
Alors que l’été part se faire dorer égoïstement la pilule dans les terres helléniques ou hispaniques, et qu’ici, dans certaines régions, on ressort pull et appareil à raclette, on s’écoute du black metal de saison. Bienvenue en "canipull", et pour occuper nos soirées devant la cheminée je propose le nouvel album de BLACKBRAID, sobrement nommé « Blackbraid ll ». BLACKBRAID, inconnu pour beaucoup, né début 2022 et dont voici le deuxième album, est le projet solo de Jon S Krieger, qui n’est ni norvégien ni suédois, il est amérindien et est également connu sous son pseudonyme Sgah'gahsowáh (je propose qu'on garde Krieger pour les interviews), un nom mohawk signifiant "le faucon sorcière". Direction les Adirondacks pour une cérémonie de la petite fumée, parfumée au black metal.
Quand ça commence avec des cordes tribales et sèches ça augure souvent du meilleur. "Autumnal Hearts Ablaze" précède "The Spirit Returns", au cœur rythmé par un black metal chaud et frénétique. Les riffs grattent la terre noire des contrées embrumées de l’Amérique du Nord, le growl avec ses saveurs goudronnées nous transporte sensuellement dans un roulis de drakkar, nous voilà très bien partis pour une quête sonore extrême de toute beauté que ne renierait pas EMPEROR. "The Wolf That Guides The Hunters Hand" explose dans une gigue païenne et sauvage, batterie malmenée, basse hypnotique et hurlements de chant d’enfant excommunié. BLACKBRAID est une fresque violente pleine de grâce qu’il s’agit de faire sienne. Apprivoiser le faucon en quelque sorte, pour planer divinement avec lui.
"Spells Of Moon And Earth" nous bouleverse avec ses cordes acoustiques et ses flûtes. Un one-man band qui peint de l'épique, BATHORY me direz-vous ? Oui, il y a des bouts d’âme de Quorthon entre les parois du tepee. "Moss Covered Bonnes On The Altar Of The Moon" monte en puissance sobrement mais inexorablement, balancement des riffs, claquement des basses, jusqu’à une apogée où les loups hurlent à la Lune. Tout simplement magistral. "A Song Of Death On Winds Of Dawn" poursuit dans le classicisme absolu de l’œuvre musicale viking, les guitares s’envolent tandis que la rythmique martèle sauvagement les oreilles de l’auditoire. Ambivalence dans l’équivalence des maîtres du genre. BLACKBRAID installe une réelle atmosphère sonore et païenne avec des breaks épiques et folk à souhait, le plaisir du fan que je suis est total !
Avec "Celestial Passage" nous voguons en plein Nordland, avant que "Twilight Hymn Of Ancient Blood" ouvre sa bouche growlesque pour un combat langoureux contre les musiques convenues. Des vagues de riffs offensifs déferlent, des tambours sont martelés jusqu’à plus soif, les glaces se brisent sous les assauts de BLACKBRAID. Quel album mes amis ! De l’émotion brute avec en écho du viking-black metal qui nous est servi avec des soli si délicieusement heavy. Il n’y a plus aucun doute que les Fils de Ragnar et d'Eric le Rouge aient arpenté les sentiers des terres Mohawks lors de leurs raids aventuriers.
"Sadness And The Passage Of Time And Memory" est encore un morceau fleuve aux remous puissamment délicieux et rageur, les rives s’étirent au loin, toujours plus inaccessibles, mais nous les poursuivons afin que notre plaisir soit assouvi. Et l’affrontement des instruments est total. BLACKBRAID livre bataille pour nous sans faillir. Le tout s’achève sur une envolée apocalyptique heavy black viking.
Pour ceux qui ont douté de l’influence du maître suédois du viking-black metal dans les notes passionnées de BLACKBRAID, une reprise du célèbre BATHORY vient nous cueillir pour achever l’album et oui, aujourd’hui est "A Fine Day To Die". La magnificence à l’état pur (sang) salue l’accostage de notre navire. Un dernier affrontement où cordes électrisées et rythmiques s’affrontent vaillamment, qui oserait bouder son plaisir ?
BLACKBRAID nous libre un chef-d’œuvre incroyable, empreint de respect et baigné de sa propre force. Celle de souffler puissamment dans les voiles du viking metal. Skoll en Mohawk se dit BLACKBRAID !