En alphabet cyrillique, "Batowka" signifiant "Père", nous sommes d'entrée de jeu invités à une messe inédite pour le moins décalée... Œuvrant dans un registre black metal orthodoxe d'excellente teneur à la croisée des énigmatiques CULT OF FIRE, MGLA ou UADA et drapé de costumes ornementaux, les Polonais BATUSHKA cultivent le mysticisme tantôt pro tantôt anti-religieux tel un GHOST juché sur son trône bien trop polissé de nos jours.
Pour le moins étrange, la formation avait suscité de fortes interrogations sur son line-up secret lors de la sortie de « Litourgiya » (2015), paru sur Witching Hour Productions, label émérite du patron et chanteur Bart. Projet parallèle de membres de BEHEMOTH, VADER ou consorts ? Il n'en fut pourtant rien mais la richesse du concept et l'absence de réponse accentuèrent l'insatiable curiosité en son sein.
C'est bel et bien le nouveau joyau sculpté en tant que chanteur également du groupe respecté HERMH, laissé désormais en sommeil depuis une décennie. Le décor théâtral est planté et dévoile en amont un conflit majeur digne de GORGOROTH et IMMORTAL puisqu'une dispute judiciaire entre anciens membres pour la paternité et la continuité du projet vient d'être diligentée. En résumé, un patronyme, deux entités distinctes avec deux nouveaux albums sortis à deux mois d'écart ! Au nom du Père et de grâce, quel aubaine pour les fans tant la similitude est flagrante et complémentaire à la fois.
Classé n° 1 dans les charts polonais et venant d'ouvrir pour le légendaire KING DIAMOND, « Hospodi » distille une ode feutrée extrême à souhait qui nécessite une écoute profonde, répétée et enivrante. L'album est construit en une architecture dissonante d'ambiances funéraires magnifiées par de subtiles atmosphères méandriques, le tout serti de chants ecclésiastiques inquiétants. Entouré du compositeur principal de THAW et du batteur d'ANTIGAMA et HATE, ce second disque confirme les espoirs bénis d'une maturité instrumentale déjà atteinte.
BATUSKHA s'inscrit haut la main comme le nouveau protégé de Nergal (BEHEMOTH, ME AND THAT MAN), tous deux managés par 5Bam (SLIPKNOT, KING DIAMOND, MEGADETH...) au travers d'un black metal liturgique et avant-gardiste à l'envoûtement immédiat. Irrémédiable est le courage incarné d'exhorter de tels propos vindicatifs dans un pays si cloisonné par la liberté culturelle en dehors des sentiers autorisés. Cette cérémonie sanctifiée, inversée ou excommuniée à laquelle s'adonnent avec authenticité et sincérité ces agitateurs d'opinion spirituelle durant plus de 50 minutes, démontre que la liberté d'expression non blasphématoire reste un art majeur...