11 janvier 2025, 23:59

INFECTED RAIN + SEMBLANT + ELYOSE + MIRUTHAN + SKIN ON FLESH

@ Wasquehal (The Black Lab)

Si tu ne vas pas au Motocultor, le Motocultor viendra à toi. C’est ce que propose cette tournée “Motocultor Across Europe 2025” qui se déroule en début d’année depuis quelques éditions. Cette fois-ci, c’est INFECTED RAIN qui est mis en avant après s’y être produit cet été à l’occasion de la seconde journée. En attendant, il revient à SKIN ON FLESH, MIRUTHAN, ELYOSE et SEMBLANT de faire patienter le public déjà nombreux.

Lorsque nous entrons dans la salle, SKIN ON FLESH, qui est chargé de commencer la soirée, joue depuis un petit moment. C’est accompagné de trois musiciens pour le live que nous découvrons le duo fondateur acculé sur le devant de la scène. Bien qu’il ne soit pas encore 19 heurs, le public est déjà nombreux. Ce n’est donc pas devant une salle vide que le groupe emmené par sa chanteuse, Laura Jiménez, a le plaisir de jouer. Avec son compère Michiel Sybers à la basse, avec qui elle a fondé le groupe en 2020, nous assistons à une fin de concert énergique. Le son est bon et le public fait preuve d’une attention bienveillante. Une belle entrée en matière que SKIN ON FLESH a su exploiter avec joie et bonne humeur pour présenter « Terrible and Sad » (2023) et « Ur Cute, Let’s Hang » (2024), leurs deux EP.

Au jeu "chercher l’intrus", MIRUTHAN est clairement la bonne réponse. D’abord musicalement, puisqu’il s’agit de black metal, ce qu’aucun groupe de la soirée ne propose, et ensuite le fait que le préposé au micro n’est pas une fille. Nous découvrons donc une étrange confrérie de moines sans nom emmenée par un gourou, disciple de Nergal, qui se tient derrière un pupitre. Etrangement, ce n’est pas lui qui harangue les premiers rangs, mais deux de ses disciples. Venu d’Australie, ce jeune groupe qui a à son actif un EP, « Cult Of The Dead », va en définitive délivrer un set très brouillon, allant de paire avec le manque d’esthétique et de cohérence de ses tenues de scène. Le son est bien trop fort. Sert-il à cacher un manque de maîtrise ? Difficile à dire. En tout cas, en prêtant une oreille attentive, il ne nous a pas été possible de discerner grand-chose dans ce chaos sonore.

Après cette courte mais plutôt décevante prestation, nous espérons qu’ELYOSE, les nationaux de l’étape, vont savoir rebooster la soirée. Justine Daaé interpelle le public en jouant sur la fibre française pour susciter l’adhésion. Il va sans dire qu’il faudra surtout être convaincant et que ce n’est pas les cinq albums de sa discographie en quinze ans d'existence qui assureront une partie d'ores et déjà gagnée. Avec son nouvel album, « Evidence », paru le 10 janvier, il n’est pas surprenant que de nouvelles chansons soient intégrées au set. Le son est un nouvelle fois bien trop fort et fait la part belle à la caisse claire. Le chant est ainsi malheureusement noyé dans un épais brouillard de décibels. Justine peut être rassurée, si elle s’est à un moment donné trompée dans les paroles, elle assume son rôle de frontwoman et ses lignes de chant tiennent la route. Cela dit, entourée d’un vrai groupe, elle devrait pouvoir emmener ELYOSE à un niveau supérieur.  

Il faut bien avouer que le temps commence à être un peu long et qu’à ce rythme, il devient difficile de faire semblant de s'intéresser aux premières parties qui sont proposées... Malheureusement, les Brésiliens SEMBLANT ne vont pas réussir à faire beaucoup mieux que leurs prédécesseurs. Le son reste trop fort. La caisse claire est toujours au premier plan. Les voix sont en retrait et mal équilibrées. Le groupe est toutefois bien accueilli par l'asssistance. On peut imaginer que pour son premier passage dans le nord de la France, une bonne partie du public les voit aussi pour la première fois. SEMBLANT est actif depuis 2006 et compte quatre albums à son actif, dont le dernier en date, « Vermilion Eclipse », en 2022, et un joli palmarès de premières parties. Pas étonnant donc qu’ils soient attendus. Il faut admettre que sur la fin du set, le son est meilleur, mais c’est un peu tard. N’ayant pas de nouveau LP à promouvoir, cette tournée est donc l’occasion de fêter les dix ans de « Lunar Manifesto » sorti en 2014, dont cinq titres sont interprétés. Un groupe à revoir dans de meilleures conditions pour se faire un réel avis sur ses prestations scéniques.

