9 février 2012, 0:00

VAN HALEN : "A Different Kind Of Truth" [Deluxe Edition]

Album : A Different Kind Of Truth [Deluxe Edition]

S'il y a un disque dont on ne pensait jamais entendre une note un jour, c'est bien celui-là. Fruit de la réunion improbable, mille fois annoncée, mille fois démentie, de VAN HALEN avec son chanteur originel, David Lee Roth, cet album faisait l'objet d'incroyables spéculations sur la toile depuis plus d'un an. La tournée de «réunion» de 2007, amputée néanmoins de l'excellent bassiste historique Michael Anthony et bien qu'exclusivement américaine, fut une des plus rentables de l'histoire.
Les critiques étaient partagées mais force était de constater que la plupart des dates étaient réussies, face à un public conquis d'avance.
Une nouvelle tournée pour 2012 fut annoncée avec, cette fois, des dates européennes. La nouvelle paraissait tellement incroyable qu'elle fut d'ailleurs presque aussitôt démentie. On imaginait qu'il en serait de même pour l'album quand, soudain, tout début 2012, un premier single, accompagné d'une vidéo ("Tattoo"), fut publié et l'album annoncé un peu plus d'un mois plus tard ! L'enthousiasme fut plutôt tempéré lorsque l'on s'aperçut que ce soit disant nouveau titre avait de très forts échos de "Down In Flames", obscur inédit des sessions du deuxième album (1978). On apprit, par la suite, qu'au moins trois autres morceaux n'étaient en fait que des "reboots" : "Bullethead", "Blood And Fire" et "She's The Woman", ce dernier ayant même initialement été interprété par Gene Simmons de KISS lors de l'enregistrement des toutes premières démos du groupe...

Comme l'aurait suggéré Sammy Hagar à Eddie Van Halen, le guitariste aurait donc choisi la solution de facilité et piocher dans le "back-catalogue" du groupe pour sortir cet album et aucun nouveau titre n'aurait été composé par le duo Van Halen / Roth. La pochette, quant à elle était plus qu'inspirée d'un vieil album des COMMODORES !
Profitons-en quand même au passage pour rendre un hommage mérité à l'excellent chanteur/songwriter/guitariste/musicien que fut Sammy Hagar le mal aimé (en Europe, surtout !), qui co-signa quatre albums avec Van Halen. Ces galettes n'ont absolument pas à rougir de la comparaison avec ceux de "Diamond Dave", en particulier "For Unlawful Carnal Knowledge" qui est un des deux ou trois meilleurs albums du groupe. Il est également opportun de rappeler que "The Other Half! " (l'autre moitié), nom de groupe initialement pressenti pour le projet CHICKENFOOT (Cf la chronique de Christian Lamet), et composé de Hagar, Michael Anthony, Satriani et Chad Smith, le fruit d'une démarche sincère et authentique, à défaut d'être très originale ni mercantile. Bref, une philosophie aux antipodes de cette réunion très opportune d'un VAN HALEN manifestement soucieux de faire fonctionner à nouveau le tiroir caisse et toujours plombé par des soucis d'ego.
Ainsi, fin 2011, "Diamond Dave" aurait très moyennement apprécié la requête d'Eddie lui demandant de réenregistrer les voix et cet incident aurait été à deux doigts de faire capoter l'ensemble du projet : album ET tournée...

Cependant, les meilleures soupes sont parfois faites dans les vieilles marmites chez VAN HALEN. Puisque l'on mentionnait "For Unlawful Carnal Knowledge", le titre "Right Now", par exemple, était la reprise d'une vieille démo de 1983 ébauchée sur la B.O. d'un obscur "teen-movie" de 1984 : "The Wild Life" (tout comme "Blood And Fire" sur le dernier album).
L'écoute de ce "A Different Kind Of Truth" ne s'en faisait que plus pressante, quatorze ans après le raté "III" et presque trente après le dernier album avec David Lee Roth.
Premier constat : exit les claviers (à part quelques discrètes nappes sur "Tattoo"), et les fans de "Van Hagar" en seront pour leurs frais. C'est le retour du VAN HALEN de David Lee Roth : direct, simple (parfois simpliste, hélas) et plutôt énergique. C'est du rock US "rentre dedans", frôlan! t même parfois le speed, avec une production impeccable et un très gros son (épaulé par la basse de Van Halen "junior", très en avant sur quasiment tous les titres), bref, une sorte de retour vers le futur aussi surprenant que rafraîchissant de la part de quasi sexagénaires. Une écoute plus approfondie est en revanche plus mitigée...

