Et si aujourd'hui j'écrivais une chronique sérieuse ?
Il y a deux ans s'éteignait, pour les metalcoreux, une lumière qui était un des portes paroles du genre. Tom Searle disparaissait et ARCHITECTS offrait au monde la lumière noire qu'était l'explicite « All Our Gods Have Abandoned Us ». Un album posthume que beaucoup crurent le dernier des militants métalleux.
2018, ARCHITECTS revient des enfers et déchaîne le non moins pessimiste « Holly Hell ». On peut parler de sacralisation. La sacralisation d'un genre. Cet album est peut-être le « Master Of Puppets » du metalcore.
L'album est dans la continuité direct de « All Our Gods Have Abandoned Us ». Noirceur et puissance, le tout avec une majesté toute britannique. "Death Is Not Defeat", ou comment s’extraire avec douleur de la léthargie du deuil. La batterie de Dan Searle roule tels les brisants lors d'une tempête. La voix de Sam Carter, si caractéristique, même si elle ne cherche pas le growl d'un groupe de thrash, pousse toujours plus loin dans l'exorcisme des sentiments. Et cette voix mes amis est de toute beauté.
« Some Things Are Broken Beyond Repair » clame le frontman dans l'exceptionnel "Hereafter", aux riffs qui surfent par-dessus des breaks aux silences paradoxalement si lourds. Nous sommes toujours dans l'image d'un ouragan implacable. Une douloureuse beauté ? Cela résume bien l'album. Il s'agit bien d'un concept album. Il serait idiot de décortiquer chaque titre, alors qu'il se dégage de leur succession une cohérence. J'ai parlé d'ouragan, avec ces riffs hypnotisants, ces rouleaux de basses pareils à une mer déchaînée. Les membres survivants d’ARCHITECTS découvrent qu'ils sont "Mortal After All", qu'ils se cherchent dans cet enfer sacralisé. Une Tempête Shakespearienne relue et corrigée ? En quelque sorte.
« There Is A Holy Hell Where We Can Save Oursalves ».
Encore une fois le metalcore m'évoque un moyen extrême d'expression. Celui d'une jeunesse à vif, qui doit lutter pour survivre. Autant comme génération que comme genre musical. cette génération a conscience de sa "Damnation", de sa fragilité. Les yeux, et le scream, grand ouverts ces jeunes gens choisissent de devenir des "Royal Beggars". Dualité éternelle, riches et pauvres, faibles et puissants. Violence des riffs contre breaks contemplatifs, une "Modern Misery" hurle Sam l’ange brisé. De la majesté toujours et encore.
ARCHITECTS sont des bâtisseurs. Chaque titre contient sa cohérence avec les autres, tout en déclinant en nuances variées le thème de l'exorcisme de la souffrance au travers de riffs et refrains hypnotiques. Et quelle complémentarité que cet agencement de rythmiques, de cris, des sons griffés et griffants.
Laissez se dérouler « Holly Hell » au travers de tout votre être. La tempête ne devrait pas vous laisser indifférents. Vous allez voyager et vibrer. Un voyage au pays des sens. Un voyage qui s’achève sur "Doomsday" et "A Wasted Hymn", morceaux d’une ampleur symphonique. Chaque instrument occupe une place primordiale. Sam y explore encore de nombreux registres avec une insolente maîtrise.
ARCHITECTS. La beauté de la douleur.