Du noir, du gris et du goudron. ALTA ROSSA, originaire de Besançon, en avait déjà donné pour plusieurs rouleaux-compresseurs gourmands sur son premier album, « Void Of An Era », paru en 2022. Comme une carte de visite prémonitoire qui confirmait alors qu’en matière de musique toxique, ces cinq larrons étaient fort bien calés. Mais cela ne suffisait pas. Il fallait encore aller plus loin. Dont acte avec « A Defiant Cure ».
Les quarante minutes ici affichées au compteur ne s’embarrassent d'ailleurs pas de détails et suintent la rage tout du long. Une rage que le chanteur Antoine Lauzel vomit dès les premières notes de "Exalted Funeral", balancées sans la moindre précaution. Aidé dans sa quête par une section rythmique remontée comme jamais qui modèle riffs dissonants sur embardées sludge de premier ordre, le vocaliste assure le job avec classe. L'ambiance de désolation qui s'empare du reste de l’album confirme la tendance : les ténèbres sont dans la place, ajoutant à cette mélasse une bonne dose de blackened hardcore du meilleur effet ("From This Day On", ravageur).
Le cogneur Matthieu Martinazzo y va lui aussi de son empreinte destructrice, accélérant le tempo pour mieux jouer avec les nerfs quand bon lui semble. Le tout nage dans des ambiances crépusculaires doublées d’une mélancolie guerrière qui se fait la malle quand cela lui chante (les superbes interludes "Dédale" et "Where we Drown our Nightmares"). Du lourd, du gras, du dissonant et peu de place pour le reste où le matraquage se dresse en maître, avec le rictus en sus. C’est bel et bien ce que propose ALTA ROSSA sur cette déclaration de guerre. Et il est tout bonnement impossible de rester impassible à l’écoute de ces dix titres qui ne prennent pas de pincettes pour en mettre plein les mirettes. L’urgence et la hargne pointent le bout du nez sur chaque break et un véritable déluge de riffs d'une délicieuse sauvagerie laisse exploser de sinistres mélodies en arrière-plan. Carton plein.
« A Defiant Cure » est un véritable labyrinthe truffé d'indices retors et de frénésie rythmique. Un labyrinthe à la simplicité apparente mais aux structures tortueuses dont le but avoué est de faire régner la confusion. Produit avec doigté par Thomas Fournier, ce disque s’affiche d’ores et déjà comme l’une des sorties essentielles cette année en matière de post-metal/sludge dissonant. Doté, pour couronner le tout, d’un superbe artwork signé Simon Chognot, « A Defiant Cure » est à l’image de ce minotaure qui illustre sa pochette : monstrueux.