Petite devinette : je ressuscite l’esprit magique des productions black/death dont le label No Fashion était le plus ardent pourvoyeur dans les années 90 (le mythique « The Somberlain » de DISSECTION, ABLAZE MY SORROW, VINTERLAND, DECAMERON j’en passe et des meilleurs). J’exécute le tout avec une dextérité hallucinante que ne renierait pas DRAGONFORCE et consorts. Et, non, je ne suis pas suédois.
Qui suis-je ?
Je suis, je suis... BLOODCROSS ! Formation finlandaise qui livre ici son premier album, un mètre-étalon de mélodies explosives et de riffs enfiévrés, qui annonce à n’en point douter un futur radieux pour le quartette de Turku. Groupe au casier musical quasi vierge qui affiche d’ores et déjà sur « Gravebound » une maturité impressionnante et un sens de la composition aiguisé. Il suffit de tendre l’oreille sur ce "Warbeasts" qui résume à lui seul le potentiel des finlandais d'entrée de jeu. Un véritable monstre aux multiples tempos ciselés, charriant une puissante mélancolie qu'il injecte dans chacun de ses riffs.
Un petit chef d'oeuvre qui trace la voie pour "Nemesis Reborn" que l’on jurerait échappé d’un album de DISSECTION avec ses parties de guitares bouillonnantes, le tout restant toujours habité par ce sens de la mélodie pointu. Tout comme sur "Pale Avenger" et "Gravebound" sur lesquels il flotte comme un parfum de nostalgie melodeath testostéroné, de ceux que l’on retrouve sur les premiers travaux de SACRILEGE ou GARDENIAN. De belles références qui ne doivent pas occulter le travail de fond qui met à l’honneur un groupe réfléchi, capable de dépasser le simple exercice de style pour s'approprier des tempos plus variés et proposer des ambiances très travaillées.
Prenez le chanteur du groupe, Aleksi Pahlamado, accessoirement guiatariste de haut niveau, qui excelle dans le raclement de larynx avec une férocité palpable... Il livre tout au long de ces trente-neuf minutes un récital impressionnant de puissance et la section rythmique qui l'accompagne n'est pas en reste : les accélérations, abruptes, ensorcelantes, transforment la physionomie de chaque morceau en lui donnant des airs de grand huit déchaîné (Raaah lovely ce "Howling Sprits" qui clôt les débats avec fougue !). Chaque nouvelle écoute charrie son lot de sensations fortes et de surprises, le tout minutieusement drapé dans une homogénéité imparable, chacun des sept titres révélant ses moments de bravoure lardés de guitares acérées. Toujours habités par un sens pointu de la mélodie.
Oscillant donc entre tradition et modernité sans jamais tomber dans la simplicité, le black/death pratiqué ici par BLOODCROSS se révèle d'une efficacité sans faille. Il partage d'ailleurs avec les formations historiques citées un peu plus haut ce sens inné du riff froid et précis qui claque tel le blizzard sur les joues rougies. « Gravebound » porte en son ADN ces émotions livrées à fleur de peau, une force brute et nostalgique qui terrasse autant qu'elle envoûte. Un must, tout simplement !