3 juin 2023, 20:34

Einar Solberg

"16"

Album : 16

Confession toute en délicatesse, c’est ainsi que l’on pourrait décrire « 16 », le premier album solo d’Einar Solberg, auteur-compositeur et interprète hors-pair de LEPROUS. En effet, le chanteur revient sur ces moments, entre sa seizième et sa dix-neuvième année, où il a vécu des épreuves qui marquent à jamais et font prendre conscience que la vie n’est pas toujours belle, mais qui font grandir aussi.

Pour sa toute première escapade longue durée en solo, Einar Solberg a su s’entourer de musiciens talentueux aux horizons divers, afin de ne fixer aucune limite à sa créativité, et si quelques titres (ainsi que sa voix reconnaissable entre mille) font penser à LEPROUS, on est bien loin de l’univers du groupe principal de l’artiste. Autre fait notable : alors qu’il est, à peu de choses près, le seul maître à bord au sein de LEPROUS, Einar, à cette occasion, a privilégié les compositions collaboratives avec tous ses invités, qui ont pu ainsi marquer ces chansons de leur empreinte, leur donnant, pour certaines, des couleurs pour le moins surprenantes, voire carrément déroutantes. C’est le cas de "Home" et son break rappé proposé par Ben Levin de BENT KNEE, "Blue Light" et sa touche jazzy/soul, avec Asger Mygind de VOLA, ou de "Grotto" avec Magnus Børmark de GÅTE.

L’album commence en douceur avec le titre éponyme, "16", composé avec Raphael Weinroth-Browne, l’excellent violoncelliste qui collabore depuis déjà plusieurs années avec LEPROUS. Très beau morceau, où l’émotion affleure pudiquement. "Remember Me" dans un style rock et sombre, ainsi que "A Beautiful Life", plus pop et lumineux, possèdent de belles envolées lyriques dont Einar a le secret. On s’y attend, mais l’effet file toujours autant de frissons. Et si le vocaliste use et abuse parfois de son falsetto, on ne peut qu’admirer la technique impeccable et la sincérité qui se dégage de chacune de ses notes. Plus expérimental, "Where All The Twigs Broke", écrit avec Heidi Solberg Tveitan (STAR OF ASH), la sœur d’Einar, également épouse d’Ihsahn, rappellera avec bonheur les débuts avant-gardistes de LEPROUS aux fans de la première heure, avec ce grain de folie jouissif caractéristique de l’époque. "Metacognitive", toujours avec Raphael Weinroth-Browne, ramène au présent dans une ambiance un poil angoissante qui évoque les récents travaux du groupe. Ambiance renforcée avec son mantra « Get Me Out Of Here » répété tout au long de la chanson, et le violoncelle de Raphael.

Viennent ensuite "Home", "Blue Light" et "Grotto", déjà évoqués plus haut, les trois chansons les plus différentes de tout ce qu’a pu faire Einar Solberg jusqu’à présent. Il sort carrément de sa zone de confort, pour un résultat plutôt réussi, même s’il faut un certain nombre d’écoutes pour les apprivoiser. Certains resteront dubitatifs, quand d’autres crieront au génie. On peut juste reprocher un léger manque de cohérence dans la continuité de l’album, tant on a l’impression que cela part dans tous les sens. Lorsque vient "Splitting The Soul", la collaboration avec Ihsahn, on se dit que l’on va vivre un grand moment, comme à l’époque de "Thorn" sur l’album « Bilateral » (2011) ou "Contaminate Me" sur « Coal » (2013), et l’on a bien raison. Car l’alchimie entre les deux beaux-frères est toujours aussi palpable. "Splitting The Soul" est un morceau intense, à mi-chemin entre le côté cinématographique apporté par les cordes et la puissance du black metal qui donne une sensation de malaise rampant. Un excellent titre !

"Over The Top" est le bienvenu après cela, avec son piano mélancolique. Le calme après la tempête. Et surtout, cela permet d’apprécier la voix de poitrine grave et profonde d’Einar Solberg, qu’il n’exploite pas suffisamment, à mon humble avis, et qui recèle tout autant de richesses et de subtilités que sa voix de tête. Ce premier chapitre en solo s’achève sur le titre le plus long et progressif (plus de onze minutes) de l’album, "The Glass Is Empty" : une composition épique écrite avec Tóti Guðnason d’AGENT FRESCO, et une véritable réussite, tant elle délivre un millier d’ambiances différentes qui pourtant se croisent, s’entrecroisent et se marient à merveille. On en revient à cet aspect cinématographique très prégnant, comme la musique d’un film. Le film d’un morceau de vie qui exprime ses peines, ses douleurs, ses incompréhensions, ses joies et sa renaissance à travers la musique, bien mieux que ce que les mots pourraient les décrire.

Soutenu par des musiciens exceptionnels (Tor Egil Kreken à la basse, Keli Guðjónsson absolument formidable à la batterie et Chris Baum au violon, entre autres), c’est un bien bel album qu’Einar Solberg nous offre-là. L’artwork et l’aspect visuel a été confié à sa compagne, Elena Sihida, tandis qu’Adam Noble (PLACEBO, BIFFY CLYRO, NOTHING BUT THIEVES, LEPROUS...) s’est occupé du mixage et Robin Schmidt du mastering. Entre pop, rock, progressif, ambiances expérimentales ou cinématographiques, le chanteur s’est autorisé la liberté de créer sans limite, sans frontière, afin d’explorer tous les possibles. Et même si certains titres sont plus réussis et accrocheurs que d’autres, nous sommes curieux de voir ce que deviendra ce projet à l’avenir, s’il va évoluer et grandir, en parallèle aux travaux de LEPROUS.

Blogger : Sly Escapist
Au sujet de l'auteur
Sly Escapist
Sly Escapist est comme les chats : elle a neuf vies. Malgré le fait d’avoir été élevée dans un milieu très éloigné du monde artistique, elle a réussi à se forger sa propre culture, entre pop, metal et théâtre. Effectivement, ses études littéraires l’ont poussée à s’investir pendant 13 ans dans l’apprentissage du métier de comédienne, alors qu’en parallèle, elle développait ses connaissances musicales avec des groupes tels que METALLICA, ALICE IN CHAINS, SCORPIONS, SOUNDGARDEN, PEARL JAM, FAITH NO MORE, SUICIDAL TENDENCIES, GUNS N’ROSES, CRADLE OF FILTH, et plus récemment, NIGHTWISH, TREMONTI, STONE SOUR, TRIVIUM, KILLSWITCH ENGAGE, ALTER BRIDGE, PARKWAY DRIVE, LEPROUS, SOEN, et tant d’autres. Forcée d’abandonner son métier de comédienne pour des activités plus «rentables», elle devient tour à tour vendeuse, pâtissière, responsable d’accueil, vendeuse-livreuse puis assistante commerciale. Début 2016, elle a l’opportunité de rejoindre l’équipe de HARD FORCE, lui permettant enfin de relier ses deux passions : l’amour des notes et celui des mots. Insatiable curieuse, elle ne cesse d’élargir ses connaissances musicales, s’intéressant à toutes sortes de styles différents, du metalcore au metal moderne, en passant par le metal symphonique, le rock, le disco-rock, le thrash et le prog. Le seul maître-mot qui compte pour elle étant l’émotion, elle considère que la musique n’a pas de barrière.
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