6 août 2018, 20:57

SINSAENUM

• Interview Fred Leclercq et Stéphane Buriez


© Mathieu Ezan


A l’occasion de la sortie, le 10 août, de « Repulsion For Humanity », deuxième album de SINSÆNUM, Fred Leclercq de DRAGONFORCE, guitariste-fondateur du supergroupe, et son âme damnée Stéphane Buriez, leader de LOUDBLAST, assuraient le service après-vente pour répandre la mauvaise parole…

Apparu en 2016 avec « Echoes Of The Tortured » en guise de carte de visite, SINSÆNUM est un supergroupe très "United Colors Of Death Metal". Avec trois Français dans ses rangs – Fred Leclercq, Stéphane Buriez et Heimoth, bassiste de SETH –, deux Américains – Joey Jordison, ex-batteur de SLIPKNOT actuellement à la tête de VIMIC, et Sean Zatorsky, gosier de DAATH et ex-CHIMAIRA – ainsi qu’un Hongrois, le chanteur Attila Csihar, membre de MAYHEM et SUNN O))), voilà une formation pour le moins internationale. Après un EP, « Ashes » (2017), le Général Leclercq est de retour avec sa 2e division blindée, en attendant la tournée qui visitera l'Europe, mais aussi le Japon et l'Australie, dès l'automne.


Fred, peux-tu nous rappeler la genèse de SINSÆNUM, l'origine du Mal en quelque sorte ?
Fred Leclercq : Stéphane (Buriez) est le premier que j’ai contacté quand j’ai décidé de monter ce projet. A l’époque, je n’avais que deux ou trois morceaux que je lui ai fait écouter et il m’a tout de suite dit qu’il était partant. J’ai également été en contact avec Nick Barker (ex-batteur de CRADLE OF FILTH et DIMMU BORGIR et actuel ANCIENT et BRUJERIA, entre autres) et Rob, le chanteur du groupe canadien NECRONOMICON. Ça les intéressait sur le principe mais comme ça n’avançait pas, ça s’est étiolé sans pour autant qu’on se prenne la tête.
J’ai rencontré Joey (Jordison) en 2007 à l’occasion d’un festival. Ça ne s’est pas très bien passé entre nous parce que Sam, le guitariste de DRAGONFORCE, et moi, on était bourrés et on lui a sorti une blague qu’il a prise au premier degré. On s’est revus un an plus tard quand le groupe a ouvert pour SLIPKNOT et il a tout de suite mis les points sur les i. On s’est découverts à ce moment-là et on s’est rendu compte qu’on était tous les deux très fans de death. Joey et moi, on est restés en contact. Je lui ai donc envoyé des morceaux en 2013, pour savoir s’il serait intéressé pour jouer dessus et il m’a tout de suite répondu oui.
Le projet est donc devenu viable. J’ai alors contacté Sean (Zatorsky), puis est arrivé Attila (Csihar) qui ne devait au départ être qu’un guest mais qui a chanté sur tout l’album parce que ça se passait super bien. Et Stéphane a proposé Heimoth à la basse car même si c’est moi qui ai enregistré toutes les parties d’« Echoes Of The Tortured », il fallait un bassiste pour les clips et pour tourner.

Bien que tu sois l'instigateur du projet, on a lu à peu près partout à la sortie du premier album que SINSÆNUM était la créature de Joey Jordison. Le moment est venu de rendre à Fred ce qui est à Fred…
Effectivement, j’avoue avoir été un peu blessé quand j’ai lu dans tous les articles, ou presque, que SINSÆNUM était le groupe de Joey. Ça m’a fait un peu mal après avoir passé tant de temps à monter le projet mais au moins, j’ai appris comment fonctionnent les médias. A présent, je m’en moque et je me dis que de toute façon, « le nouveau projet de Joey Jordison », c’était nettement plus vendeur que « celui de Frédéric Leclercq ». J’en ai pris mon parti et autant s’en servir…
 

"A la sortie d’« Echoes Of The Tortured », j’avoue avoir été un peu blessé quand j’ai lu dans tous les articles, ou presque, que SINSÆNUM était le groupe de Joey Jordison." - Fred Leclercq

 

Vous étiez six sur « Echoes… », vous voilà cinq depuis l'EP « Ashes » sorti l'an dernier. Où est passé Attila ?
Attila nous a prévenus quand on a commencé à travailler sur « Ashes » que nos emplois du temps respectifs ne concordant pas, il ne pourrait pas enregistrer le deuxième album avec nous. Mais il m’a tout de suite dit de continuer sans lui, qu’il fallait battre le fer pendant qu’il était chaud. Du coup, « Repulsion For Humanity » a été composé en sachant qu’il ne serait pas dessus. Ce qui ne l’a pas empêché de participer, de faire des backing vocals et d’écrire des paroles. Attila fait toujours partie du groupe.

Du coup, Sean se retrouve seul chanteur du groupe. Stéphane, ça ne t'a pas tenté de prendre le micro ?
Stéphane Buriez : Les deux chanteurs de SINSÆNUM sont Sean et Attila et je n’ai absolument pas eu envie de le “remplacer”. Du coup, tout a été composé pour une voix au lieu de deux. Sean, qui a fait une performance vocale assez hallucinante, a vraiment trouvé ses marques et on ne peut pas dire un instant qu’il y a un manque sur tel ou tel morceau. Il y aura toujours des fâcheux pour se plaindre de l’absence d’Attila mais il a quand même fait des backing vocals, a composé des textes et tout validé. L’album a du sens avec une seule voix, sachant que sur scène aussi, il y aura des backing vocals.

Justement, comment ça va se passer en live dans la mesure où les morceaux du premier album comportaient deux voix ?
On est tout à fait capables, Fred et moi, de chanter les parties d’Attila si Sean préfère se concentrer sur les siennes.
Fred : On va aussi établir la setlist en fonction. Ce serait complètement stupide de vouloir jouer “Anfang des Albtraumes” sur lequel Attila parle en hongrois. Mon niveau en hongrois étant ce qu’il est, on va s’abstenir (sourire)… Sean va faire la majorité des chants, mais Stef et moi, on sera là.
 

"Même si le résultat est une musique agressive avec des émotions négatives, rien n’empêche de le faire avec des gens avec qui l’on s’entend bien. Et qui sont d’excellents musiciens en prime. Ne pas leur laisser de marge pour s’exprimer serait contre-productif…" - Fred Leclercq


Appréhendez-vous un peu cette première tournée dans la mesure où, même si vous vous connaissez tous, vous n'avez pas “grandi ensemble”, si je puis dire, en tant que groupe ?
On a passé du temps ensemble sur le tournage des deux premières vidéos mais aussi quand ont été enregistrées les parties de batterie en France, en début d’année, puisque nous avons vécu dans la même maison pendant quinze jours. Et puis nous sommes tous des musiciens professionnels qui savons comment ça se passe en tournée et je pense que nous ferons tous en sorte de laisser de l’espace à chacun. Je ne me fais absolument aucun souci à ce niveau-là.

N'est-ce pas un peu frustrant, avec un tel line-up, que SINSÆNUM passe après vos formations respectives ?
Stéphane : Après le premier album, il y a eu une petite part de frustration dans la mesure où l’on n’a pas pu mettre en place une vraie tournée. On nous a proposé des choses que l’on a été obligé d’annuler en raison de problèmes contractuels de certains membres du groupe. Mais cette fois, on a travaillé en amont pour préparer cette tournée et l’après-deuxième album. On regarde plutôt devant. On est un groupe très jeune et on a plein de choses à prouver.

Fred, le processus de composition de ce deuxième album a-t-il était plus démocratique que le premier puisque tu avais tout composé ?
Fred : Même si sur « Echoes… », c’est effectivement moi qui ai tout fait musicalement, les morceaux n’auraient pas eu de raison d’exister sans l’aval des autres. J’avais besoin de leur validation. Simplement, le premier album a été composé sans que je sache qui y figurerait au final. Cette fois, Stéphane a écrit un morceau, Heimoth aussi, Joey a composé une partie et j’ai retravaillé en sachant de quoi ils étaient tous capables. Même si je suis l’instigateur du projet, le “boss” entre guillemets, rien n’existerait sans mes frères d’armes. Le premier point pour moi était de travailler avec des amis pour que l’expérience soit agréable – même si le résultat est une musique agressive avec des émotions négatives, rien n’empêche de le faire avec des gens avec qui l’on s’entend bien. Et qui sont d’excellents musiciens en prime. Ne pas leur laisser de marge pour s’exprimer serait contre-productif…
 

"« Repulsion For Humanity » est plus cru, plus direct, plus radical que le premier album. Il est moins alambiqué dans ses structures mais ça reste très technique et il se dégage des morceaux un côté qui ratatine la gueule." - Stéphane Buriez


Comment décririez-vous l'évolution entre vos deux albums ?
Stéphane :
Le premier était “classique” dans son côté death metal, avec un certain respect des “codes” du genre, comme le souhaitait Fred. « Ashes », le EP sorti l’année dernière, était un peu les prémices de « Repulsion For Humanity », plus cru, plus direct, plus radical. Il est moins alambiqué dans ses structures mais ça reste très technique et il se dégage des morceaux un côté qui ratatine la gueule.

Quels sont les sujets abordés dans les textes ?
Fred : Heimoth, Sean et Attila ont eux aussi contribué aux paroles sur cet album. Les sujets sont évidemment sombres. Suicide, mort, références à des films d’horreur – “Sacred Martyr” (sur lequel apparaît Lauren Hart de ONCE HUMAN, NDJ) s’inspire du film français Martyrs et “Nuit noire” tire son titre du livre du même nom de la collection “Trash”, la suite de la collection “Gore” si chère à mon cœur… Il faut que cela colle avec la musique. Quand on parle de l’enfer, c’est métaphorique, personne dans le groupe n’est croyant. Par contre, ce n’est pas un gimmick quand on parle de “répulsion pour l’humanité” dans le morceau qui donne son titre à l’album : c’est bien le sentiment que nous éprouvons tous pour la société et le monde actuels.

C'est Travis Smith, qui a dessiné des pochettes pour SLAYER, OPETH ou NEVERMORE, qui a réalisé l'artwork du nouvel album. Avez-vous travaillé ensemble à son élaboration ou avez-vous choisi un dessin déjà existant ?
Joey nous a proposé de travailler avec Travis Smith parce qu’il avait déjà bossé avec lui (sur le visuel de l’album de VIMIC, NDJ) et que c’est un ami à lui. Avant de le contacter, j’ai regardé sur son site pour trouver des idées. Et j’ai vu une toute petite vignette que l’on ne pouvait pas grossir où le personnage avait une espèce de sourire sardonique qui m’a plu. On a donc pris ça comme base et on l’a travaillé pour en faire quelque chose d’encore plus dégueulasse qui colle avec la musique.

Vous avez fait appel aux TAMBOURS DU BRONX sur “Final Resolve”, le premier extrait de l'album. Est-ce parce que Stéphane, tu as rejoint WEAPONS OF MASS PERCUSSION, leur “projet” metal, fin 2017 ?
Stéphane : On avait l’idée de rajouter un côté percussif et puis Fred m'a dit que ça serait bien de contacter les TAMBOURS DU BRONX car ça collait parfaitement avec le côté tribal, répétitif, vaudou que l’on recherchait. On leur a envoyé nos parties à nous et ils ont collé leurs tambours dessus. Je les ai effectivement rejoints en novembre dernier mais ça n'était pas leur première incursion non plus dans le metal puisqu'ils ont déjà joué avec SEPULTURA.

Quels sont vos albums préférés dans la discographie des autres – hors SINSÆNUM évidemment…
Stéphane : Joey : « Iowa » (SLIPKNOT), Fred : « Maximum Overload » (DRAGONFORCE), Sean : « The Concealers » (DAATH), Heimoth : « Les Blessures de l'âme » (SETH), Attila : « De Mysteriis Dom Sathanas » (MAYHEM).
Fred : Heimoth : « Les Blessures de l'âme » (SETH), Attila : « De Mysteriis Dom Sathanas » (MAYHEM), Stéphane : « Disincarnate » (LOUDBLAST), Sean : « The Concealers » (DAATH), Joey : « Iowa » (SLIPKNOT).


Retrouvez SINSAENUM en concert sur les dates suivantes :
28 sept. à St-Brieuc - La Citrouille
29 sept. à Paris - Le Flow
30 sept. à Reims - La Cartonnerie
1er oct. à Esch-sur-Alzette - La Kulturfabrik (Lux)
14 oct. à St-Etienne - Le Fil
16 oct. à Colmar - Le Grillen

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Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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