
AARA n’est pas un groupe qui excelle dans le tourné de pouces. Comme je l’avais précisé en introduction de l’interview que nous avait accordé Berg en 2020, son principal artisan : « Formation du groupe en 2018, premier album sorti dans la foulée l’année suivante chez Naturmacht Productions puis signature expresse chez Debemur Morti. Ni une ni deux, un premier EP, « Anthropozän », paru en 2019 pour se faire la main et c’est avec son premier grand format, « En Ergô Einai » que le groupe passe en 2020 sous les feux de la rampe ! »
Paf, à peine un an plus tard, revoilà les Suisses passés sous le radar avec ce deuxième album, « Triade I: Eos », qui monte encore d’un cran dans la maîtrise d’un black metal de très grande classe. Toujours secondé par le mystérieux J. derrière les fûts, Berg et Fluss délaissent cette fois-ci les fastes du XVIIIe siècle pour s’aventurer dans l’univers du livre Melmoth l’Homme Errant de Charles Robert Maturin. Celui-ci met en scène un certain John Melmoth, chargé par son oncle, à l’article de la mort, de détruire un portrait vieux de cent cinquante ans représentant un jeune homme au regard étrange. Cela signe le début d’une histoire où le protagoniste principal va voir son quotidien, peuplé de phénomènes étranges, progressivement virer au cauchemar. D’un pur point de vue musical, le style du groupe n’est pas en reste puisqu’il colle à ce nouveau climat d’angoisse et de mystère avec des riffs XXL toujours bardés de trémolos mais surtout de rythmiques plus directes, concises qui décuplent la puissance de frappe des Suisses. Les quarante-cinq minutes de ce voyage en eaux troubles prennent l’allure d’un plan machiavélique où le mal rôde, tapi dans l'ombre, attendant son heure pour exécuter ses sinistres desseins. "Tantalusqual", "Nimmermehr" ou "Effugium" font partie des morceaux que le duo a composés de plus rapide à date, double pédale et mélodies tranchantes éclaboussent un black/death dans ce qu'il a de plus furieux et rageur. Une machine cruelle mais majestueuse qui déploie un sens de la mélodie ultime et imparable tout du long.
Une nouvelle fois enregistrée dans l’antre des Chäuer Studios, la musique d’AARA explose dans une production d’une limpidité imparable, rendant justice au passage à son black metal des plus fougueux. Amoureux des belles productions d’époque du label No Fashion, des œuvres éternelles de DISSECTION, DAWN ou SACRAMENTUM, cet album est fait pour vous !
A noter que le premier EP du groupe vient de faire l’objet d’une réédition par Debemur Morti sous plusieurs formats vinyle de toute beauté, une occasion idéale pour découvrir les début d’AARA qui étaient déjà fort prometteurs...