22 février 2020, 10:00

JUDAS PRIEST

• A maintes reprises


© Lilian Ginet | HARD FORCE


Rubrique initiée par mon collègue Jay Sérignac dans le but louable de faire sortir de l'anonymat un obscur petit groupe du nom d'IRON MAIDEN, A Maintes Reprises propose de découvrir les… reprises (bravo à ceux qui suivent) immortalisées sur album par différentes formations qui ont fait date dans l'histoire du hard rock et du metal. Contrairement à la bande à Steve Harris, particulièrement généreuse en la matière, JUDAS PRIEST n'a enregistré que peu de covers au cours de ses 50 années d'existence. Passage en revue, par ordre chronologique, d'abord avec l'original, puis avec la version signée par les pourvoyeurs d'acier britannique.


"Diamonds & Rust"
Baptisée "la reine du folk" ou encore "la Madone des pauvres", Joan Baez est une figure mythique du mouvement hippie. Pasionaria et militante, elle écrit "Diamonds & Rust", présent sur l'album du même nom sorti en 1975, dans lequel elle parle de la fin de son idylle avec Bob Dylan dans les années 60. Chanteuse/guitariste engagée qui fera même quelques mois de prison sans jamais renoncer à ses convictions, Joan continue aujourd'hui encore son combat en faveur de la paix et de la liberté. Pour l'anecdote, c'est en écoutant sa version de "Babe I'm Gonna Leave You", composé par Anne Bredon en 1950, que Jimmy Page et Robert Plant décidèrent de le reprendre sur le premier album de LED ZEPPELIN...
 


 


Enregistrée en 1976 pendant les sessions de « Sad Wings Of Destiny », la reprise apparaîtra finalement un an plus tard sur « Sin After Sin », troisième album du PRIEST, avant de prendre toute sa dimension sur le live « Unleashed In The East » (1979). C'est en fait un représentant de la maison de disques des cinq hommes qui leur a suggéré de reprendre la chanson pour tenter une percée sur les ondes américaines. D'abord outré par cette proposition qu'il juge indécente (« C'est quoi cette plaisanterie ? On joue du heavy metal ! » s'offusquent les musiciens en découvrant le titre, folk et dépouillé), le groupe se penche finalement sur la question et décide d'en donner une version personnelle. D'ailleurs, deux couplets aux références plus intimes, qui auraient été ridicules dans la bouche de Rob Halford, ont disparu. "Diamonds & Rust" leur permettra de passer à la radio américaine et donc de toucher un plus vaste public à une époque où Internet, et donc YouTube, n'étaient même pas une hypothèse.
Ce n'est qu'en 1985 que le chemin de JUDAS croisera pour la première fois celui de Joan Baez, à l'occasion du Live Aid à Philadelphie. « Quand je l'ai vu se diriger vers moi, je me suis dit qu'elle allait me demander ce que l'on avait fait à sa chanson, confiait le chanteur il y a un an et demi au Washington Post. Mais Joan m'a salué et m'a déclaré : "Mon fils m'a demandé de vous dire, si je vous voyais aujourd'hui, qu'il préfère votre version de "Diamonds & Rust" à la mienne". C'est une attitude particulièrement rare dans le music business qui en dit long sur son humanité. »

Par la suite, JUDAS prendra l'habitude d'interpréter la chanson en électro-acoustique, ce qui rapproche évidemment sa version de l'original de Joan Baez.

A l'US Festival, le 29 mai 1983…
 


En électro-acoustique…
 


 


 


"Better By You, Better Than Me"
En 1969, SPOOKY TOOTH, groupe de rock anglais, sort son second album, « Spooky Two », sur lequel figure "Better By You, Better Than Me", composé par le claviériste Gary Wright.
 

 