C’est enfin l’heure pour INFECTED RAIN de clore cette soirée marathon qui traîne en longueur. La scène est maintenant entièrement débarrassée du matériel qui l’encombrait et c’est dans un décor épuré que les quatre musiciens vont évoluer. En guise de backdrop se dévoile le logo du groupe et deux écrans sur lesquels vont défiler, tout au long de la prestation, des animations. Après sa tournée en Amérique du Sud, les Moldaves proposent sensiblement la même set-list augmentée de quelques titres pour une prestation d’une heure environ. ''A Second Or A Thousand Years'' accompagne l’entrée sur scène du groupe qui frappe fort avec ''The Realm Of Chaos''. Le son est au rendez-vous, on peut donc se rassurer et au royaume du chaos, le Black Lab se transforme instantanément en ''Pandemonium'' où le conseil des démons est invoqué par Lena Scissorhands. Ce soir, Satan nous apparaît sous les traits d’une femme sorcière. L’habit ne faisant néanmoins pas le moine, c'est en envoyant plein d’amour au public en formant un cœur avec ses doigts qu'elle lâche un « Bonsoir Lille ! ». Le public est sous le charme.

La puissance, la maîtrise vocale et la bienveillance de Lena irradie. De ce fait, elle s’impose comme la maîtresse de cérémonie au point de se sentir envoûtés et pris au piège dans un ''Vivarium'' pour métalleux. La débauche d’énergie sur scène est communicative et a l’effet d’un sort lancé au public dont les plus réceptifs se transforment en ''Fighter'', alternant entre slams et circle-pits. ''The Answer Is You'' est une évidence. L’engouement d'INFECTED RAIN trouve une réponse de la part des nombreux spectateurs venus ce soir. A l’écoute de ''Orphan Soul'', on comprend qu'avec un climat morbide dominé par les brouillards givrants de cet hiver nordique, les âmes orphelines de la région soient venues chercher un peu de réconfort dans cette zone d’activité aux allures d’un ''Blackwater Park''. Avec ''The Earth Mantra'' est venu le moment des incantations et des prières pour accueillir ceux qui, dans un dernier souffle (''Dying Light''), voient leur dernière étincelle s’éteindre pour ne jamais revenir (''Never Return'') du royaume chaotique.

Plongés dans une pénombre bleutée, Lena et ses disciples se sont volatilisés. Après quelques instants, le public sort de sa torpeur et une clameur s’élève. Cette rupture sans remerciements est surprenante, mais ne manque pas d’intérêt car elle intègre pleinement le rappel du show. Elle permet aussi de mesurer l’intérêt des fans pour INFECTED RAIN qui ovationne littéralement son retour pour interpréter ''Because I Let You'' et ''Sweet, Sweet Lies'' dans une communion incroyable où le public s’assoit à la demande de la chanteuse pour se relever comme un seul homme. On voit aussi Vadim "Vidick" Ojog slammer quelques instants avec sa guitare et le public de finir la soirée, à la demande de Lena, avec un circle-pit.

Un concert qui se termine en apothéose. Bravo à INFECTED RAIN d’avoir un peu sauvé la soirée de façon impressionnante et à la hauteur des attentes avec ucharisme et une maîtrise de la scène irréprochables. Félicitations également à SKIN ON FLESH qui a su convaincre par sa fraîcheur, bien que nous n’ayons assisté qu’à une dizaine de minutes de leur set. Pour le reste, c’était totalement dispensable et nous aurions largement apprécié qu’une partie du temps soit utilisée pour proposer une prestation d’INFECTED RAIN un peu plus longue que cette petite heure.
 

Blogger : Bruno Cuvelier
Au sujet de l'auteur
Bruno Cuvelier
Son intérêt pour le hard rock est né en 1980 avec "Back In Black". Rapidement, il explore le heavy metal et ses ramifications qui l’amèneront à devenir fan de METALLICA jusqu'au "Black Album". Anti-conformiste et novateur, le groupe représente à ses yeux une excellente synthèse de tous les styles de metal qui foisonnent à cette époque. En parallèle, c'est aussi la découverte des salles de concert et des festivals qui le passionnent. L'arrivée d'Anneke van Giersbergen au sein de THE GATHERING en 1995 marquera une étape importante dans son parcours, puisqu'il suit leurs carrières respectives depuis lors. En 2014, il crée une communauté internationale de fans avant que leur retour sur scène en juin 2018 ne l'amène à rejoindre HARD FORCE. Occasionnellement animateur radio, il aime voyager et faire partager sa passion pour la musique.
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