Oui, on le sait, vous n’aimez pas le soleil. Et oui, on sait, vous n’aimez pas la chaleur. Oui, on a bien compris que vous attendiez la saison basse pour ressortir de votre tanière. C’est pour cette raison qu’avec toute l’empathie qui les caractérise, Aude, Clément et Crapulax vous ont concocté LA playlist idéale de sortie de léthargie. Pas mal de black pour le côté rafraichissant et bien sûr du bon death qui tache pour le réveil en douceur après les vacances. Bonne rentrée à toutes et tous !
GRAVENOIR : « Devant la Porte des Etoiles » (Season Of Mist)
GRAVENOIRE est un nouveau groupe français formé il y a seulement deux ans autour de musiciens qui n’en sont pas à leur coup d’essai si on en croit leur palmarès dans des formations comme HYRGAL, DIABLATION, SETH ou ANOREXIA NERVOSA.
Le black metal présenté ici est sans fioritures, lié à l’inspiration du moment car « Devant la Porte des Etoiles » a été enregistré en live-session, donc d’une grande authenticité. Les six titres de ce premier EP sont saisissants de fureur avec des riffs puissants et des refrains prenants ("Ordo Opera Cultura") mais aussi des moments plus lourds et atmosphériques comme sur l’excellent "France de l’Ombre".
GRAVENOIRE ne grave pas son nom dans le marbre mais bien dans le "granit", digne emblème d’un terroir et de ses traditions défendues, jusqu’à la mort regardée bien en face ("Aux Chiens"). Même le dernier titre qui donne son nom à l'EP, minimaliste et acoustique avec son texte récité, montre tout l’engagement du groupe dans une démarche sincère, de retour à un son brut et efficace mais sans nostalgie et surtout, en faisant preuve d’originalité. Il est bon d’entendre un black metal pur et réfléchi et c’est encore mieux de ne pas avoir à aller le chercher dans le grand Nord.
(Aude Paquot)
ELLENDE : « Todbringerin » (AOP Records)
ELLENDE n’est pas non plus un nouveau venu sur la scène black metal puisque ce one-man band existe depuis 2011 et « Todbringerin » est en déjà sa huitième réalisation. Enfin, relative puisqu’il s’agit plutôt d’un réenregistrement de « Todbringer » sorti en 2016. Cependant, l’émotion, la mélancolie, la nostalgie même, véhiculées par des morceaux hyper atmosphériques et d’une grande mélodie, font qu’il était impossible de passer à côté.
Les huit titres de cette nouvelle version sont remis au goût du jour, réinterprétés, avec une nouvelle vivacité, une nouvelle fougue et une grande solennité. Des titres comme "Verehrung" ou "Verachtung" sont majestueux et puissants là où les deux parties de "Scherben Teil" avec les guitares acoustiques et les chœurs nous abandonnent à un monde éthéré de plus en plus lointain et cosmique.
Le très varié et magnifique "Versprochen..." rivalise de beauté avec le dernier "Am Ende Stirbst du Allein", imparable.
Ceux qui connaissent ELLENDE seront ravis de cette nouvelle version, même s’il est parfois difficile de revenir sur le passé. Ceux qui ne connaissent pas ce son black metal atmosphérique autrichien devrait en apprécier toutes ses nuances.
(Aude Paquot)
MORCAINT : « Mornië Utúlië » (Nordvis Produktion)
Formé en 2008 et sans aucune sortie dans sa besace depuis, MORCAINT semble bien décidé à rattraper le temps perdu. Auteur d’un très bon premier EP paru l’année dernière, le duo suédois remet le couvert aujourd’hui avec « Mornië Utúlië ». Fortement influencé par Tolkien (ce même titre signifie "les ténèbres sont venues" en haut-elfique) et par extension SUMMONING, dont il perpétue ici l’héritage aussi bien sur le fond que sur la forme, MORCAINT frappe très fort.
Bourrés de trémolos épiques et de claviers enivrants, les quatre morceaux présentés possèdent comme un parfum de nostalgie dont l’on se régale à pleins poumons, perdu quelque part dans une forêt montagneuse envahie par le brouillard. "Summons Dire" et "Glithoniel" (dont la seconde partie est le point d’orgue de cet EP) délivre ainsi des parties de guitares bouillonnantes, habitées par un sens de la mélodie pointu typiquement suédois. Pendant que "A Pale Moon Rises" et "Mornië Utúlië" troussent des ambiances à la beauté troublante.
