15 octobre 2013, 0:00

PEARL JAM : "Lightning Bolt"

Album : Lightning Bolt


Peut-on avoir un avenir dans le Rock alors que l'on vogue allègrement vers la cinquantaine ? Si c'est cette question a une quelconque pertinence, c'est que pour leur immense majorité, tous les groupes de l'âge d'or des 60's et 70's que nous vénérons, ont tout dit ou presque avant leur quarantième anniversaire. Or, coïncidence ou pas, voilà que ce mois-ci, je me retrouve à chroniquer deux albums de groupes (STP et PEARL JAM donc), dont les membres sont, comme moi, des quadras bien avancés et qui ont largement passé la vingtaine d'années d'existence, avec à leur actif des albums devenus de VRAIS classiques du genre.

PEARL JAM, dont il est inutile de cacher plus longtemps que je suis un fan au long cours, est une sorte de cas d'espèce : un groupe à longévité exemplaire et ce sans se renier, ni s'affadir. Alors que la fin des 90's ne laissait pas présager du meilleur (« Riot Act » en 2002 est à mon avis leur disque le plus faiblard) l'album « Pearl Jam » en 2006 les voyait renouer avec une inspiration renouvelée, une inspiration puisée au plus profond de leurs racines. Depuis cette date, plutôt que de se singer eux-mêmes comme tant d'autres, PEARL JAM se livre à une relecture à leur sauce de la musique qu'ils aiment. Et le fait est que ça leur va plutôt bien au teint. Sauf si l'on en croit les inévitables grincheux qui n'ont pas compris qu'on n'en était plus à « Ten » et que c'était heureux pour le groupe. D'ailleurs, Eddie Vedder himself laisse entendre dans les colonnes du NME que PEARL JAM est désormais une version ultime du groupe à la papa. Oui, bon relativisons quand même. Un groupe à la papa aurait-il accouché de « BackSpacer », un album qui les vit en 2009/2010 renouer avec des ventes stratosphériques, et dont je n'hésite pas à penser qu'il est non seulement un de leur meilleurs, mais aussi des meilleurs de la décennie. Un album multiple, complexe, mature et fier de l'être. Fort de ce succès public et critiques, le groupe de Seattle nous livre ici son dixième album baptisé « Lightning Bolt » direct héritier du précédent, comprendre en langage clair un album de Classic Rock plutôt musclé, varié et inspiré.

Pourtant certains redoutaient le pire. Avec raison, il faut l'avouer. Lors de l'enregistrement, Mike McReady un des guitaristes du groupe laissait entendre que, toujours à la poursuite de leurs influences, il y aurait dans l'album à venir, je cite "des PINK FLOYD vibes" Ahhhhhh !!!! Noooonnnn !!!! Sainte Disto, préservez nous du « Dark Side Of The Moon » et du Rock planant en général !!!

C'est donc avec une circonspection n'ayant d'égale que mon excitation que je glissais « Lightning Bolt » dans ma platine et... Et ouf ! D'entrée de jeu, avec "Gateway" qui ouvre l'album, pas de doute, nous étions en terrain connu, tant pis pour Frédéric Lopez. A la première écoute, ce qui ressort est la filiation directe avec son prédécesseur, (oui je sais je l'ai déjà dit, je me répète, ce doit être l'âge). Il est d'ailleurs assez marrant de constater que « Lightning Bolt » est construit exactement comme ses deux prédécesseurs. A savoir, sur les premiers titres on bande les muscles, et on prouve qu'on peut toujours jouer à donf des titres punky qui décoiffent. Puis démarre alors une seconde partie qui constitue le véritable album avec des chansons qui voguent vers d'autres horizons. Pour la prod, c'est aussi sans surprise que derrière la console Mister O'Brien nous concocte ce son loud & clear qui va comme un gant au groupe tout en faisant la part belle à la voix déchirée du sieur Vedder.
Passé "Gateway" on enchaîne, (c'est le mot juste) sur le premier single dévoilé cette été, le très musclé "Mind Your Manners", uppercut puis crochet du droit avec le non moins tonique "My Father's Son". Voilà de quoi faire la démonstration que le PEARL JAM du passé est encore bien là, et qu'il peut encore cogner sur le ring et avec talent. Avec "Sirens", on entre donc dans le vif de l'album. Deuxième single de « Lightning Bolt », c'est un titre dans la droite lignée d'"Amongst The Wave" qui laisse voir un PEARL JAM plus mélodique, mais aussi plus émouvant voire poignant. Sur ces titres plus personnels, Eddie Vedder est dans son élément et il est clair qu'il fait là l'essentiel du boulot. Après cet aparté, retour à un registre plus classique du groupe, avec "Lightning Bolt" la chanson qui nous ramera à l'époque de « Yield », puis c'est "Infaillible", mid-tempo et mélodique à souhait, et c'est "Pendulum". Et cette fois, ça y est ! Les voilà les fameuses PINK FLOYD Vibes. Bon, pour paraphraser Laurent Voulzy c'est mou, c'est lent et pour tout dire un peu too much, pour marcher vraiment. Heureusement l'excellent "Swallowed Whole" lui succède et fait oublier cet égarement vite fait bien fait avec sa montée en puissance portée par Vedder (décidément à la fête).
Attention sur "Let The Record Play", PEARL JAM s'aventure sur les terres pur Rock'n'Roll, bass/batterie en mode Rockab' musclé et grattes bien grasses, miam miam ! Ça décoiffe et prouve que le groupe est à l'aise dans bien des registres. "Sleeping By My Self", en mode Folk avec mélodie au cordeau et grattes qui lorgnent du côté Country de la force. Ce même côté que l'on retrouvera dans un mode plus classiquement PEARL JAM sur le titre suivant, le très beau "Yellow Moon" qui ravira les fans de longue date. Pour clôturer ce « Lightning Bolt », le groupe de Seattle a une fois encore choisi un titre purement acoustique. "Future Days" sonne comme un inédit de la BO d'« Into The Wild » qu'avait composé Eddie.

