4 avril 2025, 8:00

SCOWL

Interview Kat Moss


Véritable révélation de ces dernières années dans le milieu hardcore, SCOWL est de retour avec un deuxième album, quatre ans après « How Flowers Grow ». « Are We All Angels » est un disque cependant surprenant, qui explore avec brio des directions très éloignées du style qui a révélé le groupe, ajoutant une nouvelle dimension sonore. Nous avons rencontré Kat Moss, chanteuse du groupe, qui nous révèle les secrets de cette nouvelle production.
 

Comment te sens-tu au moment de la sortie de « Are We All Angels » ?
Kat Moss :
Je suis en tournée actuellement, donc pour être tout à fait honnête, je me suis surtout concentrée sur les concerts. On est plutôt crevés, mais je me sens bien. J’ai hâte ! Je veux juste que le monde l’ait entre les mains.

Qu’as-tu pensé des retours du public sur les nouveaux morceaux interprétés pour la première fois pendant cette tournée ?
Jusqu’à maintenant, ça a été surprenant : ils ont été très positifs, et il y a pas mal de monde qui apprend les paroles très vite, ce qui est vraiment formidable ! C’est très gratifiant.

Après avoir sorti quelque chose de très brut avec « How Flowers Grow », vous avez pris une direction plus mélodique sur l’EP « Psychic Dance Routine », puis avec cet album, qui me rappelle un peu L7 par moments. Quels éléments ont contribué à ces nouvelles sonorités ?
Je dirais qu’ils sont multiples. C’est surtout le fait que le groupe aime énormément de styles différents de musique. On veut s’inspirer de toutes ces choses, et pas seulement du hardcore. Et puis, la plupart d’entre nous - Malachi (Greene, ndlr), notre guitariste, Cole (Gilbert, ndlr), le batteur, et moi-même - n'étions pas très expérimentés musicalement quand nous avons commencé le groupe. Nous avons donc évolué en tant que musiciens également. Je pense que c’est l’autre aspect : nous sommes devenus plus sérieux, avons beaucoup appris et nous nous sommes améliorés.

As-tu dû pousser un peu ta voix dans le clean pour arriver à ce résultat ou est-ce une dimension vocale que tu n’avais pas encore explorée ?
Honnêtement, j’adore chanter tout simplement. J’ai toujours aimé ça. Non pas que je pense que j’aie toujours été très douée pour le chant, mais ça a toujours été quelque chose que j’ai apprécié faire. Il n’a donc pas été si dur d’écrire ces chansons, parce que j’aime écrire celles où je chante. Et c’était vraiment motivant d’aller enregistrer en ayant pour objectif de chanter réellement sur chaque chanson. Pour chaque moment où je crie, c’était très intentionnel de le placer là et de cette manière. Je voulais vraiment essayer de communiquer des sentiments que j’avais sur cet album, avec une approche un peu différente, et de permettre à la poésie de parler d’elle-même, en laissant les mélodies et harmonies plus douces communiquer.

On ressent effectivement toute la frustration dans les cris, et j’ai l’impression que les paroles tournent beaucoup autour des thèmes de la dépression et de l’anxiété. Est-ce que tu vis ça, alors que le groupe devient très vite très populaire ?
Oui, absolument. Je pense que tout le monde ressent ces sentiments. Pour ma part, je les ai vécus avant même de rejoindre un groupe. Je dirais que les douleurs grandissantes sont réelles, et c’est majoritairement la peur d’être mal perçue ou mal comprise. Ce n’est pas un processus facile de l’extérioriser : c’est plutôt inconfortable, mais c’est très gratifiant de se recentrer après avoir sorti tout ça, dit toutes ces choses, et pris conscience que cela n’avait pas d’importance. Quand je le décortique, cet album parle beaucoup de cette angoisse, et c’était vraiment cathartique d’en sortir en me disant "j’ai vraiment tout extériorisé", tu vois ? Et maintenant, il y a cette part en moi qui accepte qui je suis. Je pratique constamment une forme d’acceptation profonde, peu importe ce que je fais et qui je suis.

J’ai beaucoup aimé la chanson « Are We All Angels », à laquelle beaucoup pourront s’identifier au niveau des paroles. Tu extériorises ces sentiments en écrivant, mais est-ce aussi pour faire de la prévention, d’une certaine manière ?
Je pense que c’est un peu des deux. J’ai l’impression que notre monde intérieur et notre relation avec nous-mêmes a un lien direct et une forte corrélation avec notre extérieur, avec ceux qui nous entourent et à leur manière de nous voir. Personnellement, je sais que beaucoup de monde me consomme et me perçoit, et je pense qu’il est important pour moi d’être consciente du fait que, même si j’ai érigé des murs et que j’ai théoriquement une vie privée, ce que je traverse est toujours perceptible de manière évidente à travers mon travail. Et c’est voulu, dans une certaine mesure. Je veux traiter ça. Tout en me demandant ici si on est tous des anges. A travers ses paroles, la chanson est une expulsion désespérée de vérité, de vulnérabilité, mais aussi un cri de guerre désespéré pour les gens qui reconnaissent et comprennent le pouvoir qu’ils ont en eux.

