
Avant de commencer, je tiens en premier lieu à remercier Mr Dave Meniketti du groupe Y&T pour la sortie médiatique qu’il a effectué concernant les meet & greet (rencontres avec un groupe) qui deviennent légion – sinon systématiques – et monnayés à prix d’or, si ce n’est contre la vente de l’un de ses organes – les tarifs étant assez prohibitifs dans certains cas et carrément indécents dans d’autres. Ce qui me permet donc à mon tour d’effectuer un petit tour d’horizon de la pratique, d’en livrer mes impressions et, le plus important, de susciter vos réactions.
Mais revenons un instant sur ce qu’a exprimé Mr Meniketti. En premier lieu, il s’oppose catégoriquement à proposer ce genre de prestations et précise que c’est même tout le contraire, que les artistes devraient, même s’il exagère un peu, payer les fans pour les remercier d’être soutenus à une époque aussi volatile et dans les différents contextes qui y sont liés. Je résume brièvement mais c’est le principal message qui se dégage de son interview.
Il fut un temps, pas si lointain que cela, où l’on se dirigeait à la fin d’un concert derrière la salle vers la sortie des artistes et où l’on pouvait voir une ribambelle de fans faisant le pied de grue, qui avec son CD ou son vinyl, qui avec sa photo ou sa place, qui les mains dans les poches, à patienter et attendre encore la sortie d’un groupe afin de pouvoir prendre une photo, se faire dédicacer quelque objet et échanger quelques mots brefs avec ces artistes avant de repartir avec un souvenir impérissable, les larmes aux yeux peut-être, en tenant fort contre soi l’album dédicacé ou l’appareil photo ayant servi à immortaliser cette furtive rencontre. Moment inoubliable et sincère car dénué de toute connotation financière en contrepartie même si parfois effectué avec un certain détachement ou alors expédié, la faute à des musiciens fatigués de leur journée et de la prestation qu’ils venaient d’achever et pressés d’aller se reposer avant la date suivante. Cela est compréhensible.
Mais aujourd’hui, ces temps pas si lointains ont bien changé. Il n’est même plus envisageable (à de rares exceptions près qui craqueront certainement à un moment donné) de ne pas proposer des places avec des meet & greet. Certes, la pratique existe depuis longtemps. Mais là où elle était anecdotique et assez confidentielle, elle est aujourd’hui devenue la norme. Et les prix eux, énormes. Et tous quasiment je l’ai dit plus haut, s’y prêtent. J’ai le souvenir récent d’être allé voir un concert de Sebastian Bach (ex-SKID ROW) et je me faisais une joie à l’avance de pouvoir très certainement le croiser, la date ayant lieu dans une petite salle. Déconfiture totale en m’approchant du stand de merchandising où était épinglé une feuille A4 sur laquelle on pouvait lire : « SEBASTIAN BACH – RENCONTRE ET DEDICACE : 60 € ». Ma réaction a fusé, directe et venant du cœur : « Enfoiré ! ».
J’aurais pourtant été heureux d’échanger quelques mots avec cet artiste que j’ai découvert en 1989 et je serais très certainement reparti avec une photo et son album (disponible sur le stand) que j’aurais acheté et fait dédicacer car je n’avais pas amené d’objet à faire signer. En lieu et place, j’ai conservé les 20 balles que j’avais dans la poche à cet effet et les 60 autres que m’aurait coûté cette entrevue. Pourtant à la fin du concert, ils étaient nombreux à longer le couloir menant à sa loge… Oh, je ne les juge pas. Je trouvais cela triste surtout. Pour moi ? Non, tout simplement pour l’état des lieux que je commençais à faire.
Il me revient aussi le souvenir d’une interview de Brian Johnson (ex-AC/DC ?) dans laquelle il déclarait qu’il avait vécu l’une de ses plus grandes déceptions étant jeune lorsqu’en approchant son idole Chuck Berry afin d’avoir un autographe, celui-ci lui a déclaré qu’il ne signait qu’un autographe par jour et qu’il arrivait trop tard. Peut-être que Brian aurait dû s’il avait pu, lui proposer un bifton de 50 dollars pour qu’il revienne sur sa décision ? Et s’il est assez compliqué d’attraper quelques secondes Brian ou les boys, eux au moins n’ont jamais rechigné à la tâche et se sont toujours prêtés de bonne grâce à l’exercice (et ne proposent pas de meet & greet). Même s’ils n’en ont pas franchement envie tout le temps par moments j’imagine. Les membres de METALLICA quant à eux, en font des meet & greet et procèdent par tirage au sort sur chaque date pour les membres de leur fan-club. Au p’tit bonheur la chance peut-être mais au moins, c’est gratos !
Même si ces meet & greet sont sujet à controverse, il arrive de temps à autre que certains soient tentants et apportent un vrai plus aux fans, si tant est qu’ils puissent se les payer. Et qu’ils remplissent un rôle parfois. Par exemple, je comprendrai (et le ferai peut-être moi-même) que quelqu’un craque (son P.E.L., son slip ou autre) car il sait que l’artiste dont il est archi-fan n’effectue une tournée dans son pays que tous les 15 ans ou bien que cela soit la dernière fois que cet artiste ou ce groupe risque de passer par chez nous. Ou bien l’exemple d’un ami qui est allé à L.A. pour un pèlerinage sur les lieux cultes du hard rock des 80’s, tout cela à la même période où se produisait MÖTLEY CRÜE (le groupe qu'il préfère et donc il est un très grand collectionneur) et qui s’est payé le « über » pack meet & greet, car déjà sur place et voulant avant tout se faire un voyage inoubliable avec sa chère et tendre. Alors si on a bien compris (on n’est pas dupes non plus) que la pratique se généralise car elle est pour les groupes une nouvelle manne financière, l’argent ne rentrant quasiment plus par les ventes de disques (les ventes de quoi ? diront certains). Et si on ajoute à chaque tournée quelques euros sur les prix du merchandising et que l’on écourte d’un quart d’heure la durée du concert (si si, il y en a qui sont comme ça), c’est au final une belle tonte sur le dos de moutons de plus en plus nombreux et consentants.
Alors, à l’instar des matchs de football en Angleterre dont le prix des places est prohibitif et réservé à un certain public (pratique mise en place et motivée certes par le besoin de se défaire du hooliganisme), les concerts sont-ils en passe de devenir des événements V.I.P. ? Je ne le pense pas personnellement mais il est peut-être bon de s’interroger sur ce à quoi tout cela pourrait mener. « Allô Houston ? On pourrait bientôt avoir un problème… ».