
Voilà votre rubrique préférée prête pour que vous abordiez le mois de mai en toute sérénité, sans douter de la qualité du son à venir. Le trio de l’extrême – à savoir Clément, Crapulax et Aude – vous propose cette fois du death, du black, bien sûr, mais aussi du post-rock. Entre riffs glaciaux ou techniques, rythmes blastés ou nuancés, voix growlées ou hurlées, féminines ou masculines, il y en a pour tous les goûts et toutes les couleurs. Bon, on ne vous cache pas que le noir domine quand même. Bonne écoute !
SUPREME VOID : « Towards Oblivion » (Dolorem Records)

Redoutable trio originaire de Pologne, SUPREME VOID signe ici son premier album sur Dolorem Records. Un méfait aux ambiances opaques, impénétrables, nappées d’envolées rythmiques compactes, noirâtres et gluantes comme une tonne de goudron. Œuvrant dans un death metal sombre, dissonant et technique en diable, « Towards Oblivion » reste certes brutal mais toujours maîtrisé. Les mélodies y sont discrètes, meurtrières et les parties de batterie exécutées avec méthode et rigueur. La créativité de ces dernières, la finesse du toucher se dégageant de chacune des frappes, méthodiques et précises. Et que dire de cette production idéale pour le style, d’une subtile intensité, qui vient percuter les esgourdes avec doigté ? Mais ce ne serait pas lui rendre justice que d’occulter le travail de titan réalisé par Przemysław "Exile" Bachaj sur ses parties de guitare, mais aussi de basse. Mélodiques, comme évoqué plus haut, ces dernières prennent ici un malin plaisir à happer l’auditeur à grands coups de dissonances et de breaks irrésistibles. Quand ce n’est pas sur des solos ciselés avec classe. Et le bonhomme assure également les growls, empreints d’une sauvagerie et d’une hargne quasi palpables. La technicité propre à la musique des Polonais n’est ici utilisée que pour mieux servir sa cause, créant un fil rouge aux allures de dédale dans lesquels on tire un véritable plaisir à se perdre...
(Clem)
BANK MYNA : « Eimuria » (Medication Time Records/Stellar Frequencies/Araki Records)

Changement de cap géographique avec un détour par Paris pour faire la connaissance du quatuor BANK MYNA. Changement également de cap stylistique puisqu’ici c’est un post-rock flirtant avec le doom qui est à l’ordre du jour. Portée par une très belle prestation de Maud Harribey au chant, la musique proposée par le groupe est loin d’être évidente à cerner aux premiers abords. Sombre et tribal, charriant une tension de chaque instant, des atmosphères mystiques, BANK MYNA navigue avec malice entre ambiances de fin du monde et embardées sauvages où les guitares hurlent leur détresse à qui veut bien l'entendre. « Eimuria » prend à ce titre des allures d’une montée en puissance, sournoise et déterminée, comme en témoigne cette section rythmique nuancée par un subtil jeu sur les tempos ("The Shadowed Body" et ses multiples cassures en sont un bon exemple). Qui distille au passage un paysage sonore brumeux, dégageant en toile de fond une véritable mélancolie, une sensibilité à fleur de peau. Une sensibilité qui confère à ce deuxième album une impression de force tranquille. Comme pour mieux introduire "Burn all the Edges", cette chute qui n’en finit pas où, curieusement, la noirceur se voile pour laisser place à quelques rayons de lumière bienvenus. Une chute qui laisse entrevoir, à sa manière, la fin d’un voyage avec "L’Implorante" et ses 13 minutes épiques. Un voyage qui ne pourra laisser indemne celui qui s’y risquera...
(Clem)
PATHS TO DELIVERANCE : « Ten » (Malpermesita Records)

PATHS TO DELIVERANCE est un groupe de black metal français conceptuel et avant-gardiste qui mêle horreur, psychologie et ambiances mystérieuses dans un premier album d’une rare intensité. Les dix titres de « Ten » ne cochent aucune case conventionnelle, mais combinent plutôt des influences très black, des passages pagan, des moments atmosphériques suspendus. Pour cette nouvelle formation, A.S.A (AZZIARD, ALKHEMIA) a su s’entourer de musiciens expérimentés et inspirés tels que Kevin Paradis (ex-BENIGHTED) à la batterie, mais aussi des membres de NYDVIND ou SKAPHOS. Et c’est avec virtuosité que tous ensemble, ils ont réussi à produire un album unique, aux multiples univers. Les mélodies sont hypnotiques ("The Calm Before The Storm"), les rythmes sont musclés, les growls sont habités ("Alone In The Dark", "Rêveries") et, surtout, les ambiances sont malsaines et captivantes ("Delirium") avec des dissonances glaçantes. Il y a même des voix claires féminines ("Here Lies…") et des intros acoustiques ("The Storm") et jusqu’à l’excellent "Redemption", on est tenu en haleine par une musique à la fois brutale et mélodique. PATHS TO DELIVERANCE a trouvé la voie de la liberté artistique et nous emmène volontiers avec lui. A ne pas manquer.
(Aude Paquot)
SVART VINTER : « Isvind » (Non Serviam Records)

