15 août 2011, 11:51

Le culte en capsule...

Il y a un peu moins d'un an, je lisais une interview du chanteur de THE CULT, Ian Astbury, annonçant qu'il n'y aurait probablement plus jamais de nouvel album de la part des créateurs du Temple Sonique et autres merveilles Electric. Et ce, non pas pour des raisons de panne d'inspiration, mais tout bonnement parce qu'il considérait le format comme obsolète. A l'heure de la dématérialisation générale, à l'heure du téléchargement de masse, disait-il, à quoi bon sortir un nouvel album pour de vrai dans la vraie vie ? Ian pensait plus pertinent de faire des chansons et de les publier en ligne au gré de leur composition. En cela, le groupe s'apprêtait à mettre en ligne quatre nouveaux titres sous le vocable « Capsule One ». Sur leur site, THE CULT vendait aussi des lives, cette fois, sous forme de clés USB. Cette démarche s'inscrivait en droite ligne de celle de RADIOHEAD qui, en rupture de ban avec sa maison de disques, avait choisi de vendre par le net son dernier album "The King of Limbs", avec un résultat qui fut loin d'être ridicule. 

Si dans un premier temps, j'hurlais à la trahison (j'adore THE CULT et aime le disque comme objet), dans un second, je balayais cela d'un revers : Quoi ? La mort du disque ? Mais j'entends ça depuis les années 80 ! 

Cependant, d'autres artistes en parlaient ou évoquaient cette possibilité lors d'interviews et dernièrement, c'est Prince qui confiait ne plus désirer sortir d'album tant que le monde du disque serait en crise. Bon, OK, sa majesté pourpre n'a pas sorti un album convenable depuis… depuis trop longtemps pour le rappeler mais quand même, voilà qui semblait dans l'air du temps. 

Et c'est donc ainsi que l'idée chemina dans mon esprit.  Et si ce bon vieux Ian voyait juste ? Si la révolution numérique en cours n'avait pas tout simplement balayé le concept physique d'album ? Si les nouveaux modes de consommation musicale axée sur l'instantané (j'écoute un titre, je l'aime, je le charge) n'avaient pas, in fine, modifié si profondément la façon d'appréhender la musique, qu'ils aient signé l'arrêt de mort de l'album en tant que tel ?  

Impossible me répondrez-vous avec justesse, le rock 'n'roll, et plus largement la musique populaire de la seconde moitié du 20e siècle, s'est construit au travers du support du disque. Notre parcours musical, tous autant que nous sommes, est passé par des albums qui nous ont tant bouleversés qu'ils en ont parfois changé nos vies (et je suis du lot). 
Oui, mais voilà, nous ne sommes plus au vingtième siècle !  
Car, si on y regarde de plus près, que reste-t-il objectivement au disque en tant que support physique ? 
Le CD avait déjà détruit les pochettes en les réduisant à peau de chagrin derrière un boitier "crystal" (plastique) immédiatement rayé. La technologie les avait  ensuite numérisés puis mis en ligne, et ce même des raretés, rendant ainsi instantanés nos désirs musicaux. Plus besoin de stocker physiquement des dizaines, des centaines voire des milliers d'albums en faisant la fortune de Monsieur Ikea. Non, un clic et hop, voici l'intégrale de machin ou de bidule. 
Le CD nous avait également privés de l'odeur du vinyle neuf sortant de sa pochette, courant sur la platine, des basses bien rondes et des aigües clairs. Là, il ne nous reste carrément plus rien, juste quelques lignes de plus sur votre ITunes ! Damned ! 
Cependant, ne nous voilons pas la face. Il y a aussi dans cette crise une logique économique. Quoiqu'on puisse en dire, c'est son prix qui a fait mal au disque en tant que support. Les pros du secteur objecteront qu'il y a les opés mid-price régulières, mais elles ne concernent que le fonds de catalogue. Les nouveautés, elles, tournent entre 17 et 20 euros du bout en moyenne. J'achète des disques régulièrement depuis 1976 et durant cette période, le prix d'un disque a été multiplié par 5 ! Résultat des courses : à ce prix-là, comme beaucoup d'autres, je n'achète plus que des albums que j'ai pris soin d'écouter avant ou alors des valeurs sûres, genre rééditions des STONES and co !  
Il n'est pas anodin de noter que la France où le disque est un des plus chers, est le pays d'Europe où le piratage est le plus intensif.  Ou alors, c'est un hasard malheureux !  

Pour autant, la cause est-elle entendue? Pas si sûr ! Le disque n'a-t-il pas aussi des arguments à faire valoir ? 
Car avec le numérique, où est l'émotion (fétichiste ?) d'ouvrir l'album, même en CD ? Où est le plaisir d'aller lire les crédits, histoire de voir qui officie, d'avoir les paroles, les photos ? Le disque, c'est aussi une qualité sonore toujours supérieure, même ce n'est plus aussi vrai qu'avant ! Ok, j'avoue, ça fait pas lourd. 
Et puis si c'était juste un truc irrationnel ! 

Il ne m'appartient pas de jouer les Madame Irma, je n'ai aucune réponse à donner. Mais, je me refuse pourtant à croire que le disque en tant que support soit définitivement enterré. Je n'imagine pas me dire que le prochain PEARL JAM pourrait ne pas rejoindre ses ainés dans ma discographie sous prétexte qu'il n'existe que de façon numérique ! 

Entre temps, Ian Astbury a changé son fusil d'épaule et il vient d'annoncer le retour du CULT en studio pour un nouvel album à paraitre fin 2011/ début 2012. 
Ouf, on a eu chaud ! 

Blogger : Marlo Music World
Au sujet de l'auteur
Marlo Music World
Surnommé Marlo par ses potes à cause de sa passion pour les polars et les chapeaux, Laurent Ducastel est un auteur qui sévit à la fois sur papier, livres et BD ou sur écran dans des documentaires. Il a aussi officié dans divers magazines musicaux dont HARD FORCE MAG évidemment. Le film qu’il a coécrit avec son compère Cédric Tourbe, « Jacques Foccart, l’homme qui dirigeait l’Afrique » a été récompensé d’une Etoile de la SCAM 2011.
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