8 décembre 2025, 23:59

GOJIRA + COMEBACK KID + NECKBREAKKER

@ Nice (Palais Nikaïa)


En 25 ans d'existence, GOJIRA ne s'était jamais encore produit à Nice. « Le plus près qu'on avait joué, c'était à la MJC Picaud de Cannes, en 2005, confiait Jean-Michel Labadie, le bassiste, moins d'une heure après la fin d'un show magistral. Je ne me souviens plus du concert, mais on s'était pris un parpaing dans la vitre du van de location. Heureusement, il n'y avait pas le matos à l'intérieur, mais on était dégoûtés. On n'avait sorti que deux albums, on n'avait pas un rond et il avait fallu rembourser les dégâts… » Voilà également bien longtemps que les Enfants sauvages n'avaient pas donné une tournée digne de ce nom dans l'Hexagone pour cause de conquête planétaire. Une lacune désormais réparée avec les 12 dates du "France Tour 2025" qui prouvent que oui, on peut parfois être prophète en son pays.

Vingt-cinq ans après ses débuts, GOJIRA est devenu l'un des plus grands groupes internationaux de metal en activité et joue désormais en tête d'affiche sur les plus prestigieux festivals à l'étranger. Le quartet, qui boxait déjà en première division depuis « Magma » (2016), a encore gagné en envergure avec « Fortitude » (2021), son dernier LP en date, avant que son apparition à la cérémonie d'ouverture des J.O. de Paris, en 2024, ne le propulse dans la stratosphère. Vers l'infini et au-delà ! Car jamais aucun groupe étiqueté metal, de quelque nationalité que ce soit, n'avait connu pareille consécration. « Nous avons reçu des félicitations de tout le monde, même des musiciens de RAMMSTEIN qui ne sont pas forcément les plus communicatifs, explique Gojimitch. Tous nous ont dit qu'on avait vraiment joué un grand rôle au niveau exposition médiatique pour le metal. » Ça s'appelle être définitivement adoubé par ses pairs.


Ce soir, comme sur l'intégralité de la tournée française dont Nice est la neuvième date, ce sont les jeunes Danois de NECKBREAKKER qui sont chargés d'ouvrir les hostilités. Malgré leur logo aux portes du grind et le titre de leur carte de visite, « Within The Viscera », ils pratiquent un groove metal avec quelques accents death et s'ils ne disposent que de 25 minutes pour se présenter au public, la réaction est positive. Les musiciens venus du froid bourrinent allègrement devant un circle pit qui se forme spontanément, avant de se transformer, à la demande du chanteur Christoffer Kofoed, en wall of death. Un bon échauffement des cervicales.

Les Canadiens de COMEBACK KID, qui font leur entrée sur scène après la diffusion dans la sono de "Take On Me" de A-HA (v'là le décalage musical, mais quasiment tous les spectateurs chantent le refrain – même les plus jeunes), disposent quant à eux de 45 minutes pour égrener leur punk hardcore. Rodés à la scène avec un quart de siècle de carrière au compteur, ils vont caler un petit "Refuse/Resist" bien senti de SEPULTURA entre "Crossed" et "False Idols Fall". Là aussi, le public est convaincu et dans la fosse, ça continue de tournoyer.


Comme on l'apprenait fin novembre, c'est sous forme de quintet que GOJIRA se produit en France puisqu'accompagné à la guitare par Greg Kubacki de CAR BOMB, dont le groupe a enregistré son dernier EP en date, « Tiles Whisper Dreams » (2025), au Silver Cord Studio de Joe Duplantier. Ce dernier s'est en effet blessé au poignet droit suite, vraisemblablement, à une petite figure de style dans l'escalier et, à part sur un titre, se cantonne au chant. Dès les premiers accords de "Only Pain", le morceau d'ouverture, le son est parfait. Fort et clair, puissant, il résonne dans la poitrine. Une démonstration de ce à quoi devrait toujours ressembler la qualité sonore du show d'un groupe majeur. 

Côté visuel, là aussi, on évolue dans les hautes sphères avec une scénographie que seuls TOOL, IRON MAIDEN et SHAKA PONK, dans notre univers musical, ont pu proposer jusque-là. Un son et lumières de très haute volée de deux heures, magnifiant encore la force de frappe musicale du groupe. Ecrans géants avec projections de visuels et gros plans sur les musiciens, jeux de lumière, effets pyrotechniques, jets de fumée – y compris autour de la table de mixage –, GOJIRA est au sommet de son art. Joe, maître d'œuvre des pochettes du groupe, a enfin réalisé son rêve avec la projection de splendides visuels et d'animations, lui qui, dès les débuts, faisait installer un petit drap blanc en fond de scène avec un projecteur…


Contrairement à James Hetfield qui semblait presque fragile sans sa guitare sur "The Unforgiven III" dans le film S&M2 (mais il est vrai qu'il s'agit d'une chanson lente aux textes très personnels), l'aîné des Duplantier joue son rôle de frontman à la perfection. Avec ou sans guitare dans les mains, il en impose, pendant que le tentaculaire Mario pulvérise sa batterie, que Jean-Michel virevolte et que Christian Andreu joue, comme d'habitude, l'efficacité. Et notre cinquième élement dans tout ça ? En retrait au tout début du concert, Greg K. ne tarde pas à gagner l'avant de la scène qu'il occupe, au même titre que les autres musiciens. Comme s'il faisait partie intégrante de GOJIRA depuis des années. Preuve du respect et de l'humilité des Frenchies, car combien de formations de premier plan n'ont jamais hésité à planquer honteusement un musicien supplémentaire derrière un drap ou à le confiner dans un coin de la scène derrière les amplis, même quand il part en tournée avec eux pendant de longs mois ?


« From Mars To Sirius », leur troisième album, fêtant ses 20 ans en 2025, il est largement représenté avec pas moins de 8 chansons – dont un medley réunissant "Where Dragons Dwell", "To Sirius", "Ocean Planet" et "In The Wilderness". Déjà, à l'époque, il abordait les problèmes environnementaux qui leur sont chers, preuve que GOJIRA n'a pas attendu que l'écologie devienne tendance pour en parler. Séquence onirique avec "Flying Whales" et sa baleine volante qui survole le public dans la pénombre. L'occasion de rappeler brièvement que Julien Doré, qui soutient lui aussi Sea Shepherd et utilise des cétacés volants depuis deux ans à ses concerts, a fait remarquer sur ses réseaux sociaux qu'il détenait l'antériorité du concept. Certes, mais on lui rétorquera que "Flying Whales" est sorti en 2005 et que l'idée trottait dans la tête de ses géniteurs depuis. Fin de l'aparté. Quoi qu'il en soit, les deux derniers albums ne sont pas en reste avec "Silvera", "Another World" ou "Born For One Thing".

On ne peut pas ne pas citer le petit intermède où un homme masqué, "La Joconde" sous le bras – clin d'œil au récent braquage au Louvre – traverse la scène au petit trot. C'est Mario qui, de retour sur son estrade, montrera ensuite des pancartes, dont une sur laquelle on peut lire : « Vous voulez plus de double pédale ??? », suivie de « 5 minutes non-stop ??? ». Et c'est parti pour le décapant "From The Sky" !


Invitée surprise autant que de marque, Marina Viotti a fait le déplacement à Nice après être montée sur scène à l'AccorArena, comme elle le fera également à Bordeaux le 9 décembre. C'est bien sûr pour "Mea Culpa (Ah ! Ça ira !)", joué à la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 (et passé également à la cérémonie de clôture avec projection sur l'Arc de Triomphe) qui leur a valu de remporter dans la foulée le Grammy Award de “Meilleure Prestation Metal”. Une puissance vocale impressionnante et un petit coup de headbanging pour la chanteuse lyrique qui, ne l'oublions pas, jouait dans un groupe de metal quand elle était adolescente. On ne pourra pas lui reprocher d'avoir renié ses origines. La fin de la chanson donne lieu à un lâcher de serpentins en papier blancs et rouges au-dessus de la fosse, nettement plus festifs que les tripes des aristocrates à la Révolution française… La diva (au sens noble du terme) qui envoie reviendra avant le rappel pour le fédérateur “The Chant”. 

Léger bémol toutefois : si le public niçois est extrêmement réceptif à la musique, il est resté un peu apathique quand Joe s'adressait à lui. Est-ce parce que les spectateurs sont surpris de l'ampleur du show et que ce soient des "gars de chez nous" qui évoluent à ce niveau ? Un petit coup de sidération peut-être ? Allez savoir… Une chose est certaine en tout cas : les gars de GOJIRA sont venus, ils ont vu et ils ont vaincu.

Prochain concert au Heavy Week-End à Nancy, début juin. Avant un retour sur le Vieux Continent…

Setlist
Photos © Chris Cap - Portfolio

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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