les SATANIC SURFERS montent sur scène. Après la venue récente de NO FUN AT ALL au Black Lab, dans le cadre du Warm-up du Betiz, le skate-punk suédois fait coup double dans les Hauts-de-France. Emmené par le chanteur-batteur Rodrigo Alfaro et porté par la fougue de Andy Dahlström, casquette à l’envers et son de basse bien en avant, les Nordiques s’appuient sur leur classique « Hero Of Our Time » (1995) et proposent aussi quatre extraits du plus récent « Back From Hell » (2018) pour asséner leurs compostions où se mêlent mélodies et adrénaline, soli ("The Usurper", en ouverture) et brusques changements de rythme, efficacité et complexité ("Catch My Breath"). Les cinq gaillards, qui semblent ravis de se produire sur scène, s’aventurent même sur du blues-rock ("Paying Tribute"). Les deux guitaristes, dont l’un, sympathique initiative, porte un t-shirt BARE TEETH, n’hésitent pas, sourires aux lèvres, à prendre des poses typiques metal. Malgré la qualité et l’envie des musiciens, malgré la réponse furieuse des adorateurs du gang qui se livrent à des pogos endiablés, le salle se vide... et le rappel n’est guère réclamé. Beaux joueurs les Surfers Sataniques reviennent malgré tout pour asséner un excellent "Head Under Water", conclusion d’une première journée de qualité, marquée au fer rouge par la prestation insensée des WAMPAS, qui auraient sans doute mérité de décrocher la tête d’affiche.

Jour 2

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK