
L’emblématique formation suédoise de black metal SHINING est de retour avec sa finesse, sa poésie et son bon goût habituel... Bon tout cela est ironique bien sûr puisque si vous suivez un peu le groupe depuis 2000 et ses onze albums, vous savez que ce qui le caractérise, c’est plutôt la décadence, la provocation, le gore et ce, à outrance. Ce n’est pas ces six nouveaux titres regroupés sous le nom simple et efficace de « Shining » qui viendront déroger à la règle. Il n’y a qu'à jeter un œil (averti) à la pochette pour se rendre compte qu’on n’est pas en présence d’un gars qui fait dans la demi-mesure. Non, Niklas Kvarforth et les musiciens qui l’entourent pour l’occasion sont assurément là pour en découdre, pour vous montrer brutalement toute leur haine de l’humanité, toute leur fascination pour la mort, toute leur souffrance, à cœur ouvert, et ce n’est pas une image.
Pour le côté conventionnel, « Shining » est donc constitué de six titres comme habituellement, avec un instrumental en cinquième position. Cependant, pas de chiffre romain avant le nom de l’album. Il faut bien un peu d’originalité aussi. A quoi faut-il s’attendre alors ? Si SHINING est un groupe de black metal féroce, incisif, brut, il y mélange aussi de nombreuses influences, jazz, rock et des atmosphères effrayantes mais aussi des mélodies au piano, funestes et pleines de mélancolie. Parce que sous couvert de défendre l’urgence de la mort, « Shining » est un album sombre et expressif en tout point, pas seulement agressif et perturbant. Alors oui, le premier titre "Avsändare Okänd" entame les hostilités avec un black metal hurlé et tranchant dans le vif mais dès deux minutes d’écoute, les guitares se veulent plus mélodiques si on peut dire et le rythme, plus lent. Je vous l’accorde, pas pour très longtemps mais quand même. Sur chaque morceau, les parties vocales sont à la fois torturées mais montrent aussi de puissants passages en voix claire, comme sur "Allt For Döden" et ses moments jazzy, j’oserais presque dire chaleureux. Si les guitares sont parfois dissonantes, les arpèges de "Fidelis Ad Mortem" par exemple, ont une résonnance toute particulière, tout comme son solo envolé, cosmique. De plus, les atmosphères sont très présentes sur le lugubre "Den Permanenta Sömnen Kallar" qui clôt « Shining » de la plus "triste" des façons.
Alors oui, SHINING et son charismatique leader Niklas Kvarforth sont dérangeants, offensants et on ne rentre pas facilement dans cet univers violent et extrême qu’ils veulent nous infliger. Mais il est bon d’aller au-delà des préjugés ou des attentes pour tout de même apprécier une musique riche et fidèle à ses ambitions. SHINING fait couler de l’encre et du sang et ce sera encore le cas avec ce nouvel et 12e album mais il trouvera son public, peut-être encore plus déjanté que lui. Chacun se fera une idée car, en tous cas, « Shining » ne laissera personne indifférent.