Contrairement à ce que l’on pourrait penser en écoutant son black metal très norvégien, SVART VINTER est un groupe italien né en 2021. Son deuxième album aux consonnances scandinaves, « Isvind », révèle le côté froid et saisissant de sa musique brute, sans artifices. Dès les premières notes de "Torment", on est saisi par un true black cinglan, mais c’est sur "Frozen Tomb" que les rythmes deviennent blastés, les cris torturés et les guitares massacrées. Les titres s’enchaînent rapidement, sans laisser de répit à un auditeur complètement pris dans la tempête. Si les intros se veulent soft avec un mid-tempo trompeur, les riffs s’imposent par leur agressivité. Des morceaux comme "Isvind" comportent quelques passages plus atmosphériques, mais c’est bien la dévastation qui règne en maîtresse tout au long de l’album. Pour preuve le magnifique "Abyss" dans la droite lignée du vieux black norvégien dont on peut avoir la nostalgie. Pour terminer, le sompteux, très sombre et envoûtant "Beneath The Night’s Cold Gaze" ouvre des horizons mystérieux avec un rythme lourd, des vocaux hurlés dans la nuit glacée et, surtout, une atmosphère lugubre. SVART VINTER joue la musique qui correspond à son nom : l’hiver italien n’a jamais été aussi sombre.
(Aude Paquot)
PYRE : « Where Obscurity Sways » (Osmose Productions)

Avec une empreinte vocale qui n'est pas sans rappeler celle immédiatement identifiable de John Tardy et un son résolument old-school, cette formation de death metal composée d'anciens NEVA et BLAZING RUST a de quoi mettre tout le monde dans sa poche. En revanche, le fait qu'elle vienne de Saint-Pétersbourg (Russie) ne va sans doute pas nous permettre de les voir de sitôt sur une scène (dans l'Hexagone du moins) ou, en tout cas, cela risque de limiter leurs apparitions. Et quel dommage ! Energique à souhait, parsemée d'analogies avec les floridiens d'OBITUARY ("Domain Of The Nameless Rites" ou l'excellent "Murderous Transcendence"), de parties solo de Fred et de Roman très inspirantes et de variations de tempos maîtrisées (plus posées que sur « Chained To Ossuaries », l'album précédent), la musique de PYRE met bien la banane sans révolutionner le genre, juste histoire de le pérenniser avec un album de qualité. Après tout, c'est tout ce qu'on demande !Seuls bémols pour ce troisième album qui marque leur retour post-covid (parce qu'il en faut quand même un petit peu!) : quelques titres passe-partout et 2 introductions pas franchement indispensables.
(Crapulax)
CYTOTOXIN : « Biographyte » (Blood Blast Distribution)

Nouvelle tentative pour faire connaître CYTOTOXIN à sa juste valeur puisque la formation de death metal technique allemande avait déjà fait l'honneur d'une chronique (excellente au demeurant et par un chroniqueur de grand talent qui plus est...) à propos de son quatrième opus, « Nuklearth » (n° 38). On reste dans le nucléaire d'ailleurs puisque « Biographyte » propose de nous plonger dans les séquelles de la catastrophe de Tchernobyl (1986) vouée à laisser des traces radioactives pendant plusieurs siècles. Du moins, c'est ce qu'on croyait sauf que récemment, Exlterra, une firme suisse spécialisée dans la dépollution, aurait trouvé la parade qui consisterait à tirer des positrons à haute vitesse sur les zones contaminées comme Tchernobyl ou Fukushima, ce qui aurait pour effet de décomposer les isotopes radioactifs, réduisant les rayonnements atmosphériques de 47 % et du sol de 37 %. Du coup, en 5 ans, les zones seraient décontaminées ! Maintenant qu'on a fait notre Jamy metal, abordons ce « Biograhyte » de très haute teneur technique ("Hope Terminator") comme on est en droit de s'y attendre, violent à souhait ("Condemnesia") et servi par une production impeccable. Que demander de plus ?
(Crapulax)