7 avril 2018, 10:51

AORLHAC

"L'Esprit des Vents"

Blogger : Clément
par Clément
Album : L'esprit des Vents

Quel plaisir de retrouver le groupe Auvergnat près de huit ans après un deuxième album, « La Cité des Vents », inspiré et épique alors qu’on l’imaginait emporté dans les limbes par un line-up écartelé au gré des vents. Et bien non ! Les souffles tumultueux n’auront pas eu raison de l’abnégation de Spellbound, seul rescapé de la version originelle, qui reste préposé au crachoir lui et son raclement de gosier inimitable. Le voilà ici en bonne compagnie avec NKS à la manœuvre sur la production, juste idéale soit dit en passant, et aux guitares acérées. Derrière ça pousse avec Lonn qui déroule des leads classieux et l’inénarrable Ardraos (également maître à penser de l’excellent SÜNHOPFER) qui percute ses peaux tel le bûcheron titillant les troncs centenaires. Avec un tel line-up, bon sang ne saurait mentir ! Et dès l’ouverture du superbe "Alderica", un frisson parcourt l’échine ! Du tremolo à l’envi, de bonnes grosses mélodies nordiques bien glacées sur les bords, des accélérations épiques… On est bien hein ? Puissant et racé, le metal d’AORLHAC se nourrit ici de heavy pour mieux claquer un black/death furibard qui dévoile une urgence glaciale renvoyant fissa l'auditeur presque vingt ans en arrière, à l'âge d'or du grand DISSECTION et des troupes du label suédois No Fashion. Les ambiances y sont guerrières et viriles, la panzer-section rythmique se révèle indomptable, un mascaret de riffs revanchards broie et concasse les esgourdes avec une fougue typiquement occitane. Fortiche.

Sur "La Procession des Trépassés" et "Une vie de Reclus" les émotions perlent à fleur de peau, soulignant une force brute et nostalgique qui terrasse autant qu'elle subjugue, lardée de guitares acérées et de tempos bouillonnants, toujours habitée par ce sens de la mélodie pointu. Pas loin d’être grandiose comme l'uppercut administré par "La révolte des Tuchins". On en viendrait presque à rêvasser, là, béatement, à savourer ces envolées épiques, ces embardées mélancoliques de toute beauté. Double pédale au rapport et mélodies tranchantes, voilà le black/death dans ce qu'il a de plus furieux et rageur : une machine lancée à pleine vitesse comme sur "Mandrin l’enfant perdu", cruelle… mais bourrée de feeling. Chacune de ces cinquante-sept minutes révélant des textures riches et variées qui alternent avec des passages plus posés, les uns s'imbriquant aux autres de manière homogène, presque naturelle.

Tout cela met en valeur des textes encore une fois troussés dans les légendes locales, c’est du bon, du vrai, de l’authentique ma brave Lucette ! Du huit ans d’âge, sans additif ni saloperie ! AORLHAC nous entraînant une fois de plus au cœur d’un patrimoine culturel riche en folklore où l’on croise bandits de grand chemin, vils contrebandiers, créatures infernales ("Infâme Saurimonde") et peuple révolté contre les injustices d’une poignée de nantis ("La révolte des Tuchins" illustrant la célèbre maxime « Au feu, toi qui nous parles de l'enfer »)), le tout vociféré en français ou en occitan selon l’humeur. L’artwork n’est pas en reste puisque celui-ci révèle une richesse du détail et des atmosphères qui met en exergue le travail d'un artiste exigeant, en l'occurence Stan W. Decker (ADX, ATARAXIE, MASTERPLAN entre autres). Un artwork en forme d'ode à la nature, intrigant, qui fait se côtoyer forêts et montagnes dans d'obscurs et étranges univers baignés par l'obscurité, drapés dans les reflets d'une lune menaçante. Un environnement graphique qui, une fois de plus, n'a pas son pareil pour évoquer ces contrées du Massif Central, occultes et mystérieuses, cachées à l’abri des siècles qui passent.

Avec « L’Esprit des Vents », AORLHAC signe ici un comeback fracassant qui place la barre très haut pour ses camarades de jeu. A l'image de cette pochette qui jongle avec le clair et l'obscur, le groupe se révèle toujours aussi jouissif dans les moments fougueux, appuyé par un Ardraos exemplaire de précision, que dans les parties plus nuancées où la section rythmique se joue des codes avec un certain doigté. L'affaire est donc entendue : avec ce troisième album, le quatuor monte encore d'un cran dans la hiérarchie métallique, se bonifiant comme un grand cru au fil des années, aidé dans sa quête par une production dense et fouillée qui souligne l'excellence de son propos.

Somptueux. Simplement somptueux.

Blogger : Clément
Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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