On l'aura compris, « Lightning Bolt » est un bon album de Classic Rock d'un groupe qui fait la musique qu'il aime sans chercher quoique ce soit d'autre, pour notre plus grand plaisir finalement. Il faut laisser les chansons infuser à leur rythme et alors il y a fort à parier qu'elles ne vous quitteront plus. Mais le plus intéressant avec cet album, c'est qu'il prouve à l'instar du dernier album de THE CULT ou du dernier des frères de sang de SOUNDGARDEN qu'on peut avancer en âge et faire des disques de haute volée pour peu qu'on ne coure pas après son passé. En cela, pas de doute, PEARL JAM est grand. Mais ça, vous le saviez depuis longtemps, non ?
(Laurent Ducastel)


PEARL JAM attaque maintenant sa troisième décennie d'existence et il faut se rendre à l'évidence, tel le bon vin, ce groupe se bonifie au fil des ans. La preuve en est leurs deux derniers efforts studio, sans oublier la sublime bande originale de « Into the Wild » composée par Eddie Vedder. Que dire alors de ce dixième album ? Le quintet américain fonctionne depuis ses débuts grâce à une recette infaillible : un cocktail de tension et d'angoisse et/ou de colère pure et simple. Parfois les deux mêlés. Les derniers albums, le très beau « Backspacer » notamment, dérogeaient certes à cette règle mais restaient imparables grâce à des compositions de haut vol ainsi qu'à une écriture mature et très inspirée. Hélas, « Lightning Bolt » n'a de foudre que le nom et force est de constater que même si l'on est en terrain connu, pour ne pas dire balisé et cloisonné, ce disque est sans surprises, à part de mauvaises.

"Getaway", le morceau d'ouverture a un riff assez Heavy qui, même s'il ne rappellera jamais la rage d'antan, reste sympathique. L'enchaînement sur "Mind Your Manners", titre très Punk-Rock dans l'esprit, laisse penser que le reste de l'album sera à l'avenant. Hélas, le soufflé retombe presque immédiatement.

On navigue entre des morceaux mid-tempo certes sans aspérités ni fautes de goût mais sans originalité non plus ("Infallible", "Yellow Moon"). Si certaines chansons tirent leur épingle du jeu grâce à une énergie provisoirement retrouvée ("Swallowed Whole"), la plupart, à l'image de "My Father's Son" ou "Let The Records Play", tournent en rond sans jamais décoller. Quant à "Sirens", deuxième single, il ne déroge pas à cette règle : agréable mais dispensable, aussitôt écouté, aussitôt oublié. Et la voix toujours magique de Vedder n'y change rien.

"Lightning Bolt", le morceau titre, est, malgré sa structure ultra classique sans doute le seul que l'on retiendra grâce à son refrain très efficace. Quant à la deuxième partie, de l'album, elle tombe hélas très vite dans l'oubli à cause de ballades poussives, parfois noyées de claviers ("Future Days") et sans intérêt ("Pendulum"). "Sleeping By Myself", la chanson Folk, n'évoque que de loin les récents efforts de Vedder en solo, l'imagination en moins. Et les frissons, surtout.

Si l'on ajoute à cela des paroles plutôt quelconques pour ne pas dire lénifiantes, à des années lumière de ce qu'écrivait le groupe il y a quatre ans à peine, on obtient un album décevant au regard de l'espoir suscité. Il ne fera donc pas date dans une discographie pourtant truffée de pépites scintillantes. Sans rancune les gars, et à dans quatre ans pour de nouvelles aventures, espérons le beaucoup plus enthousiasmantes.
(Pierre Graffin)

Blogger : Marlo Music World
Au sujet de l'auteur
Marlo Music World
Surnommé Marlo par ses potes à cause de sa passion pour les polars et les chapeaux, Laurent Ducastel est un auteur qui sévit à la fois sur papier, livres et BD ou sur écran dans des documentaires. Il a aussi officié dans divers magazines musicaux dont HARD FORCE MAG évidemment. Le film qu’il a coécrit avec son compère Cédric Tourbe, « Jacques Foccart, l’homme qui dirigeait l’Afrique » a été récompensé d’une Etoile de la SCAM 2011.
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