8 août 2014, 16:29

MASSIVE : "Full Throttle"

Album : Full Throttle

On est un peu rentré bredouille de Californie : hormis un bagage cabine plein de vinyles et de CDs trouvés chez Amoeba ou chez mon petit disquaire de Palm Desert (33 tours nickels, pressages d'origine US pour $2.00 !!!), on n'y a pour autant pas trouvé la moindre nouvelle sensation du moment. En parcourant l'incontournable L.A Weekly, franchement que des groupes de troisième zone à l'affiche des ROXY, HOUSE OF BLUES et VIPER ROOM de notre humble quartier. Oh, à trois jours près on manquait juste AEROSMITH en concert surprise au Whisky A Gogo...
Pourtant en manque d'honnête combo sleazy-rock (on a eu le temps de faire le tour de toutes les compiles maison à base de LA GUNS, MÖTLEY, RATT, et bien entendu TORA TORA ou ROXX GANG pour les 4700 kilomètres de notre périple...), c'est donc indirectement en Australie qu'on est allé piocher la meilleure came de l'été : reçu depuis mai et à peine sorti pendant notre absence, c'est avec un immense enthousiasme que j'amorce la rentrée (ben ouais, déjà !), ou au moins mon retour estival aux activités du site, avec un TEL disque.
MASSIVE. C'est sans conteste le meilleur truc entendu dans le genre depuis des lustres. Frais, dynamique, carré, turgescent, groovy, branleur mais bosseur à la fois, honnête et juvénile, ce très jeune quatuor aurait CAR-TON-NE en 1987 s'ils avaient été signé par Tom Zutaut chez David Geffen, si vous suivez très attentivement mon regard. Bien sûr, 27 ans plus tard, on repassera pour l'originalité : ne nous la jouons pas, il n'y en a pas la moindre, le style ici proposé est des plus communs. Un style forcément mille fois entendu depuis, souvent pour le pire si l'on ne joue pas avec assurance de la machette saillante dans une telle jungle de copieurs et suiveurs - des ersatz sans saveur on en a soupé des caisses ; il n'y a toutefois aucun mal à reprendre la recette des GUNS N'ROSES ou d'AEROSMITH, tant qu'on y met vraiment du coeur, des tripes, de l'âme et une quadruple bonne paire de couilles. On se comprend, tant il manque la plupart du temps au moins l'un de ces indispensables ingrédients dans la formule soi-disant "miracle". Ici, MASSIVE, aussi jeunes soient-ils, ont TOUT compris et assimilé, exactement comme THE ANSWER avaient compris TOUT ZEPPELIN et FREE sur leur tout premier album - sans hélas pouvoir jamais décoller, maudits soient-ils.

Je ne voudrais surtout pas faire mon snobinard (je n'en ai de toutes façons que le prénom) - non, au moins jouerais-je l'indéfectible mauvaise foi du rock critic et avouerais que ouais, chez les Australiens il y a bien mieux qu'AIRBOURNE (AC/DC, aussi amputé soit-il, peut encore largement dormir tranquille - et de toutes façons je ne kiffe que très modérément les frères O'Keefe... easy.). D'excellents groupes from down under il y en a par contre un sacré paquet, hélas peu connus, depuis une dizaine d'années : les meilleurs étant selon moi ELECTRIC MARY, suivis d'une ribambelle de bons combos quasiment tous repérés par la one-man-team de Bad Reputation, TTHE DEEP END étant sa dernière proie. Mais MASSIVE ne suit pas vraiment les préceptes musicaux façonnés par les indéboulonnables frères Young, ROSE TATTOO, THE ANGELS ou Jimmy Barnes, exceptées les rondeurs virilement affichées dans leurs jeans tights. MASSIVE se situe musicalement davantage dans la veine affichée par les anglais de HEAVEN'S BASEMENT ou THE TREATMENT, même si cette comparaison pourrait les desservir - hélas, les aussi jeunes kids de Cambridge, trop propres et inoffensifs poussinous, n'ont pas su proposer avec "Running With The Dogs" un album aussi retentissant que leur premier jet "This Might Hurt" et affichent désormais tous des looks de clones de Billy Joe Armstrong - very very fake bad boy behaviour, alors que les p'tits anglais sont tout sucre - et je parierai qu'il y a bien plus d'orgies dans le tour-bus des ONE DIRECTION que chez THE TREATMENT. Mauvaise foi, je sais.

Après le succès des RIVAL SONS, et le pari misé sur les décidément très bons TENPERANCE MOVEMENT et BLACKBERRY SMOKE, MASSIVE représente visiblement le très grand espoir d'Earache Records, ex-grand label indépendant du metal extrême. Au point que les Anglais s'accordent tous pour trouver quelque chose de franchement excitant chez les jeunes Australiens : un partenariat a même été dealé avec le magazine Classic Rock, le mensuel ayant distribué gratos ce même album en sus de son sampler - abonnés, habitués ou autres curieux, vous avez donc découvert un échantillon intégral de MASSIVE avant l'été. Coup dans l'eau, balle dans le pied ou pari gagnant ? il fallait être gonflé de la part d'Earache pour oser une telle promo à très grande échelle en balançant ainsi quelques dizaines de milliers de samplers. Il est encore sensiblement trop tôt pour en mesurer l'impact. Pour l'heure, après avoir reçu un bien beau dossier de presse en papier glacé accompagnant "Full Throttle" et son EP compagnon, on a l'impression de revivre l'Age d'Or des maisons de disques qui ne lésinaient sur rien pour titiller les journalistes dans leurs campagnes promos larger-than-life.

