22 août 2023, 23:59

MEGADETH

@ Paris (Olympia)

Des concerts de MEGADETH, en 30 ans, depuis la tournée "Countdown To Extinction", on peut dire que j’en ai vu un certain nombre – en tête d’affiche, en première partie d’autres, ou en festivals. Mais dans une configuration aussi intimiste, jamais. Et ça devait aussi probablement être le cas pour mes 2600 autres camarades surexcités ce mardi soir : un tel événement paraissait évidemment immanquable. Et l’attente était à la hauteur : c’était sans conteste LE concert de la rentrée (un peu anticipée, soit !), complet depuis des mois, doublé d’un cadre inédit absolument rêvé pour tous les fans parisiens hardcore. Après des années à jouer si régulièrement au Zénith, le groupe de Dave Mustaine investissait notre prestigieux Olympia, MEGADETH brillant fièrement de ses hautes lettres rouges sur la célèbre façade du music-hall.

Disons-le d’emblée : ce show apparaît parmi les trois meilleurs, ever, de mes expériences personnelles. Et ceci notamment grâce à la classe d’un line-up qui égale, au moins, celui de l’Âge d’Or Mustaine/Ellefson/Friedman/Menza : rarement la formation (qui est désormais autant internationale qu’américaine) n’avait d’une part été aussi chaleureuse, mais surtout aussi dynamique et performante. Oui on peut jouer du thrash metal en souriant – bonheur qui irradie toute la salle, chacun reprenant chaque refrain avec la banane. Quel plaisir, en particulier, de voir Dirk Verbeuren battre la mesure avec une telle technicité et une telle décontraction, perché, aux anges sur son drum-riser qui domine une fosse aussi déchaînée qu’euphorique. Et que dire de la prestance / prestation de Kiko Loureiro, guitar-hero idéal, étalon fougueux, beau gosse absolument brillant qui vole quasiment la vedette à ses camarades plus statiques en devant de scène : le vétéran James Lomenzo fait le job et tente de faire oublier Dave Junior, et si Dave Mustaine reste évidemment cette légende vers laquelle les regards convergent, il faut bien avouer que sa silhouette légèrement voûtée et amaigrie trahissent une certaine fragilité qui contraste avec sa réputation, même s’il parvient encore à faire grincer sa voix de manière si caractéristique, notamment sur cet impeccable "Sweating Bullets". Appliqué sur sa guitare, toujours incisif dans l’expertise de ses riffs et dans l’exécution de certains soli antiques, sa façon d’headbanger, caché derrière sa crinière rousse, peine hélas à masquer les affres et stigmates du temps, des excès et de la maladie. Mais si Mustaine a gagné en sérénité et en paix intérieure, il dégage naturellement bien plus de sympathie et d’humilité que jamais, et ses fans, massés devant lui, chavirent entre admiration et compassion pour la légende qui a tant fait pour définir les basiques de cette musique depuis exactement quarante ans.


Et quel patrimoine ! Avec une jolie scénographie, sobre mais imposante, constituée d’écrans géants qui placardent des projections saisissantes calquées sur le répertoire, la set-list apparaît sans faute et ne mise que sur les hits – et donc l’efficacité. A peine un peu moins de quinze morceaux au compteur : si le concert fut un peu trop court et qu’il a manqué "The Mechanix", joué ailleurs et espéré ici, au moins fut-il intense, et sans le moindre ennui. En démarrant avec "Hangar 18", la partie était largement gagnée – mais derrière ce n’est que bastos sur bastos, revisitant les grandes heures d’un des grands géants du heavy metal : "Angry Again", le tonitruant "Wake Up Dead", "In My Darkest Hour" (impérial !), "Tornado Of Souls", "Symphony Of Destruction" et même ce "We Will Be Back", seul extrait du dernier « The Sick, The Dying And The Dead », et qui n’est pas loin de devenir l’un des prochains classiques définitifs, merci à son riffing si killer. Et si le tube "Trust", aussi mélodieux qu’entraînant, offre une certaine respiration parmi ce maelström étourdissant (même si le son est parfait, on aurait bien repris quelques louches de décibels en sus), c’est assurément l’hymne "À Tout Le Monde" qui fédère plus que jamais, non sans allégresse ni émotion.


Le beat appuyé de la grosse caisse de Dirk, sur lequel s’entortille une ligne de basse : ça sent déjà la fin de soirée mais tout le monde explose à l’entame du mythique "Peace Sells", l’un des piliers du genre érigé en 1986 et au moins aussi redoutable qu’un certain "Master Of Puppets" la même année. Il ne manquera donc plus que la déflagration "Holy Wars... Punishment Due" pour marquer ce seul rappel comme l’apothéose d’un rendez-vous parfait avec un public français complètement acquis à sa cause.


Photos © Lilian Ginet - Portfolio

Blogger : Jean-Charles Desgroux
Au sujet de l'auteur
Jean-Charles Desgroux
Jean-Charles Desgroux est né en 1975 et a découvert le hard rock début 1989 : son destin a alors pris une tangente radicale. Méprisant le monde adulte depuis, il conserve précieusement son enthousiasme et sa passion en restant un fan, et surtout en en faisant son vrai métier : en 2002, il intègre la rédaction de Rock Sound, devient pigiste, et ne s’arrêtera plus jamais. X-Rock, Rock One, Crossroads, Plugged, Myrock, Rolling Stone ou encore Rock&Folk recueillent tous les mois ses chroniques, interviews ou reportages. Mais la presse ne suffit pas : il publie la seule biographie française consacrée à Ozzy Osbourne en 2007, enchaîne ensuite celles sur Alice Cooper, Iggy Pop, et dresse de copieuses anthologies sur le Hair Metal et le Stoner aux éditions Le Mot et le Reste. Depuis 2014, il est un collaborateur régulier à HARD FORCE, son journal d’enfance (!), et élargit sa collaboration à sa petite soeur radiophonique, HEAVY1, où il reste journaliste, animateur, et programmateur sous le nom de Jesse.
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