Je ne connais pas assez la Bourgogne et encore moins Chalon-sur-Saône, repaire des membres d’ARIDES, mais j’imagine que cela doit être un lieu inspirant pour jouer du black metal. Parce qu’à l’écoute de leur premier album, les quatre gaillards semblent baigner dans une atmosphère idéale pour façonner des riffs de bûcherons mêlés à des ambiances mystiques de premier ordre, le tout fleurant bon les relents de humus et de brouillard glacé. Des paysages sonores brumeux, inquiétants et rageurs que le quatuor trousse sans faillir, dégageant en toile de fond une véritable mélancolie, une sensibilité à fleur de peau. Et le plus fort c’est que le groupe ne compte que quatre années d’existence vierges de toute existence discographique…mais sa maturité est déjà indéniable. J’en veux pour preuve ces breaks lumineux et ces structures de compositions aérées et progressives qu’il distille avec talent pour apporter à chaque nouvelle écoute son lot de sensations fortes et de surprises.
Côté pile, tout cela fleure bon la tradition américaine et c’est vrai qu’il serait simple de ranger le groupe à la va-vite aux côtés des WOLVES IN THE THRONE ROOM, WEAKLING ou SKAGOS dont il partage quelques velléités mélodiques, mais non, ARIDES pousse le bouchon plus loin et fait voler en éclats ce cadre fragile pour y apporter sa propre patte. Il propose ici un black metal racé et mélodique, étourdissant, dévoilant sur chaque morceau des textures riches et variées qui alternent avec des passages parfois plus posés. Des moments de bravoure lardés de guitares acérées et de tempos bouillonnants, toujours habités par un sens pointu de la mélodie. Côté face, l’artwork signé Johanna Solvery, habillé ici dans un superbe digipack, apporte une dimension fantastique, folklorique à cette œuvre qui intrigue autant qu’elle charme. Chapeau bas.
Nous voilà donc en présence d’un premier album subtil et maîtrisé, tout en nuances. Oui, un album équilibré qui navigue avec malice entre atmosphères ténébreuses et embardées sauvages où les guitares hurlent leur détresse à qui veut bien l'entendre. Quarante-six minutes qui résonnent comme une bouffée d’air vicié dont l’on se régale à pleins poumons, perdu quelque part dans une forêt montagneuse envahie par le brouillard et le froid. ARIDES ? Ne vous fiez pas à ce patronyme qui étanchera avec délice votre soif de ténèbres…