13 mai 2025, 23:59

DECAPITATED + CRYPTOPSY + WARBRINGER + CARNATION

@ Wasquehal (The Black Lab)

En ce 13 mai le Black Lab propose une affiche aussi brutale qu’internationale. Cette soirée printanière est placée sous le signe du death, avec les Belges CARNATION, les Canadiens  CRYPTOPSY et, en tête d’affiche, les Polonais  DECAPITATED. Les Américains WARBRINGER ajoutent une touche thrash à cette odyssée bestiale, baptisée "Infernal Bloodshed", qui traverse l’Europe au fil de 36 étapes.


CARNATION offre une demi-heure intense où alternent lourdeur – le mid-tempo écrasant, ténébreux "Submerged In Deafening Silence" – et vitesse – le quasi classique "Where Death Lies" joué en conclusion. Les Belges maîtrisent les codes du death old-school, celui du début des années 90, qu’il vienne des USA ou de Suède ("Sepulcher Of Alteration") pour assurer un set d’une indéniable efficacité ; telle est la paire "Maruta" / "Metropolis" qui, assénée d’entrée, fait headbanger les nombreux spectateurs. Simon Duson, le chanteur, au physique si ordinaire dans la vie de tous les jours – on l’imaginerait bien comptable dans une PME en banlieue d’Anvers – se transforme en une créature démoniaque sur scène, maquillage rouge sang, yeux cernés d’un noir coulant le long de ses joues, chaînes autour du corps sur sa veste en cuir. Un personnage tout droit sorti d’un film d’horreur... Derrière ce look travaillé, le frontman ne néglige pas, loin de là, ses growls qui évoquent ceux du légendaire George Corpsegrinder.


WARBRINGER, après une intro pompeuse, signe une prestation thrash quasi-parfaite dans un style très 80’s, à l’image du look des Américains, adeptes du t-shirts sans manche ou de la veste en cuir à même la peau. Les riffs carrés, les soli joués avec emphase et décontraction, et l’attitude positive des cinq Californiens offrent 35 minutes de folie. Ce brio fait oublier le côté kitsch de l’épée brandie par John Kevil sur le brillant "The Sword And The Cross", seul titre tiré de « Wrath and Ruin », le pourtant excellent dernier album du groupe. Les fans, en transe, pogotent à tout-va, se lancent dans de féroces circle-pits et n’hésitent pas à grimper sur scène avant de s’essayer, avec plus ou moins de réussite, à l’art délicat du crowdsurfing. Comment résister, en effet, à un brûlot comme "Firepower Kills" qui a ouvert les festivités dans un flot de hargne et de rage, guitares abrasives en avant ? Comment ne pas exploser quand retentit "Hunter-Seeker", aux faux airs de melodeath ?  Comment ne pas brailler, le poing levé, les refrains de "Remain Violent" ou de "Living Weapon" ? Le set se conclut par la plongée dans la fosse de John Kevil, tout sourire et ravi de sa soirée. Merci Messieurs !


CRYPTOPSY invite sur scène un accordéoniste de rue rencontré la veille sur la place de la Déesse à Lille. Initiative sympathique mais le quart d’heure warholien du bonhomme est longuet même s’il reçoit des applaudissements polis. Comme le concert sera amputé d’un ou deux morceaux suite à un problème de batterie, les Canadiens, sans leur bassiste habituel, remplacé par un ami, n’auront guère le temps de convaincre. Portée par un Matt McGachy aux screams longs et tranchants, la formation claque ses titres ultra violents... qui semblent tétaniser les spectateurs, peut-être aussi hypnotisés par les lights d’une blancheur hospitalière. Même si le frontman va au contact des premiers rangs, pied posé sur les retours, et n’hésite pas à s’adresser en français à la salle (« Vous permettez que je parle français ? », demande-t-il), il se dégage de ces morceaux ultra techniques, riches en blasts et en coups de cymbales, une froideur syncopée, que réchauffent à peine les soli ("Godless Deceiver"). Certes j’exagère : "Slit Your Guts" reste un modèle du genre dans sa succession de riffs balancés à mille à l’heure avant d’insuffler un léger groove dans sa dernière partie. Peut-être aurait-il fallu voir les musiciens jouer plus longtemps pour parvenir à s’immiscer dans les compositions complexes du groupe ?


Arrive enfin, pour 70 minutes de furie, un DECAPTATED qui ne sera avare ni de soli, ni de parties de batterie impressionnantes. Les quatre Polonais, physiquement imposants, tout de noir vêtus, montent sur scène comme on pénètre sur un champ de bataille, avec une conviction et une volonté totales. Cette énergie, magnifiée par des lights appropriés, nimbée d’une fumée omniprésente, se transmet aussitôt aux fans : dès "A Poem About An Old Prison Man", ils enchaînent pogos et circle-pits, tandis que les slammers s’en donnent à cœur joie. Les poings se tendent vers le ciel quand la foule scandent des « Oh » à pleins poumons.

Eemeli Bodde, chanteur du quartette depuis 2024 et présent sur aucun enregistrement, s’affirme sans complexe, s’approprie les compositions tirées des huit albums studios du groupe – même s’il ne dégage pas de son chant la magie, réelle ou fantasmée, de Covan... Ce passage en revue de la riche discographie de ces vétérans à l’histoire aussi riche que tragique permet de glisser du brutal death technique du début des années 2000 (quelle claque aujourd’hui encore que "Winds of Creation" !) à une musique, toujours aussi agressive mais plus groovy, qui glisse vers d’autre style, à l’image du quasi indus "Kill The Cult" à la structure répétitive ou du mystérieux "Suicidal Space Program". Certains titres plus récents, comme "Just a Cigarette", restent de jolies bombes 100 % traditionnelles ! La mélodie est souvent présente et, servie par un son de qualité, une composition comme "Spheres Of Madness" – alliage parfait d’harmonie et de chaos doté d’une intro diabolqiue et d’un refrain percutant – brille d’une beauté rare. Quand s’éteignent les dernières notes de "Iconoclast", que la lumière se rallume, les visages, rouges et en sueur, arborent de larges sourires : DECAPITATED a tranché dans le vif !

Portfolio

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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