Le premier extrait n'avait pas laissé une impression indélébile mais force est de constater que "Tattoo" finit par s'immiscer quelque part dans le cerveau pour ne plus en bouger. Il y a quelque chose de groovy et une simplicité finalement assez efficace dans cette chanson qui ne fonctionne pas si mal même si elle ne s'inscrira jamais dans la lignée des incontournables du groupe. Même remarque pour le réenregistrement de "She's The Woman" qui bénéficie d'une production terrible et d'une interprétation sans failles donnant tout simplement une seconde vie à cet ex-inédit.
Le premier tiers de l'album est à l'avenant et tout aussi réjouissant : "Blood And Fire", mélodique à souhait, renvoie directement aux grandes heures du VAN HALEN des (tout) débuts et le très bon "You And Your Blues"! fonctionne tout aussi bien malgré un "Diamond Dave" un peu à la peine sur le refrain.

"China Town" est une leçon de tapping de la part d'un Eddie très en forme et qui ne ménage pas sa Kramer. Le morceau vire assez vite, hélas, à la démonstration technique aussi impressionnante que vaine. Mais c'est après que les choses se gâtent vraiment puisque l'on oscille entre le quelconque ("As Is"), le convenu ("The Trouble With Never", "Outtaspace"), le faussement bluesy et franchement raté ("Stay Frosty"), le médiocre ("Honeybabysweetiedoll"), ou le carrément pénible ("Bullethead" qui aurait décidément gagné à rester inédit), le tout étant plombé par un manque d'inspiration manifeste tant au niveau de l'interprétation que des compositions. Heureusement que l'imparable refrain et l'excellent gimmick à la six cordes de "Big River" ainsi que le riff quasi heavy de "Beats Workin&rsquo! ;" ont le bon goût de clôturer l'album sur une note plus positive.

Au final, "A Different Kind Of Truth" ne déçoit pas autant que le laissaient penser les premiers extraits distillés au cours du mois précédant sa sortie et contient même son lot de pépites musicales. Et puis, ne boudons pas notre plaisir : celui de réentendre David Lee Roth au sein de VAN HALEN. C'est évidemment un album alibi à la tournée qui suivra et sans doute le dernier du groupe mais il parvient à surprendre par son énergie, sa fougue et, avouons-le, un plaisir de jouer, aussi manifeste et communicatif que celui des frères ennemis de CHICKENFOOT.
Seulement voilà : on est forcément moins indulgent avec VAN HALEN et on regrettera qu'une carrière aussi exceptionnelle s'achève sur un album certes agréable mais inégal et trop dilué.

Blogger : Pierre Graffin
Au sujet de l'auteur
Pierre Graffin
Un samedi de 1983, un concert diffusé aux "Enfants du Rock", sur Antenne 2 (cela ne nous rajeunit pas !) : une tournée de GENESIS, celle de l'album où figure "Mama", titre qui fut élu, en son temps, le plus "heavy" de l'année par la presse "hard rock" (le terme "metal" n'était pas encore tellement de mise !) unanime. J'ai su, ce soir-là, ce que j'avais toujours voulu entendre sans jamais pouvoir le définir. A suivi une longue quête, éternellement inachevée, du "Saint Graal" musical. HARD FORCE, avec BEST puis, plus tard, ROCKSTYLE, furent autant de bibles pour moi dans cette soif de connaissance. C'est grâce à eux, notamment, que mes goûts, d'abord très "prog'" s'élargirent à d'autres horizons, du hard mélodique à des répertoires plus "heavy". Ce sont eux, aussi, qui m'ont inculqué l'envie d'écrire pour la musique (ROCKSTYLE, PROGRESSIA...).
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK