Composé de vieux routards de la scène metal italienne, DARKEND n’en est pas à son coup d’essai avec « Viaticum », sorti chez ses compatriotes de Time To Kill Records le 14 juin dernier. En effet, dans sa noire besace sont déjà rangés quatre albums qui perpétuent une tradition black symphonique teintée d’embardées heavy du meilleur effet. Ces dernières sont d’ailleurs mises en valeur par l’insolente qualité des solos que Gabriele Lazzerini (ex-HANDFUL OF HATE), alias "Acarnar", délivre ici avec un doigté forçant le respect. Le tout est saupoudré d'une bonne pincée de mélodies givrées et de claviers entêtants qui donneront le tournis aux amateurs du genre.
En parlant de genre, la biographie rédigée par le label est juste, une fois n’est pas coutume, en citant les illustres CRADLE OF FILTH et ROTTING CHRIST comme influences principales. Il suffit pour cela de s’enfiler le doublé "An Incautious Exhumation Of What Lies Beneath Forgotten Ground" / "De Masticatione Mortuorum In Tumulis" entre les oreilles pour comprendre que le sextet de Reggio Emilia a dû biberonner goûlument leurs albums dans sa jeunesse. Bien loin cependant de se limiter à une simple relecture sans saveur, même si l'ombre ténébreuse de ses mentors se fait sentir ici, « Viaticum » dépasse ce simple constat. Du black symphonique, certes, mais surtout une véritable expertise dans la recherche du riff qui tue et des ambiances, épiques, qui font mouche à chaque touche.
Tout est judicieusement équilibré, DARKEND se faufile avec malice entre les ténèbres en haussant le ton quand il le faut ("An Ancient Plague Has Silently Worn Our Garments As Its Throne", mazette !). Breaks qui tombent à point nommé, structures des compositions toutes en nuances : « Viaticum » frappe juste et fort sans sourciller. Chaque nouvelle écoute charrie son lot de sensations fortes : des parties de guitares hypnotiques se dévoilent ainsi aux côtés de parties de batterie exécutées d'une main de fer dans un gant de velours. Le tout bien calé dans un ensemble d’une homogénéité imparable, dégageant en toile de fond une véritable mélancolie et une sensibilité à fleur de peau.
DARKEND fait ici voler le cadre "symphonique" en éclats pour apposer sa propre patte en proposant un black metal racé et mélodique, dévoilant sur chaque morceau des textures riches, variées qui alternent avec des passages parfois plus solennels (la sublime première partie de "In Your Multitude" est exemplaire à ce sujet).
L'album charrie en son ADN de purs moments de bravoure lardés de guitares acérées et de tempos bouillonnants, toujours habités par un sens pointu de la mélodie. Rarement un album n'aura si bien porté son nom puisque "Viaticum" est traduit du latin par "voyage". Dantesque !