12 juin 2014, 11:40

BODY COUNT : "Manslaughter"

Album : Manslaughter

BODY COUNT is back. Il y a huit ans, “Murder for Hire” avait pu sembler marquer un genre de tournant punk et hardcore rap dans la carrière de la formation métallisée d'Ice-T : production minimale, instruments généralement en net retrait vis-à-vis des voix. C’était à peu près tout ce qu’il y avait à dire de cet album, tant les Californiens déclinent dans toutes les positions imaginables une recette immuable, immédiatement identifiable, incomparable et imparable – selon certains.

La sortie de « Manslaughter », le 10 juin, réjouit donc déjà tous ceux qui ont assisté à un set de BODY COUNT et peut-être plus encore ceux qui n’ont jamais eu cette chance : BODY COUNT’s back, bitch et il est permis d’envisager à court terme un retour du groupe sur les scènes européennes.

Parce que sinon, pas facile de trouver la version physique de l’album en France : au jour de la sortie, l’ensemble des fnac françaises en avaient commandé 20, en import, et ce réseau n’était pas en mesure de préciser une date d’approvisionnement. Mais l’album est disponible en entier sur youtube via le label du groupe Sumerian Records… Et donc "Manslaughter" n’étonne pas, pas davantage que d’habitude, donc presque pas du tout, sauf sur un point – sur lequel on reviendra.

Un mot d’abord sur les deux "singles" qui ont tourné sur Internet avant les autres : "Talk Shit, Get Shot", qui ouvre l’album, supposé être son teaser provoc’. Mouais. Pas matière à polémique. Le temps de "Cop Killer" est bel et bien révolu. Seulement, en plus, le clip est d’un goût moyen, le morceau est moyen aussi. "Bitch in the Pit" est déjà plus intéressant, dans la série spéciale dédicace misogyne aux gonzesses, mais toujours pas le moins surprenant du monde.

Globalement, dans les paroles, on retrouve donc aussi les ressorts habituels, une forme de sympathique comique de répétition fondée sur les imprécations d’Ice-T, méga-mix de critique sociale, leçon de morale, dénonciation des addictions aux drogues, bravades de gangsta et délires sexuels niveau "la-chatte-à-ta-mère". Comment ne pas voir, en effet, le nouveau "Black Voodoo Sex" comme l’image miroir de "KKK Bitch" ("Body Count", 1992), ou « Back to Rehab » comme un écho de « The Winner Loses » (toujours "Body Count") ?

Musicalement, si la production remet vraiment en valeur le travail de composition et l’exécution d’Ernie C., notamment, c’est finalement quand BC recycle subtilement ses bon riffs qu’il donne le meilleur de lui-même, comme sur le morceau qui donne son titre à l’album : comparez les titres "Manslaughter" et "Born Dead" (tiré de… "Born Dead", 1994).

Enfin, comme d’habitude, BODY COUNT sacrifie au rite de la « ballade » avec "I Will Always Love You", qui ponctue "Manslaughter". Et là attention, c’est le seul moment où on hallucine vraiment : "This song is dedicated to the heroes… the real heroes: the young men and women that have given their life and risk their life for this country…*” S’ensuit une longue et pataude déclaration d’amour aux soldats US et aux vétérans des guerres américaines. Et ça, par quelque bout qu’on le prenne et même si on pourrait aussi en débattre longuement, ça résonne assez étrangement avec le temps où Ice-T déclarait, au début du titre "Born Dead" : They know we [BODY COUNT et ses fans] stand for three things: truth, justice and fuck the American way.**

En conclusion, on est toujours davantage convaincu que Ice-T collectionne des conquêtes sexuelles dont on n’oserait même pas rêver, mais que pourtant, même si ça peut être rigolo de tirer sur des gens, la vie de gangsta n’est pas rose tous les jours (et dieu sait que le line-up originel de BC a payé son tribut aussi bien à la guerre des gangs de South Central LA qu’à la maladie), qu’elle n’est pas non plus exempte de contradictions et que la drogue, c’est mal. Sinon ? Ben… on attend vraiment BODY COUNT sur scène, quoi.

*Cette chanson est dédiée aux héros… aux vrais héros : les jeunes hommes et femmes qui ont donné leur vie et qui risquent leur vie pour ce pays… »

**Ils savent que nous nous battons pour trois choses : vérité, justice et fuck the American way.

Blogger : Naiko J. Franklin
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Naiko J. Franklin
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