"Je voulais vraiment essayer de communiquer des sentiments que j’avais sur cet album, avec une approche un peu différente,
et de permettre à la poésie de parler d’elle-même, en laissant les mélodies et harmonies plus douces communiquer."​


« Not Hell, Not Heaven » est un autre morceau que j'ai beaucoup apprécié, mais je pense ne pas en avoir totalement saisi le sens. Peux-tu m'apporter quelques éléments pour mieux le comprendre ?
Oui, cette chanson parle de se sentir coincé, et de traverser le deuil, ou peut-être plutôt la part de colère du deuil. C’est se sentir pris au piège entre vivre un rêve et aussi un enfer. Un peu comme être dans l’œil du cyclone.

Un autre de mes titres préférés, c'est « Suffer The Fool (How High Are You) », qui semble parler d’une relation avec quelqu’un de narcissique…
J’adore cette chanson, merci de l’avoir soulignée ! « Suffer The Fool (How High Are You) » parle d’être aspiré par une situation dans laquelle on ne veut pas se trouver. On ne s’y sens pas bien, on déteste chaque instant et on es piégé. Je pense que ça le résume bien. Mon conseil pour en sortir, c'est de reconnaître son propre pouvoir, que chacun puisse briser n’importe quel cycle dans la vie en opérant des changements. Ils ne sont peut-être pas faciles, financièrement ou pour la stabilité… Je comprends les vrais soucis de l'existence, mais il y a beaucoup de puissance dans le fait de reconnaître son propre libre arbitre.

Vos clips sont très colorés, avec beaucoup de plans cut et de zooms qui donnent un sens d’urgence, et une belle référence au film d’animation « Coraline ». Parle-nous de la création de ces vidéos…
On s’est tellement amusés à les faire pour cet album ! On avait une plus grande équipe que d'habitude, et plein de "jouets" avec lesquels nous amuser, en gros. C’était vraiment sympa. J’ai toujours été plutôt motivée et intéressée par la création de clips, c’était vraiment super ! Avec le recul, je réalise qu'on a travaillé avec davantage de gens en dehors du groupe et de notre cercle proche, plutôt que ça se fasse juste avec des bouts de ficelle et de l’énergie. On a eu l’opportunité de travailler avec une vraie équipe, ce qui est dingue et tellement sympa !


Quelle chanson de l’album correspondrait le mieux à ton humeur aujourd’hui ?
Probablement « Fleshed Out », parce que je me sens très fatiguée et je ne tiens pas vraiment en place… je vais sûrement aller prendre un café après. On a conduit beaucoup aujourd’hui et je suis crevée. J’aimerais vraiment courir un bon kilomètre, mais je ne pense pas que j’aurai le temps, donc je suis… J’aimerais trouver les mots pour le décrire, mais j’ai des impatiences, un peu comme pendant le moment où il y a du suspense dans un film d’horreur. Je suis un peu agitée, mais ça va.

Vous allez bientôt jouer trois concerts en France, le 16 mai à Bordeaux, le 22 à Lyon et le 23 à Paris. A quoi doit s'attendre le public français pour ces dates ?
On espère que ce sera un moment stylé ! Ces concerts seront fun, et j’espère que les gens danseront. J’adore Paris, c’est littéralement l'un de mes endroits préférés où on a joué en dehors des Etats-Unis, parce que c’est dingue ! J’ai très hâte.

Et qu’est-ce que tu espères des autres villes où vous allez vous produire ?
Je ne sais pas à quoi m’attendre, mais j’ai très hâte. J’ai des espoirs, mais pas d’attentes. Je serai très heureuse, quoi qu’il arrive ! Je serai honnêtement très heureuse de jouer ces concerts !

Vous vous êtes produits au Hellfest l’année dernière, ce qui a beaucoup fait parler de vous par ici. Avec le recul, que retiens-tu de ce concert ?
J’adore le Hellfest, c’était vraiment génial ! Honnêtement, c'est un rêve devenu réalité. Le Hellfest est une référence absolue, et d’être sur cette scène, c'était un moment vraiment particulier. Ils ont publié la vidéo du concert, et j’en suis particulièrement fière. J’adore cette vidéo !

Comment parvenez-vous à doser et mélanger les styles pendant vos concerts en ce moment ? Parce qu’au Hellfest c’était majoritairement hardcore, mais tout de même avec « Psychic Dance Routine » dans la setlist. Est-ce que vous allez faire 50/50 ?
Eh bien, c'est assez varié. Actuellement en tournée, on est plutôt en première partie de MOVEMENTS et CITIZEN, donc on n’a pas toujours un set assez long pour interpréter toutes nos nouvelles chansons et à la fois nos classiques hardcore, plus nos titres classiques qui ne sont pas hardcore. C'est vraiment marrant de jouer avec les setlists, de les moduler pour voir ce qui marche. Avec un concert en tête d’affiche, j’espère qu’on aura le temps de jouer un peu plus de chaque !

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