Lorsque, en 1996, CORONER a tiré sa révérence, la nouvelle a été reçue avec une profonde tristesse par les fans. Le groupe s'était imposé avec un thrash metal technique qui incarnait parfaitement l’esprit sombre de son univers, une évidence dépassant largement l'incarnation de son nom et des titres de ses albums. Grâce à son style unique, l'essence de ce trio lui a permis de se démarquer dans la scène metal et de devenir un groupe culte en l’espace d’une décennie et de cinq albums. Il n’est donc pas surprenant de les voir revenir sur scène par la grande porte en 2010. L’intelligence des Suisses a certainement été de ne pas s’être emballés face à ce regain d’intérêt et d'avoir su rester présents ces quinze dernières années. Ils ont fait revivre leur passé, comme si « Grin » était une sorte de teasing subliminal indiquant que l’aventure n’était pas vraiment terminée.
Après quinze ans, l’inévitable devait arriver. Alors que les catholiques fêtent l’Assomption de la Vierge Marie, ce 15 août 2025, les fans de CORONER célèbrent leur renaissance discographique avec le bien nommé "Renewal", un premier single qui annonce un renouveau tant souhaité et peut-être, chez certains, inespéré. Même si le riff principal fait écho à METALLICA ou VOLBEAT, la fluidité du jeu de Tommy T. Baron et la voix emblématique de Ron Royce en font un titre imparable et addictif qui, telle une drogue dure, s'immisce dans votre cortex sensoriel pour ne plus le quitter. Après cette entrée en matière, le fan ne pouvait qu’être impatient de l’annonce imminente de la sortie de « Dissonance Theory ». Septembre est l’occasion d’un second single qui enfonce le clou : le tempo rapide de "Symmetry", tout aussi imparable, emmène l’auditeur jusqu’à un superbe solo de Tommy, suivi d’un mid-tempo d’une extrême profondeur.
À la veille de la sortie de ce 6e album, on ne peut qu’être impatient de découvrir les huit nouvelles compositions. Tout commence par une pochette qui incarne le renouveau dans la continuité, retrouvant la mise en page des précédentes, dans laquelle l’énigmatique spirale de l’ADN émerge d’un chaos morbide. Dans un monde où l’humanité se construit inexorablement un univers dystopique, l’ADN reste un invariant qui, du chaos, fera inexorablement émerger une nouvelle forme de vie.
"Oxymoron" introduit parfaitement ce sombre espoir du renouveau, que "Consequence" confirme avec son passage mélancolique à mi-morceau. Si "Sacrificial Lamb" met du temps à démarrer, commençant sur un martèlement répétitif suivi d’un solo, le titre est riche par la diversité des plans qui lui donnent son relief. Le mid-tempo de "Crisium Bound" incarne superbement la puissance de la lourdeur du son CORONER, et son accélération à l’occasion du solo assure parfaitement la transition avec "Symmetry". "The Law" commence par un arpège mélancolique imparable. Si sa première partie, assez calme, lui donne presque des airs mainstream, l’accélération du tempo dans la seconde partie apporte à l’ensemble une vraie richesse. Le riff, le gimmick et la musicalité de "Transparent Eye" résument à eux seuls l’essence de CORONER.
En se laissant emporter par "Trinity", on peut se demander si la virtuosité du trio n'incarnerait pas la Sainte-Trinité du metal. A noter, la fin du titre jouée au piano, qui montre que le groupe suisse sait surprendre tout en restant pertinent. Dans la continuité de "Renewal", "Prolonging" confirme que nous souhaitons jouer les prolongations. Cet instrumental surprend même avec son solo d’orgue Hammond, que Jon Lord ne renierait probablement pas.
Longtemps espéré, CORONER signe un retour tonitruant et réussi. La légende n’est pas morte, au contraire, elle renaît de ses cendres en ayant su prendre le temps de se reconstruire pour rester fidèle à son ADN, tout en le modernisant.