Le 25 février dernier, au Trabendo, s’est tenu un concert qui promettait d’être légendaire à la simple vue du line-up : GREEN LUNG, tête d’affiche en France pour la première fois depuis cinq ans, était accompagné d’UNTO OTHERS et de SATAN’S SATYRS. Le temps est gris, presque comme un mois d’octobre, parfait pour une soirée magique et occulte comme celle qui s’annonce.
SATAN’S SATYRS ouvre le bal avec pour mission de réchauffer le public qui vient d’affronter la pluie et la grisaille (qui, finalement, ne quittent plus vraiment Paris depuis six mois) pour arriver jusqu’au Trabendo. Le groupe états-unien livre alors des titres entre le garage-punk, le heavy metal et le doom, le tout porté par la voix aiguë du chanteur et un style vestimentaire vintage (à base de coupe mulet et de pantalon patte d’eph) qui apporte un peu de fraîcheur aux tenues habituelles intégralement noires. La salle se réchauffe doucement sur les morceaux du groupe qui livre une performance honorable et énergique sans toutefois faire l’unanimité dans la salle. L’ambiance inspirée par les films de vampire et les cimetières permettait toutefois d’explorer un univers musical proche du style chamanique et celtique de GREEN LUNG, sans pour autant être trop similaire pour que la comparaison nuise à l’un des deux groupes. SATAN’S SATYRS marque ainsi son retour après plusieurs années d’absence, avec un line-up presque entièrement renouvelé. Si les guitares de Jarrett Nettnin et Morgan McDaniel ainsi que la batterie de Russ Yusuf et la basse du chanteur Clayton Burgess n’ont pas conquis tout le monde, elles trouveront probablement leur public lors d’un prochain concert.

UNTO OTHERS s’est ensuite emparé de la scène pour un set de dix-huit morceaux, cette fois unanimement apprécié par l’ensemble du public. Avec une majorité de titres issus du dernier album du groupe, « Never, Neverland » sorti en septembre 2024, UNTO OTHERS a pu constater qu’une bonne partie des fans connaissait déjà très bien les paroles des chansons de cet album. La voix grave du chanteur Gabriel Franco a emporté le cœur du public dès "Butterfly" et les riffs de guitare de Sebastian Silva ont achevé de conquérir les personnes qui ne connaissaient pas encore le groupe. Avec la basse de Jamison Palmer et la batterie de Colin Vranizan, le groupe joue tube sur tube et enveloppe la salle de morceaux aux mélodies entraînantes malgré les textes parfois graves comme celui de "Suicide Today". Les chansons les plus connues du groupe, "It Doesn’t Really Matter" et "Can You Hear The Rain", sont également jouées au milieu du set et, avant qu’on ne réalise que la cover du morceau des RAMONES "Pet Sematary" a été jouée, le groupe conclut sur "Dragon, Why Do You Cry ?" issu du premier album du groupe. La musique cesse, le public acclame le groupe et se prépare à accueillir GREEN LUNG comme il se doit.

Les lumières s’éteignent, une bande son commence et les membres de GREEN LUNG arrivent sur scène. Cinq ans après son dernier concert en tant que tête d’affiche à Paris et deux ans après son dernier passage à la capitale en tant que première partie de CLUTCH au Bataclan, le groupe ne cache pas sa joie de pouvoir donner un concert à son image sur la scène du Trabendo. "Woodland Rites" lance les hostilités et plonge la salle dans l’ambiance chamanique et occulte propre à GREEN LUNG. Suivent ensuite neuf titres, essentiellement tirés de « This Heathen Land », dernier album en date du groupe sorti en novembre 2023. Le public chante en chœur sur "Mountain Throne" qui, comme tous les titres de l’album, est doté d’un refrain entraînant et facile à chanter à l’unisson avec Tom Templar, même quand on le découvre.

La joie du groupe est palpable à l’énergie qu’il déploie sur scène et le public le leur rend bien. Après un premier grand déploiement d’énergie, le groupe décide de ménager une pause en entamant "Song Of The Stones". Le bassiste Joseph Ghast s’empare alors d’une caisse de batterie ornée d’un faux crâne de bélier aux yeux lumineux rouges, s’approche d’un micro et chante en martelant la peau de la caisse. La guitare de Scott Black se calme alors pour accompagner le rythme et la voix de Ghast, tout en douceur. L’intensité monte pendant le solo de guitare de Black et l’envoûtement est complet quand les voix de Ghast et Templar s’associent par-dessus les instruments pour invoquer les pierres. Le groupe montre ainsi qu’il sait tout aussi bien susciter l’énergie que le calme et la douceur. L’envoûtement est si fort qu’il faut au moins la force de "The Forest Church" pour reprendre les hostilités : les riffs de guitare de Black, les claviers de John Wright, la batterie de Matt Wiseman, la basse retrouvée de Ghast et la voix de Templar font sortir le public de l’ambiance hors du temps pour mieux chanter ensemble.

Solo de guitare sur solo de claviers galvanisent le public qui a retrouvé son énergie. Toujours plus entraînant, "Maxine (Witch Queen)" est joué juste après et Templar lance les mouvements de voix de la foule à grand renfort de gestes du bras pour invoquer la sorcière comme il se doit. Après "Graveyard Sun", le groupe prend une seconde pause avant les quatre morceaux du rappel qui s’achève sur "One For Sorrow". La note qui clot le morceau est l’occasion finale d’unir toutes les voix et tous les instruments en une ultime invocation. Quand les lumières se rallument, on est presque surpris de se retrouver au Trabendo et pas dans une forêt sombre ornée de statues de bouc. On se rend alors compte que l’ascension rapide du groupe britannique créé en 2017 est parfaitement justifiée au vu de la prestation tout simplement magique qu’il vient d’offrir. Son line-up est resté le même pendant huit ans et, quand on voit à quel point les énergies des membres se complètent et s’enrichissent mutuellement, on ne peut que leur souhaiter davantage d’années ensemble pour notre plus grand plaisir.