La production est quant à elle rugueuse juste comme il faut, complétée par un artwork bucolique à souhait. Mon seul regret à l’écoute de ce second jet d’un très haut niveau reste sa durée, d’une petite vingtaine de minutes. Vivement l’album au vu du potentiel entrevu ici !
(Clément)
COLD CELL : « Age Of Unreason » (AOP Records)
Le quintet suisse ne tient pas en place : quatre albums sortis depuis 2012 sur quatre labels différents ! Et ce dernier travail ne fait pas exception à la règle puisque c’est cette fois-ci AOP Records qui est aux manettes. Mais il en faut plus pour faire plier les Bâlois, adeptes d’un black metal glacial bourré de dissonances.
Les instruments de torture que sont "Dead To World" et "Sink Our Souls" plongent ainsi sans temps mort l'auditeur dans une ambiance des plus hostiles. Teigneux, vindicatif, COLD CELL s’autorise malgré tout à laisser transparaître quelques mélodies lumineuses derrière son épaisse carapace (l’excellent 'Meaningless" et son chant féminin de toute beauté). Ou au contraire, de descendre un palier plus bas dans l’obscurité totale sans espoir de remonter (le bien nommé "Left", saisissant).
Pour ne rien gâcher au plaisir, le superbe artwork signé Gian Adrea Signorell témoigne d'une attention évidente accordée à l'impact visuel voulu par le groupe. Doté d’un son massif forgé par le producteur allemand V.Santura, « Age Of Unreason » s'ajoute à la longue liste des albums fort recommandables issus de ce terreau fertile qu’est la Suisse.
Et embarque avec doigté l’auditeur dans un roadtrip de plus de trois-quarts d’heure aux charmes obscurs en diable. Envoûtant.
(Clément)
DECEASED : « Children Of The Morgue» (Hell's Headbangers)
Dans le monde du metal on y trouve des groupes qui n'ont pas leur pareil dans l'approche mélodique, d'autres qui excellent dans la recherche de difficulté technique et d'autres encore dans la brutalité à outrance.
Le point fort de DECEASED sonne comme une mauvaise blague, un soufflé au fromage ratatiné, puisqu'il s'agit des plages instrumentales entre les titres ! "Destination: Morgue" en introduction est juste énorme de chez énorme. Quant à "Turn To Wither", c'est un véritable éclair de génie de pur doom ! Pourquoi ne pas en avoir fait des titres à part entière ? Mystère et boule de gomme...
Évidemment si la formation américaine demeure sur le circuit depuis 1986, ce n'est pas par hasard. C'est aussi parce qu'elle sait concocter mieux que personne des morceaux qui tabassent, genre "Children Of The Morgue" ou ce "The Gravedigger" de fort bon aloi.
DECEASED a aussi la science du riff qui tue ("Fed To Mother Earth"), du rythme soutenu et bien sur des interludes super classes qu'il convient de rappeler...
Chacun sa spécialité finalement !
(Crapulax)
HUSQWARNAH : « Purification Through Sacrifice» (Time To Kill Records)
Dans la série « J'ai un nom à coucher dehors... » voici HUSQWARNAH, sans domicile fixe, probablement depuis toujours, là-bas dans leur Italie natale, au moins depuis leur création en 2021. Sérieux, on dirait quelqu'un qui s'est écroulé de fatigue un soir sur son clavier d'ordinateur !
Attendez j'essaie... ÏRIEQMP. Ah ouais ça fait mal à la joue mais ça marche !
On se moque mais si ça se trouve HYSQWARNAH est un précurseur qui s'ignore... Après avoir pondu par millier des logos absolument illisibles dans le metal extrême, pourquoi ne pas passer maintenant, comme eux, à des noms totalement imprononçables ? Ben ça donnerait des dialogues amusants du genre :
- C'est qui qui joue ce soir au Rex de Toulouse ?
- Ben c'est POJUPJ (aïe, ma joue) avec R4ZShCTYJ en ouverture.
- Ah dommage, je pensais que c'était FATLDIARHO. Trop deg' !
Bon sinon le death metal de ce machin-là est loin d'être dégueulasse, on pourrait même dire qu'il est super efficace. Le plus terrible étant de loin "The Jackal's Grin", le dernier titre qui clôture brillamment ce second album. Voilà, encore une chronique de sabotée par...
(Crapulax)