4 mars 2020, 14:28

STONE TEMPLE PILOTS

• "Perdida"

Album : Perdida

STONE TEMPLE PILOTS, un groupe à part de la vague grunge à laquelle il a été associé à sa création alors qu’il n’a que peu à voir avec ses pairs de Seattle, a publié un album entièrement acoustique intitulé « Perdida », « Perdu » dans la langue de Cervantes. Un album qu’on devine nécessaire, obligatoire, afin d’essayer de faire le deuil de deux chanteurs disparus ayant officié au sein de la formation : Scott Weiland et, plus brièvement, Chester Bennington. Ceci est donc le deuxième disque avec leur successeur, Jeff Gutt, qui a ici la lourde tâche d’enterrer le passé, panser les plaies et les blessures de ses camarades en mettant sa voix et des mots sur les maux.

Le disque s’ouvre sur la pudique ''Fare Thee Well'', qui se veut un discours d’adieu à un être disparu mais dont le parallèle peut être fait envers ceux qui ont perdu l’amour de quelqu’un (« Porte toi bien / Je déteste avoir à faire cet au revoir / Et je peux affirmer que tu n’es plus là / A la façon que tu as de me manquer / Ne réalises-tu pas que tu étais tout pour moi / A ton départ, j’ai su / Qu’une part de moi reste avec toi / (…) Il n’est chose plus triste que lorsque l’amour s’en va »). L’émotion étreint, puis étrangle, finit par déchirer et il n’est alors pas possible de faire autrement que de se laisser submerger et de laisser couler ses larmes, pour peu que l’on se retrouve dans ce message. On ne peut laisser partir l’autre sans ressentir l’envie irrépressible de tout faire pour le retenir, qu’il nous revienne et STONE TEMPLE PILOTS de nous prendre la main, nous indiquant le chemin de la résilience pour avancer, pour vivre. Revivre.

Les frères Dean et Robert DeLeo, respectivement guitariste et bassiste, ont tissé sur ce disque ce que l’on peut appeler des canevas émotionnels plutôt que des chansons. Et pour faire passer les émotions, ils ont fait appel à une palette d’instruments tels que la flûte, le violoncelle ou encore un discret saxophone refermant ''Years''. L’absence de l’être aimé est mise en notes sur la sublime ''Miles Away'' où le narrateur décrit ce qu’il ressent alors que le manque se fait ressentir, que les mots arrivent trop tard mais qu’ils doivent être dits, pour ne pas sombrer dans la folie, et que tous les sentiments liés à cette relation remontent en lui (« Si je pouvais remonter le temps, c’est la première chose que je ferais / Maintenant, je baigne dans le son de tes échos / Je parcourrais les mers juste pour savoir ce que tu sais / Je voudrais ressentir tout ce par quoi tu es passé »). Mais ce disque n’est pas l'album de nos souffrances et laisse poindre des moments de bonheur à l’instar de ''She’s My Queen'', que toute femme rêverait d’entendre chanter pour elle. Des mots simples d’un homme pour décrire l’amour qu’il lui porte (« Elle est mon âme, une mélodie, c’est ma reine »).

Je parlais de résilience plus haut et il est possible de la toucher du bout des doigts sur la finale ''Sunburst'' où se trouvent les vers suivants : « Un coup de soleil qui vient et s’en va, laissant derrière lui plus que quiconque peut l’imaginer, une lueur de lumière pour qu’une fleur pousse. » Doit-on y comprendre que la douleur est nécessaire afin de faire place à la lumière et à la renaissance ? Ce dernier titre se colore d’un peu d’espoir dans le désespoir, d’une touche de couleur pastel délicate dans la noirceur de l'esprit et propose à l’auditeur d’aller vers l’avant, d’accepter le passé et de laisser partir ceux qui le doivent, de les regarder encore mais ne pas les oublier. Avancer.

« Perdida » est un disque, sinon cathartique, du moins hautement symbolique dans la discographie du groupe de par les messages qu’il délivre, et que l’on écoutera de temps en temps pour se rappeler, se souvenir des joies, ne pas reproduire certaines erreurs, pour sourire tout simplement et non pleurer. Il se veut à part, un témoignage arrêté sur une époque, une relation, des sentiments et on plongera en lui, dans ce tourbillon mis en musique alors que l’on se sent soi-même éparpillé aux quatre vents, « perdu ». Evitant à tout moment de tomber dans le piège de l’album pathos, c’est une mélancolie mâtinée d’un sourire bienveillant qui s’en dégage, nous enveloppant d’un réconfort et plaçant en nous l’espoir de se retrouver en s’adressant directement à notre âme.

Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
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