NEFARIOUS sort son premier album autoproduit, « Addicted To Power ». Dit comme cela, une telle annonce semble aussi excitante que la perspective de voir un concert d’Hoshi sur Culture Box, en dégustant un poke bowl. Mais quand je vous aurai dit que le groupe en question est constitué de Rick Hunolt (ex-EXODUS) à la guitare, de Doug Piercy (ex-HEATHEN), également à la guitare et à la production, de Katon W. De Pena (HIRAX) au chant, de Tom Gears (BLIND ILLUSION) à la basse et de Will Carroll (DEATH ANGEL) à la batterie, vous commencerez à manger votre chapeau. Ou votre casquette "Thrasher", c’est selon. Les supergroupes semblent avoir le vent en poupe depuis quelque temps dans le monde du thrash, comme l’a démontré l’implacable album de CATEGORY 7 l’an dernier. Mais la comparaison avec le side-project de John Bush s’arrête toutefois là. Loin d’avoir la prétention de révolutionner le genre et d’y apporter une touche de modernité comme l’a fait la formation susmentionnée, NEFARIOUS récite son guide illustré du thrash old-school par cœur. Comment en vouloir à ces types quand on sait qu’ils répétaient déjà à deux pas du local de METALLICA quand James Hetfield arborait encore une très seyante frange et qu’une envahissante acné lui mangeait le visage ?
"Mirror Death", le premier morceau, plante le décor : du metal meuchant et fonceur qui s’octroie volontiers quelques freinages (pas trop non plus, hein !) et qui parsème ses compos d’incursions mélodiques assez bien senties, celles-ci étant principalement dues aux guitares d’Hunolt et de Piercy. L’injustement sous-coté Katon W. De Pena y fait des merveilles, avec ce chant atypique qui pourrait être décrit comme un improbable mix entre celui de Steve "Zetro" Souza et celui de Messiah Marcolin ! "Addicted To Power", le titre, continue de perpétuer la tradition d’un thrash des origines, celui qui était encore marqué du sceau de la NWOBHM et qui permettait à certains groupes, disons plus classiques (on pense à METAL CHURCH et à FLOTSAM AND JETSAM), de concourir dans la même catégorie que MEGADETH, TESTAMENT et consorts. Comme je l’écrivais plus haut, les soli, très mélodiques, donnent une coloration inattendue (toutes proportions gardées, bien sûr !) à la musique de NEFARIOUS et les chœurs, façon "gang des rues", nous renvoient immanquablement aux premiers EXODUS. Welcome back to 1985 ! Un voyage dans le temps encore renforcé par la production, délibérément brute de décoffrage et même un poil trop rêche. Mais ce n’est que mon avis.
À côté de tels brûlots, nos cinq lascars savent aussi ménager leurs efforts et proposer des morceaux plus lents, comme "Master Plan", un mid-tempo aussi efficace qu’aplatissant ou "Snarler", à la fois simple et épique, qui n’est pas sans rappeler ce que pouvait proposer MANOWAR à ses débuts (le phrasé de De Pena y est très proche de celui d’Eric Adams). Deux chansons qui s’inscrivent paradoxalement parmi les moments forts du disque. Mais tout n’est pas idyllique sur cet « Addicted To Power » et si la spontanéité du projet ne peut être mise en doute, on peut se demander si Hunolt and co ne se sont pas trop laissés aller, au risque, parfois, de tomber dans la facilité. Ainsi, "Day After", malgré son rythme galopant, retombe comme un soufflé au bout d’une minute et "One Nation Enslaved" enquille les plans éculés à un rythme que même la plus énervée des formations de grindcore ne pourrait suivre. J’en veux pour preuve les breaks et les harmonies du milieu du morceau qui reprennent presque note pour note des plans de SLAYER, ANTHRAX et METALLICA ! Mais ne boudons pas notre plaisir car si ces mecs ont contribué à inventer la poudre, reconnaissons qu’ils savent encore bougrement bien la faire parler !