Self-made band, MASSIVE n'existe que depuis 2012 dans la région de Melbourne et a déjà sorti ce "Full Throttle" auto-produit l'an dernier dans leur propre pays. On a parlé de couilles ? Sans être transcendante, la production est suffisamment puissante et dépouillée pour savoir mettre en avant l'incroyable qualité de chacune de ces onze compositions. Pas un seul titre de remplissage, que de l'action pure, un pure cocktail de testostérone et de nitro-glicéro' : à peine secouée au shaker que vos organes s'animent, votre corps s'agite et l'épilepsie vous gagne le temps d'une grosse crise de trois quarts d'heure. Vous allez morlfer, c'est nerveux, et donc épuisant. Surtout à quarante berges et qu'on aimerait bien pouvoir suivre l'énergie "high octane" de ces quatre fouteurs de merde ayant donc tout compris au rock'n'roll, éthymologiquement : quelque chose qui vient de l'entre-jambe, qui grimpe, irrigue, contamine et explose - vous savez, quoi : Little Richard, STONES, LED ZEPPELIN, STOOGES, AEROSMITH, GUNS N'ROSES - oui, cet esprit là. MASSIVE possède ça, et c'est pourquoi on veut défendre ce putain de skeud. L'énorme "Bring Down The City" a tout du tube imparable, tout comme ce "Dancefloor" approprié et donc excitant, fiévreux, reprenant la recette des premiers BUCKCHERRY alors que ces derniers se sont ramollis sur disque. Il y a bien quelques clins d'oeil et autres références un peu trop évidentes sur "Full Throttle" ("Lacey" emprunte bien trop son riff au "Move To The City" d'Axl & Co...) mais l'excitation est bien maintenue d'un bout à l'autre - impensable de ne pas succomber au truc dès "Burn The Sun".

Plus loin, la power-ballad "Ghost" est elle aussi imparable : la comparaison avec Steven Tyler y est évidente, alors que son refrain fortement viril et vigoureux la sauve de toute mièvreries, AEROSMITH n'ayant pas sorti une seule vraie bonne ballade rock depuis 1989...

Sur "One By One" ou "Now Or Never", les gamins jouent comme si leur vie en dépendait : comme un participant acharné et affamé face aux jurés d'American Idols ou X-Factor qui, en guise d'élimination, se ferait décapiter ou jeter dans une fosse de requins léopards (une façon enfin couillue de faire de la bonne TV, ou comment associer Jeux du Cirque et Running Man aux télé-crochets, et vite éliminer les poseurs pleurnichards. Moi je dis ça, je dis rien - tant qu'à être cruels, éliminons vraiment les faibles). Et MASSIVE remporterait si aisément la victoire : si en France nous avons BLACK RAIN (bien mais, ahem, surestimés), l'Australie a donc MASSIVE - patronyme certes prétentieux et vulgaire, mais aussi parlant et sans explication de texte que lorsque Bon Scott, jadis, chantait "Big Balls".

On l'a dit, "Full Throttle" est disponible en édition limitée avec deux titres supplémentaires, ainsi que deux reprises : le "If You Want Blood (You've Got It)" d'AC/DC, et "Rats In The Cellar" d'AEROSMITH.

Ancienne maison des NAPALM DEATH, MORBID ANGEL, CARCASS et mille références légendaires du death ou du grind, Earache Records renoue avec la respectabilité en se repositionnant ainsi du côté du classic-rock et, outre un certain opportunisme, nous a déniché en trois ans quatre des meilleurs groupes du genre, chacun dans son style, mais avec la personnalité, l'éloquence, la classe et la jouissance que l'on exigence de groupes prétendant à incarner la relève...

Blogger : Jean-Charles Desgroux
Au sujet de l'auteur
Jean-Charles Desgroux
Jean-Charles Desgroux est né en 1975 et a découvert le hard rock début 1989 : son destin a alors pris une tangente radicale. Méprisant le monde adulte depuis, il conserve précieusement son enthousiasme et sa passion en restant un fan, et surtout en en faisant son vrai métier : en 2002, il intègre la rédaction de Rock Sound, devient pigiste, et ne s’arrêtera plus jamais. X-Rock, Rock One, Crossroads, Plugged, Myrock, Rolling Stone ou encore Rock&Folk recueillent tous les mois ses chroniques, interviews ou reportages. Mais la presse ne suffit pas : il publie la seule biographie française consacrée à Ozzy Osbourne en 2007, enchaîne ensuite celles sur Alice Cooper, Iggy Pop, et dresse de copieuses anthologies sur le Hair Metal et le Stoner aux éditions Le Mot et le Reste. Depuis 2014, il est un collaborateur régulier à HARD FORCE, son journal d’enfance (!), et élargit sa collaboration à sa petite soeur radiophonique, HEAVY1, où il reste journaliste, animateur, et programmateur sous le nom de Jesse.
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