Neuf ans plus tard, il est repris par JUDAS sur « Stained Class », avec un petit pont chanté supplémentaire. Un rajout de dernière minute demandé par la maison de disques, le quatrième album des Britanniques étant dans l'ensemble plutôt sombre et CBS souhaitant lui donner un côté un peu plus "commercial" (toutes proportions gardées s'entend). Ils n'auront pas à le regretter... jusqu'à ce jour de 1990, quand ils se retrouvent impliqués dans un procès aussi grotesque que sordide de l'autre côté de l'Atlantique. En 1985, deux fans du groupe résidant dans le Nevada ont fait un pacte après avoir écouté l'album pendant une demi-journée sur fond de consommation d'alcool et de drogue et ont décidé de se suicider avec un fusil de chasse calibre 12, "poussés" par un prétendu message subliminal dans la chanson qui disait « do it ». L'un est mort mais l'autre, défiguré, a survécu.
Le procès durera trois semaines avant que le plaignant, qui décèdera par la suite d'une overdose de médicaments, ne soit débouté. En 1992 sortira un documentaire retraçant "l'affaire", Dream Deceivers: The Story Behind James Vance vs Judas Priest, que l'on peut trouver au détour du Net. On y entend Halford faire fort justement remarquer que s'ils avaient choisi d'incorporer des messages subliminaux à leurs chansons, cela aurait été pour pousser les fans à acheter davantage d'albums de JUDAS plutôt qu'à se suicider, ce qui serait particulièrement contre-productif. Et que même si « do it » il y avait, ce qui n'est pas le cas, cela ne signifierait absolument rien…


 


 


"The Green Manalishi (With The Two Prong Crown)"
Dernière chanson écrite par Peter Green avant qu'il ne quitte FLEETWOOD MAC, "The Green Manalishi (With The Two Prong Crown)" sort en 45 tours en mai 1970 et se classera, quatre semaines durant, dans le top 10 de sa Grande-Bretagne natale. A l'époque, le guitariste/chanteur est en plein trip LSD et s'est complètement éloigné des autres membres du groupe, dont John McVie qui jouait avec lui dans THE BLUESBREAKERS. Compte tenu de ses penchants exacerbés pour les psychotropes, on ne s'étonnera pas de l'étrange titre de la chanson ni du texte barré qui lui serait venu pendant un rêve sous acides. Par contre, musicalement parlant, "The Green Manalishi..." est dans le même esprit que certains titres de CREAM ou IRON BUTTERFLY, par exemple. Car à l'époque, FLEETWOOD MAC était un des fers de lance du rock bluesy britannique, avant de devenir par la suite un monument du rock folk.
 


 


Huit ans plus tard, JUDAS PRIEST en enregistre une excellente reprise, orthographiée, allez savoir pourquoi, "The Green Manalishi (With The Two Pronged-Crown)". On la retrouve d'abord sur « Hell Bent For Leather », qui n'est autre que le titre américain de « Killing Machine », son cinquième album, rebaptisé ainsi outre-Atlantique en raison du Cleveland Elementary School Shooting de San Diego, en Californie en janvier 1979 – une de ces fusillades dont l'Amérique s'est malheureusement fait une spécialité – où une ado de 16 ans abattit le principal et le gardien d'une école primaire et blessa huit élèves et un policier. Le morceau sera rajouté ultérieurement sur le pressage européen. 
Mais c'est sa version en concert, sur « Unleashed In The East » (1979), que tous les fans ont en tête, comme, ici encore, à l'US Festival en 1983…
 


 

    
 


"Johnny B. Goode"
Repris par les plus grands, d'Hendrix à Elvis Presley en passant par les BEATLES, ce standard écrit et interprété par Chuck Berry en 1958 est considéré comme le premier hit rock'n'roll de l'histoire. Ce qui n'était pas un mince exploit à l'époque, le chanteur, guitariste et compositeur étant, comme on le disait alors, « un homme de couleur »... La chanson, plus ou moins autobiographique, a même été envoyée dans l'espace à bord d'une sonde, en 1977, à l'occasion du programme spatial Voyager de la NASA, pour étudier les planètes externes du système solaire. Au cas où les extraterrestres aient envie de découvrir notre musique...

Et on n'a pas oublié non plus la scène culte de Retour vers le Futur dans laquelle Marty McFly (Michael J. Fox) "invente" le rock'n'roll à l'occasion du bal de fin d'année en jouant "Johnny B Goode" qui n'est pas encore sorti, mais va inspirer Chuck Berry dont le cousin est dans la salle…
 


 


Présente sur « Ram It Down » (1988), "Johnny B. Goode" est à ce jour la dernière reprise enregistrée par JUDAS. Elle figure également sur la B.O. du film Johnny Be Good, sorti la même année, une comédie américaine qui, malgré la présence de Robert Downey Jr., Paul Gleason, Jennifer Tilly et Uma Thurman à l'affiche, fait un gros flop au box-office. En France, il sera affublé (le pauvre) du nom rédhibitoire de Toutes folles de lui
 


 





A Maintes Reprises IRON MAIDEN

Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
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